Corrigés de colles : 4 sujets dt 1 Eur

Vous pourrez trouver ici quelques idées de traitement de sujets : problématiques, plans, compte-rendu de jury... Vous pouvez y participer en m'envoyant des prises de notes de sujets d'autres colleurs.

sujet sur l'Europe : "Une ou des Europe ?"
corrigé original avec un plan scalaire original mais qui fonctionne bien













 

Sujet quinzaine 3 = Asie
La territorialisation des espaces maritimes asiatiques : 
atout ou risque pour le monde ?

Erreurs à éviter :                -trop limiter le sujet à l’Asie de l’Est, surtout à la Chine
                                               -traiter « pour le reste du monde » et non « le monde », donc aspects internes à l’Asie importants
                                               -ne voir qu’un de des deux gds thèmes su sujet : soit géopol, soit éco
                                               -penser aux acteurs du sujet : organisations mondiales ou régionales, Etats, firmes, élites, peuples
                                               -se contenter d’un plan sans risques (mais non interdit)  I/ terr  II/ atout   III/risques
                                               -négliger la question environnementale
                                               -ne pas voir tous les aspects multiscalaires du sujet (voir jeu de couleurs du corrigé visiblesur blog)
Signes d’une réussite :      -plan qui nuance le propos (ce qui justifie le point d’interrogation)
                                               -variété de l’argumentation au niveau géo
                                               -précision de l’argumentation (développer un ex bien maîtrisé)
                                               -conclusion qui ne se contente pas de faire le bilan des 3 parties, mais répond à la problématique et propose une relance du débat (ouverture) 
Probl : Les intérêts éco, pol et géopol des pays asiatiques liés à l’extension de leurs espaces maritimes sont-ils compatibles avec la logique mondialiste ? Mais, les problèmes ne viennent-ils pas surtout de l’Asie elle-même ?
Partie
Idée centrale
Sous-partie
Mots clés
Exemples
acteurs
I
La territorialisation est un prolongement récent et positif pour un éco mondialisée…
A –Une logique commerciale ancienne
Européanisation
Routes maritimes



FMN chin et jap
Consommateurs du monde entier
B – Une logique économique accentuée par la mondialisation
littoralisation
Extraversion éco
ressources


Marines eur, am, chinoise…
C – d’où l’évolution juridique
Souveraineté des Etats
ZEE
Plateau continental
Etats insulaires

Communauté internationale
Tribunal inter du dt de la mer Hambourg
II
… mais aussi sources de problèmes à la fois en Asie et dans le monde…
A – des problèmes anciens et nouvaux
Conflits anciens non résolus : Guerre froide, expansionnisme jap
populisme
Corée du Nord
Vietnam/Chine
Taïwan
Kim Jon Un
PCC PCV
Elites/armées/peuples
 B – qui provoquent une course aux armements et une pollution croissante
Course aux armements
pollution
Continent plastique

Etats-Unis
III
D’où une forte incertitude pour l’avenir qui oblige à dépasser les risques, surtout au niveau mondial ?
A – Incertitudes et espoirs géopolitiques :
« pivot » américain
« blue line » = risque
Ou ASEAN étendue = coopération
G2

FMN eur, am, jap
Etats-Unis
B – Des solutions éco et géopol pour apaiser les tensions
Route du Nord
Pont intercontinental

Russie
Asie centrale
Echelles : mondiale/régionale/nationale/locale
Plan alternatif :   I/territorialisation       II/ Asie            III/ monde
Conclusion :Le développement croissant de l’Asie ainsi que la croissance mondiale participent à la main mise des espaces maritimes. Atout pour le monde, car répondant à une demande croissante, la territorialisation est compatible et est intimement liée à la mondialisation, mais elle comporte aussi un volet politique et géopolitique plus inquiétant. En effet, elle symbolise le nationalisme et la volonté de souveraineté d’Etats marqués par une histoire souvent dramatique et humiliante, à l’image de la Chine dont l’attitude du PCC sera une des clés pour éviter une catastrophe.
                La comparaison (par Françoise Nicolas de l’I.F.R.I.) de la situation actuelle de l’Asie avec celle de l’Europe en 1913, faite d’échanges et de tensions, n’est pas rassurant

         Proposition de corrigé rédigé


                En 1982, plus de 150 Etats (soit la presque totalité des Etats de l’époque) se réunissent à Montego Bay et aboutissent à la signature d’accords juridiques sur le droit de la mer avec, en particulier, la création de Z.E.E., zones économiques exclusives ainsi que de leur extension possible via le plateau continental. Cet accord international majeur illustre parfaitement la territorialisation des espaces maritimes. Il s’agit d’un processus d’occupation par les hommes et de maîtrise par les Etats des espaces situés dans les mers et océans. Il implique donc une fragmentation de l’espace maritime par la création de frontières nouvelles. Cette occupation débute par une demande de souveraineté de la part des Etats sur des espaces maritimes ainsi que sur les îles qui y sont intégrées et implique souvent les firmes, notamment pétrolières. L’importance des hydrocarbures et leur essor en off-shore peut ainsi justifier d’avoir une vision large de l’Asie et d’y inclure sa partie occidentale, c’est-à-dire le Moyen-Orient. En Asie, le plus grand océan est le Pacifique dont la superficie est de 180 millions de km² ; quant à l’Océan indien, il est 3 fois plus petit. S’ajoutent de nombreuses mers dont la mer de Chine dont plusieurs îles défrayent l’actualité. Ainsi, l’année 2012 a été marquée par de multiples incidents entre la Chine et le Japon au sujet des îles Senkaku (nom japonais) ou Diayo (nom chinois). Pourtant, les relations commerciales entre ces deux pays sont importantes et, évidemment, la plupart des échanges de marchandises passent par la voie maritime. Depuis 1984, les échanges trans-pacifiques ont dépassé ceux qui concernent l’Atlantique. Les enjeux économiques de l’Asie sont en effet colossaux. Le principal continent émergent est devenu « l’usine du monde » ; une partie importante des biens consommés par les Occidentaux viennent d’Asie.
                Ainsi le contraste entre les tensions et les relations sino-japonaises nous amènent logiquement à nous interroger sur la compatibilité entre les intérêts économiques, politiques et géopolitiques des pays asiatiques liés à l’extension de leurs espaces maritimes et la logique mondialiste et libre-échangiste… mais au final les principaux problèmes ne pourraient-ils pas venir des pays asiatiques eux-mêmes ?
                La territorialisation est en effet un prolongement récent et positif pour une économie mondialisée (I), mais aussi sources de problèmes à la fois en Asie et dans le monde (II), d’où une forte incertitude pour l’avenir qui oblige à dépasser les risques tant à l’échelle régionale que mondiale (III).


***


                La territorialisation correspond surtout à trois logiques : commerciale, économique et juridique.
                La logique commerciale est ancienne. Dès le XIVè siècle, l’amiral chinois Zheng He a certainement passé le Cap en Afrique. Depuis le XVème siècle, l’européanisation du monde se caractérise par l’appropriation par les Portugais, puis les Hollandais et les Britanniques, de voies maritimes reliant l’Asie à l’Europe. Ces voies ont abouti à la création de comptoirs situés stratégiquement  afin de trouver les distances les plus courtes et donc gagner du temps. En Asie, l’ouverture du canal de Suez en 1869 va donner au détroit de Malacca une grande importance que les dirigeants de Singapour vont très bien exploiter. Cette appropriation implique une sécurisation des navires commerciaux par la création de ports qui permettent de protéger les navires de la piraterie, mais aussi d’approvisionner navires (en charbon hier, en carburant aujourd’hui) et marins.    Aujourd’hui, la principale route maritime est l’axe qui relie les ports pétroliers et gaziers du Golfe arabo-persique aux ports asiatiques dont le premier du monde, Shanghai. Cette route est marquée par deux lieux clés : au départ, le détroit d’Ormuz (géographiquement en Asie) voit passer les 2/3 du trafic d’hydrocarbures du monde tandis que le détroit de Malacca, plus de 200 navires dont beaucoup de porte-conteneurs venus des ports exportateurs chinois, japonais ou sud-coréens.
                Cet essor du commerce implique aussi l’essor de l’activité commerciale bordière, le long des littoraux. Le cabotage est en effet très ancien et permet d’éviter la saturation des axes autoroutiers ou ferroviaires terrestres. De même, la poldérisation permet un gain d’espace parfois important comme à Singapour qui a fortement augmenté sa superficie. Manquant de terrains disponibles, la construction de quais a été la clé du succès de ce micro-Etat parfaitement situé le long de la route maritime la plus fréquentée du monde, du Moyen-Orient à l’Asie de l’Est.
                A cette logique commerciale, s’ajoute une logique économique.
                En effet, de nombreux Etats au cœur de la mondialisation bordent cet axe : depuis la réussite du modèle japonais (marqué par une littoralisation des activités industrielles) et une extraversion de l’économie (essor des firmes exportatrices), la plupart des pays d’Asie de l’Est et maintenant de toute l’Asie ont développé des politiques économiques d’insertion à la mondialisation. De la Corée du Sud à l’Inde, de nombreux Etats asiatiques portent un intérêt majeur à la territorialisation car leurs façades maritimes concentrent une partie importante de leurs industries, de leurs métropoles et donc de leurs richesses. Assez littorale, la mégalopole japonaise regroupe plus de 100 millions d’habitants, soit les 80% de la population du pays. L’intérêt est aussi mondial : les consommateurs du monde entier, et Occidentaux en particulier, profitent beaucoup des produits asiatiques peu chers.
                Or, la logique de croissance industrielle et de consommation de masse a impliqué un épuisement des ressources terrestres, d’où la nécessité d’en rechercher de nouvelles en mers ; pour l’instant, il s’agit de deux types de produits : les hydrocarbures en off-shore et le poisson. Depuis quelques années, on assiste à l’essor de champs éoliens marins : les hydroliennes semblent vouées à un essor important. Plus tard, l’exploitation de nodules polymétalliques devrait être possible et rentable. Cette recherche de nouvelles ressources est particulièrement forte en Asie en raison des besoins énormes des puissances émergentes : la Chine, mais aussi les « nine eleven » comme l’Indonésie déjà peuplée de 250 millions d’habitants. La Chine importe aujourd’hui près de 40% de certains minerais vendus dans le monde. Il est donc logique que les Etats qui ont des littoraux souhaitent s’approprier les espaces maritimes tels que la mer de Chine méridionale, par exemple, qui possède des ressources pétrolières et halieutiques.
                C’est cette double logique (économique et commerciale) qui pousse à une logique juridique de souveraineté des Etats sur les espaces maritimes. La conférence de Montego Bay reconnait 5 espaces maritimes : les eaux intérieures et la mer territoriale, où l’autorité de l’Etat est totale ; la Z.E.E. (jusqu’à 200 milles) et son prolongement éventuel, le plateau continental (jusqu’à 400 milles) ; enfin la haute mer, dont les fonds sont gérés par une Autorité internationale, créée en 1994 et localisée à Kingston. La totalité des Z.E.E. recouvre le tiers de la surface des mers, mais en Asie, l’existence de plusieurs états insulaires (Indonésie, Philippines, Japon, Taïwan…) implique une forte présence étatique au sein des espaces maritimes, en particulier sur la façade pacifique. Au contraire, pour l’Inde, Etat-continent au littoral étendu, le nouveau droit international permet une formidable extension des espaces maritimes où elle peut exercer sa souveraineté ; en effet, à l’exception du Sri Lanka, rien de freine la délimitation d’une Z.E.E. maximale.
                Ainsi, la territorialisation est une émanation de la mondialisation. La conférence de Montego Bay est la conséquence d’une demande d’Etats qui sont en concurrence.
               
*

                En effet,  si la territorialisation représente un atout extraordinaire grâce aux ressources et aux enjeux commerciaux, parfois, comme en mer de Chine, cette concentration d’Etats et d’îles rend complexe le découpage des Z.E.E. et implique de nombreux litiges, d’où des différends, risques potentiels de conflits et ce d’autant plus que les Etats ayant les plus grandes superficies de Z.E.E. sont les Etats-Unis et la France. Leur possession d’îles leur permet de demander l’extension de leurs espaces maritimes.

                Lorsqu’un archipel comme les Spratley, se situe à égale distance de plusieurs Etats la situation est compliquée : la Chine, le Vietnam, la Malaisie, les Philippines et le Brunei revendiquent cet archipel !
                Les conflits éventuels sont d’autant plus plausibles que l’Asie est un continent où certains aspects de la Guerre froide y subsistent encore. Il s’agit pour l’essentiel de deux cas : d’une part, l’opposition des deux Corée et, d’autre part, Taïwan. La Corée du Nord reste en effet le dernier régime qualifié de stalinien : dirigé par Kim-Jon-Un, petit-fils du fondateur de la Corée communiste, le pays dispose de l’arme nucléaire qu’il menace fréquemment d’utiliser contre certains pays tels que le Japon. Ces dernières années, une île sud-coréenne, située sur une zone revendiquée par la Corée du Nord, a été l’objet de bombardements qui ont provoqué quelques morts. Si la question de Taïwan est moins meurtrière, elle n’en n’est pas moins conflictuelle : depuis la fuite des troupes de Jiang Jieshi en 1949 dans cette île, le Parti communiste chinois la considère comme faisant partie intégrante du territoire chinois. Or, le régime taïwanais est sous la protection de la marine étatsunienne. Les incidents sont donc fréquents : on dénombre trois crises de Taïwan dont la dernière dans les années 1990. Nous savons qu’un parti indépendantiste a été au pouvoir récemment et que le P.C.C. considérera toute proclamation d’indépendance comme « casus belli ».
                Les différents sont parfois plus anciens et liés aux rancoeurs nationalistes liés à l’époque de l’expansionnisme japonais (fin du XIXème siècle). C’est le cas de Taïwan qui a été pris par les Japonais à la Chine en 1895 ainsi que la Corée qui a été occupé un peu plus tard et surtout du territoire continental chinois qui a été occupé de manière violente comme lors du massacre de Nankin en 1937. Les « remords » de l’ancien Premier ministre Koizumi n’ont pas suffit, surtout en raison de sa visite au sanctuaire où résident les grands militaires japonais qui ont justifié ces offensives. Ainsi, ces animosités nationalistes débouchent fréquemment sur des crises. L’archipel des Senkaku-Diayo cristallisent le problème sino-japonais. Occupé par les Etats-Unis jusqu’en 1972, elles sont redevenues japonaises ensuite… mais elles appartenaient auparavant à la Chine qui, depuis peu, revendique la souveraineté. Lors du printemps 2014, le P.C.C. a proclamé de manière unilatérale le contrôle aérien au-dessus de ces îles riches en poissons et en hydrocarbures. Mais ici, l’enjeu est politique. Face à des mécontentements croissants liés aux inégalités croissantes, à la pollution ou à la pollution, le P.C.C. instrumentalise le sentiment anti-japonais des Chinois en se focalisant sur la revendication d’îles telles que les Senkaku… éternelle tactique politique populiste qui consiste à externaliser un problème interne. En 2012, des magasins japonais ont été saccagés et il semble aussi que les ventes des véhicules japonais aient moins progressé sur le marché chinois.
                L’inquiétude gagne aussi l’Asie du Sud où les populations et les élites indiennes ont le sentiment d’encerclement face au « collier de perles ». Du Cambodge à l’Iran, le P.C.C. développe en effet une série d’accords afin d’obtenir des facilités portuaires pour les navires civils et militaires chinois. L’objectif est de sécuriser la route des hydrocarbures, mais il illustrer l’essor des ambitions et donc du budget militaire chinois qui est désormais le second mondial, derrière les Etats-Unis.
                Tout cela est anxiogène pour les peuples et dirigeants dont certains, déjà alliés depuis la Guerre froide avec les Etats-Unis, réclament une aide supplémentaire de leur part. La politique dite du « pivot », c’est-à-dire de réorientation des forces militaires étatsuniennes de l’Europe (où la menace soviétique a disparu) vers l’Asie, est bien une réponse à l’offensive récente de la Chine qui semble vouloir devenir une grande puissance régionale asiatique. Ainsi, 8 des 10 premiers clients des ventes militaires étatsuniennes sont Asiatiques et le premier est la Corée du Sud. Les achats cumulés de celle-ci, de Singapour et du Japon atteignent 8 milliards de dollars ces dernières années. Par ailleurs, l’Inde a en projet d’avoir plusieurs porte-avions. L’Asie est donc clairement lancer dans une course aux armements. L’économiste de l’I.F.R.I., Françoise Nicolas compare cette situation d’une interdépendance économique et commerciale et d’alliances militaires de l’Asie actuelle à celle de l’Europe de 1913.
                La menace n’est pas seulement étatique ; elle peut aussi venir de populations pauvres qui cherchent un butin facile en profitant de la faible protection au sein des navires ainsi que de multitude d’îlots non peuplés où se cacher : c’est ainsi que le détroit de Malacca et les côtes somaliennes sont des hauts lieux de piraterie. Les pirates profitent aussi de la proximité d’eaux internationales où ils peuvent éviter les polices ou douanes nationales.
                Un dernier problème s’ajoute : il s’agit des risques environnementaux liés au modèle de croissance  de masse qui concentre hommes et activités sur les littoraux. La pollution des navires par dégazage de leurs soutes ou bien l’utilisation massive de sable pour construire des polders en sont deux exemples connus. Le continent plastique, évoqué par Jean-Christophe Victor dans son émission « le dessous des cartes » l’est un peu moins. La concentration de sacs poubelles et autres déchets plastiques s’accumulent dans une partie centrale de l’Océan Pacifique sur une distance de plusieurs centaines de km et une épaisseur de plusieurs mètres. Toute récupération de fines particules est très complexe.

*

                Cette situation est évidemment une catastrophe pour la faune et pose la question d’une gestion internationale de ces déchets situés en eaux internationales sans propriétaire étatique… Face à de tels problèmes et différents dont certains peuvent déboucher sur des conflits, la solution ne peut venir que d’une volonté des différents acteurs politiques asiatiques à se mettre d’accord, soit par la menace américaine, soit par une coopération régionale ou transrégionale.

                Seuls les Etats-Unis ont la capacité militaire de freiner l’expansionnisme militaire de la Chine. L’augmentation du nombre de soldats (comme à Singapour, par exemple) est bien une réponse militaire qui vise à persuader les autorités chinoises d’aller trop loin. La « green line » et surtout la « blue line », présentées par la revue Diplomatie, montrent de manière précise les velléités militaires chinoises qui entrent en totale opposition avec la réalité politique et militaire actuelle de l’Asie de l’Est. Ces lignes illustrent peut-être l’espoir du P.C.C d’un retrait militaire américain, signe d’un vide géopolitique qu’il serait prêt à combler. La perspective d’un arrêt de l’aide américaine à certaines îles du pacifique explique les investissements récents chinois qui visent à étendre l’influence de la chine au détriment des Etats-Unis. Mais, le voisin vietnamien, pourtant anti-américain de part son histoire, a donné une facilité portuaire à la marine étatsunienne.
                Cependant, l’usage de la menace s’accompagne souvent de celui de la diplomatie. Le P.C.C. demande une souveraineté maritime très étendue peut-être pour obtenir simplement la possession de Taïwan et l’acceptation par la communauté internationale de l’occupation du Tibet. La tactique d’une demande forte et menaçante pour obtenir le but recherché est connue et classique lors de toute négociation.  La « pax americana » de la fin du XXème siècle peut éventuellement être suivie par un G2 sino-étatsunien où Etats-Unis et Chine exercerait une autorité équilibrée sur le monde. Cependant, vu l’absence de toute action diplomatique chinoise à l’O.N.U. d’août à octobre 2012, cette hypothèse semble peu crédible. Mais la Chine a-t-elle intérêt à provoquer un conflit ? Selon le géographe français Thierry Sanjuan, la Chine est « contrainte à la puissance » et n’est donc pas prête à assumer un rôle international. L’armée chinoise ne semble pas encore au niveau de celle des Occidentaux. Est-elle aussi prête à affronter les pays adversaires qui s’équipent aussi. De même, l’Inde qui a déjà perdu un conflit face à ce pays est-elle à nouveau prête à une nouvelle guerre ?
                En effet, l’Asie est aussi un continent plein de coopérations : l’Association des Etats du Sud-Est Asiatique (A.S.E.A.N.), né en 1964 et qualifié aussi par Vincent Thébault, géographe toulousain, de « circuit intégré asiatique » illustre bien l’importance des flux inter-firmes et donc de l’intégration régionale croissante. Après l’Europe, l’Asie de l’Est et du Sud-Est est la seconde région du monde au niveau de ses échanges intra-régionaux : hommes (diaspora chinoise, indiennes…), capitaux, produits, idées circulent énormément. Par exemple, le sous-traitant taïwanais d’Apple, Foxconn, a la plupart de ses usines en Chine. Tout conflit remettrait en question son activité et la prospérité régionale… mais aussi mondiale (puisque les Ipod ou Ipad sont vendus dans le monde entier). L’interdépendance concerne aussi la Chine et les Etats-Unis. Toute chute de la consommation américaine (ou européenne) entraîne celle de la production industrielle de la Chine. Le Forum de l’A.P.E.C., réuni à Singapour en 2009, exprime bien cette idée dans sa déclaration finale : « Les membres de l’A.P.E.C. doivent forger un partenariat fondé sur l’intérêt commun de produire une croissance forte, équilibrée et durable ». De manière réaliste, la piraterie développée dans le détroit de Malacca a fortement baissé grâce à une coopération des polices de différents pays (Singapour, Malaisie, Japon). De même, la marine chinoise participe à la lutte contre la piraterie somalienne, en collaboration avec de nombreuses marines du monde entier, en particulier celle de l’Unio européenne (opération Atalante) et celle des Etats-Unis ou même du Japon !
                La coopération est aussi une solution à l’éventuelle saturation des routes maritimes asiatiques. Le trafic est en effet très intense : 200 navires par jour dans le détroit de Malacca, soit un toutes les 7 mn ! Le désenclavement actuel de l’Asie centrale permet la construction d’un vrai pont intercontinental qui relie l’Europe à l’Asie plus rapidement (7 jours pour des trains de la compagnie Deutsche Bahn). C’est peut-être la revanche de la vieille route de la soie. De même, le géographe canadien Frédéric Lasserre a montrée que le dégèlement des mers froides russes permettait d’envisager la perspective d’une nouvelle route commerciale qui passerait par le Nord ;  autant de possibilités maritimes qui obligent les différents gouvernements à discuter  et à élaborer des solutions négociées. Enfin, la relance récente de l’O.M.C., présidé par son nouveau directeur brésilien, Roberto Azevedo qui a œuvré pour un nouvel accord-cadre, laisse présager un certain espoir sur les perspectives pacifiques du XXIème siècle. L’interdépendance des grandes puissances est si forte qu’aucune n’a intérêt à déclencher des hostilités, signes d’arrêt des échanges ou d’embargo.


***


                Ainsi, la territorialisation des espaces maritimes, phénomène contemporain majeur est bien à la fois un atout et une source de risques. L’interdépendance croissante des économies asiatiques et mondiales rendent la perspective d’un conflit d’origine éventuellement maritime difficile, mais non impossible. Mais il est certain que l’essor des espaces maritimes est compatible et même une réponse à la mondialisation. Territorialisation et mondialisation sont intimement liées. La seule véritable incertitude concerne l’attitude de la Chine face à la politique de « pivot » des Etats-Unis qui restent la première puissance navale mondiale.

                Plus que jamais Si Walter Raleigh, navigateur anglais du XVIème siècle semble avoir raison « Qui tient la mer tient le commerce du monde ; qui tient le commerce tient la richesse ; qui tient la richesse tient le monde ». Ainsi, tout déclin américain important serait facteur de vide géopolitique en Asie et donc d’instabilité…


SUJET  2 = ASIE
La démocratie et la gouvernance mondiale sont-elles compatibles avec les valeurs et puissances asiatiques ?

Réflexion-problématiques :
Le sujet doit vous amener à relier/opposer 4 choses :
1 démocratie et gouvernance
2 Occ et Asie 
Le sujet est centré sur les valeurs et non sur les puissances dont le terme, situé à la fin, n'est pas essentiel. Il doit cpdt vous permettre des nuances entre les 3 puissances asiatiques.

Les différences fortes entre valeurs occidentales et valeurs asiatiques peuvent-elles s'atténuer et permettre une plus grande participation de l'Asie aux progrès de l'humanité et aux affaires du monde ?

Mots clés :
-valeurs occ : libertés, individu, souveraineté nationale, séparation des pvrs, internationalisme, communauté internationale, ingérence, système onusien
-valeurs asiatiques : autorité, groupe, asiatisme, non-ingérence
-démocratisation : processus lié au niveau d'instruction...
-gouvernance : à la fois pol (ONU) et éco (FMI)

Plan possible :
-plan chrono peut-être à éviter car trop classique, mais ici rappel hist nécessaire pour comprendre
-plan thématique   I/ De fortes divergences   A - Occ versus Asie : valeurs nat différentes
                                                                           B - Ingérence et internationalisme versus non-ingérence                                                          C - Pourquoi ? facteurs hist, inégal développement...
                                II L'Asie en marge de la gouvernance mondiale
                                                                             A - L'Asie est restée lgtps tournée vers elle-m^ap la colonisation (voies autocentrées co)             B - Dep 1990, l'Asie est un acteur mondial + éco que pol                                                                C - Différences entre 3 puiss : + Inde Japon Chine
                                III/ Une convergence semble possible
                                                                            A - Démocratisat° (Birmanie) et demande desEtats (Japon Inde au CS de l'ONU)                          B - Pourquoi ? essor classes moy, apport GB en Inde...                                                                 C - La vision et l'attitude de l'OCC doit changer : partager le pvr au FMI, compromis, ms rancoeurs des puiss asiatiques

Réponses aux problématiques : 
Si la réalité des divergences entre les valeurs occ et asiatiques est évidente, la convergence l'est aussi. L'évolution récente et accélérée des sociétés asiatiques (urbanisation, essor des classes moyennes, travail féminin) laisse espérer qu'à terme l'Asie va s'occidentaliser... Cpdt, l'attitude des Etats est souvent différente et montre bcp plus de nationalisme, facteur de tensions et de divergence avec l'Occ dt les valeurs universelles ont souvent signifié soumission et exploitation pour les Asiatiques. 
Ouverture :
Ainsi, entre divergence et convergence, nous avons plus d'incertitudes. Quoi qu'il en soit, un monde plus juste sera un monde où les Occidentaux partageront les reponsabilités pol mondiales avec les puissances émergentes, en particulier asiatique. Ce monde sera certainement multipolaire.

SUJET  1 = révision 1ère année

Les Etats-Unis et l'exercice de la puissance depuis 1914. (sujet ESCP Eur 2013, sauf volet historique)
L'Europe et l'exercice de la puissance depuis 1914.
L'Occident l'exercice de la puissance depuis 1914.

Réflexion-problématiques :
Le piège du sujet est de ne traiter que la puissance ; or, il s'agit surtout de s' interroger sur les raisons de l'usage fréquent de la puissance ou bien du non usage de la puissance. 
-usage fréquent des Européens dans la 1ère moitié du 20è s, 
-non-interventionnisme des Américains au même moment, puis 1945 interventionnisme.
Le 3ème sujet demande aussi de comparer l'exercice de la puissance de la part des Européens et des Américains. Pourquoi ce décalage dans le temps et une pratique militariste plus forte auj aux E.U. ?
Mots clés :
-fondements de la puissance : culturels, éco (intérêts éco)
-étapes de cet exercice : colonisation, GF, monde post-GF
-lieux clés de cet exercice = périphéries proches (Am centrale, Balkans) ou espaces stratégiques (Moyen-orient)
-outils de cet exercice : forces mili, ONU, OTAN avec 2 formes = multilatéralisme ou unilatérisme (Bush en Irak)

Plan possible :
-plan chrono peut-être à éviter car trop classique
-plan thématique   I/ ex qui privilégie le "hard power"
                                II ex qui privilégie le "soft power"
                                III/ un ex difficile et incertain
Ce plan est possible pour les 3 sujets. On peut inverser I et II pour les Etats-Unis 
Le III doit comporter des éléments prospectifs pour réflexion aux évolutions futures.

Réponses aux problématiques : 
L'exercice de la puissance ne reflète pas tout à fait la puissance, car les décideurs doivent prendre en compte l'avis des peuples, d'où, du côté européen - continent touché par des millions de morts lors des guerres mondiales - une plus forte réticence à exercer la puissance. C'est vrai aussi à l'échelon européen où les avis divergents empêchent une pol ext commune. Du côté am, le déclin éco et les pbs de dette mais aussi les réactions négatives liées à un trop fort interventionnisme impliquent de "revisiter la puissance" (B BADIE). O.ZAJEC parle d'"impuissance de la puissance"

Ouverture : un retrait des EU de la scène mondiale sera dangereux car il va tenter de nouveaux Etats à s'exercer à leurs puissances nouvelles. Auj, la Chine ne semble vouloir exercer sa puissance que dans sa région, l'Asie de l'Est, et demain ?

Ci-dessous, compte-rendu de jury du sujet sur les Etats-Unis


Les États-Unis et l’exercice de la puissance Le sujet a mis les États-Unis à l’honneur. La bibliographie sur ce pays est pléthorique et les copies ont témoigné dans l’ensemble de la connaissance de certains titres et d’auteurs importants à citer. Cependant, en ciblant le libellé sur l’exercice de la puissance et non sur la seule puissance, le sujet s’est révélé tout à fait discriminant. Il réunissait les exigences attendues par cette épreuve : des qualités de synthèse fortes de la part des candidats ; des connaissances variées et précises ; le sens de la nuance et de l’analyse de fond. Le sujet était de surcroît puissamment ancré dans l’actualité. 1 – COMMENTAIRES SUR LE SUJET PROPOSÉ Retour sur les termes utilisés : Le libellé était concis et ne présentait aucune ambiguïté terminologique. Le terme de puissance est en effet l’un des plus communément abordé durant les deux années de préparation au concours. Le jury attendait donc des développements conséquents et solides en la matière, mêlant analyse théorique, exemples précis et traduction spatiale. Fondamentalement, cette notion de puissance renvoie sur la scène internationale à l’idée d’influence, en l’occurrence l’emprise d’un pays (ici les États-Unis) et de son système sur les autres et leurs actions (au sens de H.J Morgenthau dans Politics among Nations publié en 1947), ou encore à la « capacité d’une unité politique d’imposer sa volonté aux autres entités » selon les termes de Raymond Aron (Paix et guerre entre les nations, 1962) qui a été souvent cité par les candidats. L’originalité du sujet et sa difficulté relative se trouvaient naturellement dans l’expression « exercice de la puissance » dans le cas précis des États-Unis. Celle-ci renvoie à la pratique concrète et multiforme de la puissance, sa mise en œuvre par les États-Unis. Il est évident que celle-ci s’analyse et se mesure non seulement pour elle-même à travers ses ressorts profonds, mais aussi à l’aune de la puissance des autres nations et acteurs internationaux. Cet exercice a connu sur le temps long des formes et des expressions différentes (l’action militaire, la diplomatie, l’économie, la culture, etc.), reflet des contextes historiques et géopolitiques mondiaux et régionaux (cas du fuseau américain, comme y invitait la carte jointe sur l’Amérique centrale). A cet égard, l’absence de date dans le libellé du sujet ne sous-entendait nullement que les candidats devaient se limiter au seul exercice actuel de la puissance. Bien au contraire, cet exercice invitait à une mise en perspective historique solide et comparative, dans le respect de l’esprit de cette épreuve qui mobilise histoire, géographie et géopolitique. 2 Compréhension du sujet : L’analyse de l’exercice de la puissance américaine devait permettre aux candidats de revisiter sous un autre angle la notion classique de puissance. Les critères de cette dernière pouvaient d’ailleurs être aisément développés à travers ses formes d’exercice, leurs ressorts profonds et leur finalité, en insistant bien sur le fait que la puissance des Etats-Unis est unique dans l’histoire du monde. A cet égard, il était pertinent de se demander si les critères classiques de la puissance (tels qu’ils ont pu être identifiés durant la guerre froide) et ses modalités d’expression étaient encore d’actualité, car cette notion a beaucoup évolué sur le temps long, au point de changer de nature. Les nouveaux critères de la puissance américaine devaient être développés à cette occasion et mis judicieusement en perspective avec le contexte international et ses changements. Parmi les formes traditionnelles de la puissance nées dans la logique de confrontation entre États (notamment celles liées au rôle de « gendarme du monde » endossé par les États-Unis après la Seconde Guerre mondiale), celles liées à l’expression de la puissance militaire (le hard power au sens de Joseph Nye), occupent naturellement une place de premier plan. La force militaire est en effet gage de sécurité et de survie pour les États-Unis. Ses effets sur les relations internationales ont été et restent sans équivalent. Celle-ci se combine étroitement avec l’approche territoriale de la notion de puissance, qui a été et demeure un critère majeur pour ce pays : l’immensité des ÉtatsUnis, son extraordinaire richesse en ressources de toutes natures, ses façades maritimes (océans Atlantique, Pacifique, Arctique) qui l’invitent à s’activer sur des théâtres géopolitiques mondiaux très différents, ses infrastructures très développées, sa démographie active, etc., aspects souvent oubliés par les candidats. Cependant, comme l’a rappelé le politologue Bertrand Badie, la mise hors-la-loi de la guerre en 1928 (Pacte Briand-Kellog), idée reprise en 1945 par la Charte des Nations-Unies, a remis en cause la légitimité de la guerre suite à l’affirmation du primat du droit sur la force. La superpuissance militaire américaine a pu même apparaître aux yeux de certains auteurs comme un handicap (cf. Naissance et déclin des grandes puissances de Paul Kennedy, publié en 1988) au regard des nouveaux impératifs économiques et géopolitiques de l’après-guerre froide, qui appelaient à de nouvelles modalités d’exercice de la puissance. Dans le contexte de mondialisation contemporain apparu au milieu des années 1980, la conquête des parts de marché à l’international est en effet devenue plus impérieuse que jamais, illustrant en cela l’affirmation du primat de l’économie sur la seule force armée (affirmation du concept de « guerre économique »). Après avoir été mesurée en effectifs et en équipements militaires, la puissance américaine s’est alors exprimée au travers de nouveaux indicateurs (PIB, R&D, IDE, NTIC, projection de ses firmes à l’international etc.), de nouveaux acteurs (firmes, lobbies, ONG, médias, etc.) et réseaux d’influence au sein des institutions internationales, mais aussi par le biais de l’irrépressible modèle culturel américain. Ces nouvelles formes d’exercice de la puissance susceptibles d’influencer les décisions des autres protagonistes par la persuasion relèvent du soft power, tel que défini par Joseph Nye (Le leadership américain : quand les règles du jeu changent, 1997). Les États-Unis ont su à cet égard remarquablement bien s’adapter à ces nouvelles et plus subtiles modalités d’exercice de la puissance, d’autant qu’elles étaient beaucoup mieux adaptées aux nouveaux enjeux géopolitiques dans un contexte de complexité croissante du monde (multipolarité), où le leadership n’est plus aussi naturel que par le passé. Les États-Unis ont su alors préserver les quatre principales composantes de leur puissance structurelle (au sens défini par Susan Strange dans The retreat of the state. The diffusion of power in the world economy, publié en 1996) dont les effets se renforcent mutuellement pour assurer le maintien de leur influence politique : sécurité (défense des intérêts vitaux des États-Unis), savoir, production (la domination économique au service de la croissance et des firmes transnationales), finance (via la suprématie du dollar, la place financière de Wall Street, l’aide internationale aux PVD en contrepartie implicite de soutiens diplomatiques, etc.). 3 Tout au long de l’analyse, il importait de montrer que cet exercice de la puissance répond à des doctrines géopolitiques puissamment ancrées dans la culture, la société et l’imaginaire américain (notions de « destinée manifeste », de « Nation indispensable », doctrine Monroe, etc.). Mais il y a eu aussi des interventions militaires plus ponctuelles, inscrites plus ou moins dans la même perspective, dont les plus importantes méritaient de figurer sur la carte. Ces actions de fond et plus ponctuelles ont généré une abondante littérature. Les copies devaient s’appuyer sur ce corpus, en veillant cependant à ne pas tomber dans le piège des citations fleuves se substituant à la pensée du candidat. Plusieurs problématiques étaient envisageables pour ce sujet. Il était par exemple possible de se demander si l’exercice de la puissance des États-Unis était fondamentalement animé par une volonté de domination sur le monde (faut-il y voir la marque de l’impérialisme ? cf. les travaux de Pierre Hassner sur la guerre froide). On pouvait aussi organiser sa problématique sur le diptyque impérialisme (quelle hégémonie ?) / Isolationnisme ; ou encore sur les limites de cet exercice de la puissance. Une problématique plus ambitieuse consistait à montrer comment les États-Unis ont su concilier ou non (selon les cas et les époques) leur statut de première puissance du monde (et même d’hyperpuissance pour reprendre le terme proposé par Hubert Védrine) avec les exigences de l’action collective prônée par les instances multilatérales. Cette problématique présente l’originalité d’aborder la notion de puissance à travers ses pratiques unilatérales et multilatérales (la puissance au service du « monde libre » durant la guerre froide, puis de la communauté internationale ensuite ; messianisme ; entretien d’une sphère d’influence ; etc.). Plusieurs questions pertinentes pouvaient être posées à cette occasion : les États-Unis sont-ils devenus plus multilatéraux que par le passé ? Leur multilatéralisme continue-t-il à s’exercer sélectivement ? En quoi le multilatéralisme peut-il se révéler plus efficace que l’unilatéralisme pour plaider la cause américaine ? Quelle que soit la problématique choisie, il convenait de montrer qu’au sein de l’exécutif américain les luttes d’influence étaient fortes pour imposer telle ou telle option de l’exercice de la puissance (par exemple l’usage de la peur pour justifier la course aux armements), mais aussi que cet exercice rencontrait de nombreuses limites et des contre-pouvoirs qui pouvaient en restreindre la portée. Il était important de montrer que cet exercice de la puissance américaine s’appuyait à géométrie variable sur des relais (rôle central de l’Europe par exemple durant de nombreuses décennies, élargi à certains pays d’Asie orientale et occidentale). Par ailleurs, les propos devaient mêler habilement sur le temps long doctrine générale à l’adresse du monde et approches régionales différenciées : l’exercice souvent impérialiste de la puissance en Amérique latine, comme au Chili, au Guatemala, etc. ; impérialisme « éclairé » en Europe (« l’empire par invitation » dont parlait Churchill notamment) ; interventionnisme économique et économique en Asie orientale ; etc. Sur le plan du contenu, il importait d’insister sur l’importance du dispositif militaire des ÉtatsUnis (450 bases dès 1950, dans 35 pays ; 1 million de J.I. dans le monde en 2013), la course à l’armement (rôle de la détention de l’arme nucléaire : bombe A jusqu’en août 1949, puis bombe H ; la « guerre des étoiles » lancée par Ronald Reagan ; les montants pharaoniques consacrés à l’achat d’armes et au déploiement de troupes dans des lieux stratégiques ; etc.). La longue pratique interventionniste de la première puissance militaire au monde devait aussi être rappelée (négociations, frappes aériennes, blocus, invasions), en distinguant les interventions effectuées dans des cadres officiels et sous mandats internationaux (Somalie, Yémen, etc.) des interventions unilatérales (difficiles à concevoir aujourd’hui). Cet exercice de la puissance s’appuie aussi sur des actions secrètes, plus sombres aussi, liées à l’espionnage (CIA), sur lesquelles l’opinion n’est que partiellement informée, ou l’est a posteriori (par exemple l’assassinat de Ben Laden). L’exercice de la puissance est aussi profondément diplomatique par le biais d’actions de fond et de long terme, donnant lieu par exemple à des traités d’alliance. L’aide américaine est par ailleurs 4 rarement désintéressée (par exemple vis-à-vis de l’Egypte et d’Israël, deux des pays les plus aidés par les États-Unis). Diplomatie et interventionnisme militaire s’appuient sur une doctrine qui a évolué au fil du temps. A cet égard, il était utile de rappeler quelques grands éléments de périodisation, sans pour autant tomber dans le plan chronologique : doctrine Monroe (1823, non interférence des Etats-Unis dans les affaires européennes ; opposition à l’interventionnisme de l’Europe en Amérique) ; usage de l’arme nucléaire à l’issue de la Seconde Guerre mondiale au Japon en 1945 ; politique du « Containment » (George Kennan, en 1947, à propos de la politique d’endiguement vis-à-vis de l’URSS et de ses volontés expansionnistes, qui est à la base de la doctrine Truman) ; « détente » (à partir de 1962, à propos des relations EU-URSS durant toute la période de guerre froide) ; aprèsguerre froide et disparition de l’ennemi soviétique (la question de l’arsenal militaire se pose en des termes nouveaux face à l’apparition de nouveaux risques et menaces) ; années 1990-2000 : disparition de la séparation entre la sécurité intérieure et la sécurité extérieure. L’économie est un autre vecteur de cet exercice de la puissance, mais cette dernière est écornée depuis plusieurs années suite à la montée en puissance de nouveaux concurrents (Chine et autres pays émergents notamment) : les États-Unis restent la première puissance du monde (un quart de la production mondiale), mais son économie est de plus en plus dépendante de l’extérieur en raison de son endettement ; son poids démographique et l’attrait de son immense marché de consommation demeurent des atouts majeurs, au même titre que les principaux canaux de sa puissance économique : monnaie (« le dollar est notre monnaie et c’est votre problème » : propos attribués à John Bowden Connally, alors secrétaire d’État au Trésor américain du président Nixon, à l’adresse d’une délégation européenne qui faisait part de ses inquiétudes quant aux fluctuations du dollar américain), industrie, suprématie technologique, R & D, brevets, modèles productifs, normes et standards, énergie (développement du gaz de schiste) ; etc. L’exercice du soft power, à travers sa capacité à séduire et à attirer méritait lui aussi de longs développements : culture et modèle U.S. (l’américan way of life), langue, médias (information, CNN, exportation de films et de produits audiovisuels, etc.), attractivité des grandes universités américaines ; bourses d’études pour les étudiants étrangers ; poids U .S. dans les débats idéologiques et économiques ; rôle des Think tanks ; capacité de préemption du débat ; grandes fondations et institutions ; etc. Cet exercice de la puissance est assorti de moyens diversifiés, notamment financiers, à la hauteur des ambitions de la première puissance mondiale. Cet exercice de la puissance a en effet un coût colossal ! Enfin, la question des limites de cet exercice de la puissance devait faire l’objet d’un traitement particulier, en exploitant par exemple l’idée de « l’impuissance de la puissance » : sur quoi cet exercice peut-il buter ? Ses échecs (Vietnam, Afghanistan, Irak notamment, ou sur son propre sol suite à l’attentat du 11 septembre 2001 qui a montré la vulnérabilité des États-Unis) ; ses interdits (droit international) ; ses dérapages et ses débordements controversés (quand les États-Unis vont trop loin : ingérences plus ou moins contrôlées au travers par exemple du cas de l’Amérique centrale et des républiques bananières ; plus récemment révélations d’Edward Snowden sur les programmes PRISM et XKeyscore de surveillances massives des communications en Europe) ; ses absences enfin (cas de l’étrange absence des États-Unis dans le débat sur le protocole de Kyoto). Le modèle américain peut être aussi rejeté (réactions suscitées par leur hégémonie ou leur propension à l’hégémonie) : rôle des ONG altermondialistes, image de la décadence, rejet des firmes transnationales (« sorcières » de l’économie), etc. La conclusion pouvait facilement s’établir sur l’évocation des perspectives de cet exercice de la puissance : la priorité affichée par les États-Unis pour le Pacifique au XXI° siècle ; la valorisation de nouvelles sources d’énergie (gaz de schiste notamment) permettant une indépendance relative, à l’origine d’une réindustrialisation providentielle et peut-être d’un détachement géopolitique vis-à- vis de certaines régions à risques ; avènement d’une hégémonie plus discrète ; etc. 5 2 - COMMENTAIRES SUR LE TRAITEMENT DU SUJET PAR LES CANDIDATS Le sujet n’invitait pas à un simple exposé de la seule notion de puissance (par exemple au travers d’un inventaire des critères de la puissance), comme cela a été hélas souvent observé. Un grand nombre de copies se sont alors enlisées dans l’énonciation de généralités sur « la place des ÉtatsUnis dans le monde et la mondialisation », pour ensuite axer leurs propos sur d’autres sujets convenus comme « l’hyperpuissance américaine », le « déclin de l’empire américain », ou encore « déclin et renaissance de la puissance américaine »…, thématiques certes passionnantes, mais hors sujet. Malgré la simplicité des termes retenus dans le libellé du sujet, beaucoup de copies ont encore manqué cette année d’une problématique clairement annoncée dès l’introduction, condamnant l’analyse à un bavardage autour de quelques généralités à tonalité journalistique et sans nuances. De surcroît, le jury a constaté encore cette année que les termes du sujet étaient trop peu définis avec précision dans plus de la moitié des cas. Beaucoup de copies manquaient de connaissances précises. Une grande variété de plans était possible. Cependant, les plans totalement chronologiques n’étaient pas les mieux adaptés à ce sujet, les plans analytiques se révélant plus efficaces pour cette épreuve. Néanmoins, la dimension chronologique se devait d’être exploitée dans la dissertation. Charge revenait aux candidats de proposer une périodisation pour montrer les points d’inflexion, les ruptures, avec alternance d’excès de puissance et de repli relatif, etc. Comme le libellé du sujet ne contenait aucune référence en matière de date, il ne sous-entendait pas d’être abordé sous sa seule dimension contemporaine. La carte d’interprétation (notée sur 5 points), rendue à partir d’un fond de carte muet centré sur les Etats-Unis, a souvent donné satisfaction. La carte pouvait par exemple aisément distinguer les aspects militaires et diplomatiques de cet exercice de la puissance : les membres de l’OTAN, une petite typologie des pays alliés ou proches des États-Unis, le dispositif militaire U. S. dans le monde (principales bases, les flottes permanentes, dispositif satellitaire, etc.), les lieux et dates des interventions emblématiques des États-Unis sur le temps long. Les aspects économiques de cet exercice de la puissance pouvaient aussi y apparaître de manière sélective. Certains candidats ont judicieusement fait apparaître sur leur carte les limites rencontrées par cet exercice de la puissance (par exemple les autres puissances montantes, les interventions ratées ou en demi-teintes, les pays officiellement hostiles aux États-Unis, etc.). Au final, l’épreuve 2013 fut un très bon millésime. 3 - RECOMMANDATIONS AUX CANDIDATS ET AUX PROFESSEURS Année après année, le rapport de cette épreuve insiste toujours sur les mêmes points, preuve que les recommandations ne sont pas faciles à faire passer auprès des candidats et que trop souvent ceux-ci ne mesurent pas leur importance. Toute copie est composée de points positifs et de points négatifs dont la balance globale permet d’établir la note finale. Mais certaines maladresses tirent irrémédiablement une dissertation vers le bas. Parmi les plus fréquentes, citons : l’absence de définitions et de discussion des termes du sujet ; l’absence de problématique claire annoncée dès le départ (ce qui amène les candidats à réciter et à plaquer des morceaux de cours à la manière d’un « copier-coller », qui auraient très bien pu s’appliquer à n’importe quel sujet) ; des propos journalistiques convenus et simplificateurs ; une approche trop contemporaine du sujet, sans mise en perspective historique, uniquement centrée sur la période actuelle et son actualité brûlante ; l’absence complète de références à des lectures, des auteurs, une orthographe approximative et des maladresses de style ; etc. Ajoutons encore l’absence de carte de synthèse (cas rare) ; une légende fleuve et non 6 classée ; l’absence de titre sur la carte ; ou encore des informations trop générales et passe-partout faisant remplissage. Rappelons quelques règles de base. Tout d’abord, l’introduction doit être soignée. La problématique choisie doit notamment y apparaître avec clarté. Celle-ci ne doit pas se ramener à la simple reprise du libellé (ce qui annonce d’emblée une copie sans relief). L’ajout de quelques questions judicieuses est vivement encouragé à condition de ne pas y répondre dès l’introduction, afin de ne pas déflorer le sujet. Enfin, le plan doit être annoncé clairement (ce qui suppose que le candidat s’y tienne tout au long de son développement). Surtout, l’introduction ne doit pas être trop longue afin d’éviter les redites inutiles par la suite. Chaque sujet se construit autour d’un plan qui lui est propre. Par paresse intellectuelle ou logique assurantielle, beaucoup de candidats plaquent sans discernement des morceaux de plans étudiés durant l’année ou appris par cœur lors de leur bachotage, souvent sans rapport direct avec le sujet posé. Ces plans passe-partout et formatés se contentent de généralités. Ils n’entrent pas dans le sujet posé, donnent l’impression de tourner autour et ne permettent guère à une copie de se singulariser. Il en résulte à leur lecture une impression de banalité et surtout d’inadéquation au sujet posé. Des thèmes importants sont généralement oubliés à cette occasion. Des paragraphes entiers sont aussi hors sujet. Trop de candidats se contentent simplement de réciter leur cours, si bien que les correcteurs sont souvent amenés à corriger dans un même lot des copies ternes qui répètent invariablement les mêmes exemples, s’organisent selon le même plan, ressassent les mêmes informations. Par ailleurs, trop de candidats ignorent l’actualité récente et n’y font nullement référence. L’entame de l’introduction est souvent un bon endroit pour glisser un élément d’actualité intéressant. Enfin, il convient de mettre en garde les candidats contre la multiplication disproportionnée de citations souvent passe-partout, qui présentent le fâcheux inconvénient de se substituer à l’analyse personnelle des candidats. Que faut-il penser des documents d’accompagnement ? Dans cette épreuve de concours, le sujet posé s’accompagne de différents documents en nombre limité : chronologie, tableaux, cartes, etc. Cependant, l’épreuve demeure fondamentalement une dissertation, avec sa carte à construire. Elle n’est certainement pas un commentaire de documents. Ces derniers, comme cela est bien précisé chaque année sous le libellé du sujet, ne sont là qu’en « accompagnement ». Ils complètent utilement le sujet posé, provoquent des associations d’idées, rappellent des thématiques à aborder, ou encore ouvrent des pistes à creuser. Ils rassurent aussi le candidat qui peut se faire une représentation plus claire de ce que l’on attend de lui. Mais attention, ces documents n’ont pas vocation à cerner le sujet dans sa totalité. Ils font l’objet d’un choix mûrement réfléchi par le concepteur de l’épreuve. Les candidats peuvent y glaner ici et là quelques informations utiles pour leur dissertation : un élément de chronologie, un chiffre, un fait, etc. En revanche, certains candidats en panne d’inspiration - voire « à sec » - y puisent volontiers toute leur argumentation, généralement dans une mauvaise paraphrase. Aussi sont-ils sanctionnés par les correcteurs. Rappelons que ces derniers valorisent dans leur notation tout ce qui vient enrichir une copie : choix pertinent des exemples et des échelles d’analyse ; chiffres connus et judicieusement restitués ; sans oublier l’actualité du moment qui a aussi sa place (mais avec parcimonie). Autrement dit, plus le candidat exploitera intelligemment sa culture générale, plus il saura se démarquer par l’originalité et la pertinence de sa démarche et plus il aura de chance de réussir sa copie. Bref, il est très fréquent de constater que les meilleurs candidats n’ont pas besoin de faire référence à ces documents d’accompagnement (même si ceux-ci ont été utiles à l’élaboration de leur pensée). En ce qui concerne la carte, rappelons que celle-ci est obligatoire (ce fait est rappelé sur le sujet de l’épreuve) et qu’elle doit comporter un titre, qui n’est pas forcément le libellé du sujet de la dissertation. Notée sur 5 points, elle ne doit pas être pensée comme une simple illustration, mais bien comme un document qui appuie la démonstration. Construite tout au long de l’épreuve (et non dans les minutes qui précèdent le rendu de la copie, comme cela se fait souvent !), elle aide le candidat 7 dans sa réflexion sur les implications spatiales du sujet, en lui évitant des oublis fâcheux, en lui inspirant des dynamiques spatiales pertinentes, des mises en relation fructueuses pour sa démonstration, etc. Elle invite naturellement à la diversification des exemples géographiques. Elle doit être citée à plusieurs reprises et à bon escient dans le corps du texte et surtout ne pas apparaître à la fin de la copie comme un exercice simplement obligatoire. Pour être efficace et faire gagner des points précieux (ceux qui font souvent la différence avec les copies moyennes !), la carte ne doit pas se ramener à un simple « exercice de coloriage ». Son élaboration demande du temps et une certaine pratique (l’investissement sérieux dans cet exercice durant les deux années de préparation se révèle payant). Une carte bien pensée annonce généralement une bonne dissertation. Inversement, les mauvaises copies sont presque toutes appuyées sur des cartes indigentes ou médiocres. Les candidats doivent bien comprendre que, plus encore que l’introduction, la carte est le premier contact visuel que le correcteur a avec la copie. C’est une raison de plus pour la soigner, ce qui ne signifie pas pour autant que l’on attend du candidat de faire montre de talents exceptionnels de dessinateur. Il faut néanmoins penser à apporter son petit matériel le jour du concours (crayons de couleurs variés, feutres fins en lieu et place de gros marqueurs, etc.), afin de ne pas la réaliser avec les seuls moyens du bord. Le choix des informations à cartographier, les dynamiques qui y sont représentées, la pertinence des figurés (ronds et flèches proportionnels à l’importance des phénomènes par exemple) ou encore l’ordonnancement de la légende sont décisifs. Les figurés traduisent tantôt des faits statiques, tantôt des dynamiques sur le temps long par le jeu sur l’épaisseur des traits, leurs couleurs, leur orientations, etc. Certains candidats maîtrisent très bien la connaissance de la sémiologie graphique au point par exemple de savoir enclaver des ronds proportionnels de couleurs différentes afin de montrer des évolutions sur le temps long Une bonne carte est le produit de choix judicieux et raisonnés, car tout ne peut être représenté. Par exemple, il est inutile d’y faire figurer tous les noms de pays. Certaines cartes sont littéralement surchargées et illisibles. La légende ne doit pas dépasser une page recto. En aucun cas elle ne doit se poursuivre sur le verso de la page de légende ! Elle doit être hiérarchisée et claire. Si beaucoup de cartes restent très moyennes et peu efficaces, en laissant notamment de grands vides (contrastant quelquefois avec des légendes fleuves !), certaines en revanche témoignent d’une très bonne maîtrise technique et d’un excellent niveau d’analyse. Surtout, la carte doit refléter étroitement le sujet proposé et ne pas donner l’impression d’être réutilisable pour un tout autre sujet, comme en témoigne par exemple l’absence très fréquente de titre... En appui à la carte, il est toujours possible d’intégrer dans le corps du texte de petits graphiques (courbes, histogrammes) ou croquis de mémoire. Cette possibilité très peu utilisée est souvent utile. Son usage est néanmoins rendu difficile par le temps imparti.