COLLES D'ACTU 2019 2020 : 14 sujets traités dont 3 sur l'Europe

Liste des sujets traités :
1-les enjeux du Cachemire
2-le Kazakhstan, pays émergent ?
3-Révolte à Hong-Kong, prémices d'une démocratisation en Chine ?
4-L'espace, reflet de l'émergence
5-La politique du PM éthiopien, dernier prix Nobel de la paix
6-L'enjeu migratoire au Rwanda
7-L'Afrique du Sud, puissance émergente ?
8-Bolivie, un tournant historique (fin de Morales)
9-Le Mexique d'AMLO entre enjeux locaux, nationaux et mondiaux
10-Chili, échec du modèle néolibéral et rentier ?
11-Les nouveaux enjeux de la santé
12-La montée de l'extrême-droite en Europe : une menace
13-Quelle place pour la France en Europe aujourd'hui ?
14-Vers une Europe plus verte ?

Colle n°1 (Marie Cuvelier, Léa Marrot et Esteban Taupiac) -sept 2019: 

Les enjeux du Cachemire aujourd’hui

            Un enjeu renouvelé récemment.
Le 5 août 2019, Narendra Modi, premier ministre indien a révoqué l’autonomie du Cachemire.Cette décision a ravivé des tensions déjà anciennes entre l’Inde, le Pakistan, les Cachmiris et même la Chine à propos de la tant convoitée souveraineté au Cachemire.
            Le Cachemire implique des enjeux anciens géopolitiques, des enjeux de politique interne ainsi que des enjeux économiques

Une géopolitique complexe : Pourquoi le Cachemire est-elle une région tant convoitées et sujette à autant de tensions depuis si longtemps ?

Une région zone de conflits depuis longtemps.
            La décision de 1947 du maharadja de Jammu-et-Cachemire de rallier l’Inde a provoqué le début des tensions entre le Pakistan et l’Inde. En effet, suite à cela, 3 guerres se sont succédées (1947-49, 1965 et 1971). La première a été la plus importante car elle a donné lieu a la mise en place par l’ONU d’une ligne d’armistice qui établit de fait un territoire à l’Ouest, l’Azad Cachemire et le Gilgit Balistan, d’appartenance pakistanaise et à l’Est un territoire de souveraineté indienne, le Jammu-et-Cachemire, mais qui garde une certaine autonomie grâce à l’article 350 de la constitution indienne. En 1962, la Chine entre en jeu en obtenant l’Asksai Chin au Nord du pays.

Un territoire qui soulève la question de la souveraineté territoriale.
            Pour le Pakistan et l’Inde, le Cachemire est un enjeu d’affirmation de puissance mais aussi d’appartenance ethnique. En effet, la détention de l’arme nucléaire depuis 1998 par les deux belligérants n’est donc pas un atout principal mais seulement un outil de dissuasion. De plus, la question du Cachemire implique pour le Pakistan de récupérer tous les territoires musulmans et pour l’Inde de récupérer l’intégralité du Cachemire, posant aussi la question de la rivalité avec la Chine. Cette dernière a donc un intérêt d’affirmation régionale et de contrôle de la puissance indienne. Le dernier acteur dans cette course à la souveraineté est le mouvement indépendantiste cachemiri. Ce mouvement, situé au Nord, se bat pour l’indépendance du Cachemire mais est aussi très proche du Pakistan.

L’essor de nouvelles menaces depuis les années 90.
            Depuis 1989, des cellules terroristes islamistes ont vu le jour. Basées au Pakistan, elles perpétuent régulièrement des attentats sur le sol indien comme à New Delhi en 2001, ou même au Cachemire côté indien. Ces cellules font parties du groupe JeM et les terroristes font souvent des déplacements entre le Pakistan, le Cachemire et l’Inde ce qui entretient les tensions. De plus, la militarisation du Cachemire et les tortures perpétrées sur les musulmans deviennent un réel problème dans le pays comme le montre la récente coupure de communications au Cachemire.

Des enjeux de politique interne

            Depuis le 5 août 2019, une partie de la société civile ainsi que tous les hommes politiques du Cachemire, en dehors des membres du BJP le parti nationaliste hindou au pouvoir, ont été arrêtés. Il s’agirait, pour le gouvernement d’éviter toute contestation au lendemain de l’abrogation soudaine de l’autonomie, et de couper les voies de financements pakistanais du séparatisme. Mais pour Shehla Rashid, cette répression inédite des civils ressemble à une forme de colonialisme. À l’instar du conflit israélo-palestinien, le conflit du Cachemire renvoie à des motivations qui dépassent la seule question territoriale. Composé à 60% de musulmans, le Cachemire est un champ de bataille identitaire. Si le Pakistan a pour objectif de regrouper tous les musulmans de l’ancien Raj britannique, pour l’Inde, au contraire, le Cachemire permet d’affirmer le socle multiculturel sur lequel elle s’efforce de bâtir son identité nationale. Mais la politique de l’Inde est contradictoire car Narendra Modi refuse au non-hindous leur caractère indien, et ce 5 août près de 2 millions de personnes de l’Etat d'Assam ont été privées de leur nationalité. Mais finalement, cet enjeu religieux n’est-il pas une instrumentalisation ? La question religieuse ne serait-elle pas, surtout une question d’affirmation de puissance ?
            A cela s’ajoute des enjeux idéologico-politiques. D’un côté, la mentalité militaire inculquée aux nouvelles recrues pakistanaises ainsi que l’éducation des jeunes sont construites sur l’opposition avec l’Inde. Cette opposition servant, également, à justifier un budget militaire traditionnellement élevé (3,6% de son PIB contre 2,1% pour l’Inde en 2018).
            De l’autre côté, l'accroissement du nationalisme hindou favorise l'émergence de voix demandant une position de plus en plus radicale sur la question pakistanaise. Certains y voient seulement la reconquête des territoires passés au Pakistan - « l’Inde intégrale » énoncé par Bharat. Ainsi, le gouvernement en place depuis 2014, formé sur la victoire du BJP, parti ouvertement nationaliste, est illustratif de cette tendance. Mais si les nationalistes indiens ont des positions très fortes sur la question pakistanaise, ils ne demeurent pas moins conscients du spectre nucléaire qui plane sur tout conflit entre les deux états et il est alors peu probable qu’ils rentrent en guerre.

                                    Les enjeux économiques du Cachemire

Quel rôle l’économie a-t-elle jouée dans l’annexion du Cachemire ?
            Tout d’abord le Cachemire est une terre remplie de richesses. Aussi appelé Himalaya suisse c’est un réel château d’eau de la région qui prend de la valeur du fait de l’épuisement des nappes phréatiques lié notamment à la croissance démographique des 2 pays. D’autant plus que le Pakistan, en stress hydrique, est particulièrement tributaire des rivières (dont l’Indus) qui trouvent leur source dans le Cachemire. Notons que l’eau revêt un intérêt vital pour l’industrie. La région est aussi riche par ses minerais avec par exemple des ressources prouvées de plus de 40 millions de grammes de rubis. Enfin, le Cachemire du fait de ses 4 millions d’habitants, 220 000 km carré de territoire et donc un terrain important à aménager ouvrant de nombreuses potentialités, attire la convoitise des pays rivaux.
Mais pourquoi avoir abolit le décret 370 de la Constitution le 5 Août 2019, quels sont les éléments déclencheurs ? Et plus particulièrement quelles en sont les déterminants économiques ?                                                                       Il faut en premier lieu prendre en compte la guerre économique qui oppose l’Inde au Pakistan depuis des décennies. Si le Pakistan était perçu comme la puissance dynamique de la région dans les années 1980, un bouleversement s’est opéré au cours du 21eme siècle propulsant l’Inde à la place de 6eme économie mondiale, en terme de PIB avec notamment 3000 milliards de $ de PIB contre 300 milliards pour le Pakistan. Ainsi l’Inde semble avoir gagné cette guerre économique et l’annexion du Cachemire semble se prolonger dans la continuité de cette domination. De plus une analyse de la récession indienne actuelle semble montrer que l’annexion du Cachemire apparaît comme un moyen de détourner le peuple des problèmes économiques du pays et il y aurait même un lien de causalité entre l’annexion de la région et la reprise économique de l’Inde selon J.Boillot, spécialiste de l’économie indienne.
Enfin avec la suppression de l’Article 370 qui protégeait le marché cachemiri du capitalisme prédateur car seul les habitants pouvaient posséder des terres ou entreprendre sur le territoire, la région représente désormais un marché nouveau pour les puissances environnantes et en particulier l’Inde.





           Sources
- Jean-Joseph Boillot, spécialiste de l’économie indienne, sur RFI dans Géopolitique le débat le 29 aout 2019
- Olivier Guillard, Inde: le Jammu-et-Cachemire entre deuil, colère et tentations de représailles, sur l’Iris, le 20 février 2019 https://www.iris-france.org/130875-inde-le-jammu-et-cachemire-entre-deuil-colere-et-tentation-de-represailles/
- Diplomatie GD N°48 L´état des conflits - décembre 2018 /janvier 2019
- Jean-Luc Racine, Le Cachemire : une géopolitique himalayenne, Hérodote 2002/4 n°107

BILAN (complément S.Boyer) :
"Enjeux au sommet" : voilà le titre d'un article de JC Victor dans son denier atlas consacré à l'Asie. A plus de 4000 m d'altitude, le Cachemire est, avec le conflit palestinien, un des conflits anciens qui perdure aujourd’hui. Au-delà de la mutliplicité des enjeux, il est spécifique en raison de la possession par les deux principaux belligérants de la bombe atomique ; cela en fait un lieu majeur de risque nucléaire. Il illustre également le rééquilibrage régional en faveur de la Chine qui considère le Pakistan comme un des axes clés des « nouvelles routes de la soie ». L’attitude récente de Modi qui, par l’annulation du statut ancien d’autonomie, rompt le statut quo, implique une prise de risque, un pari nationaliste qui permet à la population indienne un bilan économique assez décevant de son premier mandat. Jusqu’où ira-t-il ? De quelle manière cela va-t-il accélérer le terrorisme local et régional (voir carte de l'atlas de JC Victor qui montre les origines de certains djihadistes venus d'Afghanistan vers le Cachemire) ?
            
Colle n°2 ( -sept 2019: Inés MOUSSOUS Agathe ROBIN Ilona SIMEON sept 2019

Le Kazahstan, pays émergent ?


Introduction : 

L'essor de la capitale Noursoultan (anciennement nommée Astana prénom de l’ancien président ?) est remarquable. En effet, celle-ci affiche un paysage moderne digne d’une capitale américaine avec une architecture avant-gardiste où se côtoie gratte-ciel, monuments modernistes et espaces verts.  Le Kazakhstan est une république de trois millions de km² situé majoritairement au Nord de l'Asie centrale et en partie en Europe de l'Est (à l'ouest du fleuve Oural) et s'étend de la mer Caspienne à l'ouest aux montagnes de l'Altaï à sa frontière orientale avec la Chine et la Russie. , qui a acquis son indépendance en décembre 1991 (ancienne république de l’ex-URSS). Ce pays compte environ 19 millions habitants et affiche un PIB (produit intérieur brut) de 212 milliards de dollars en 2014 (classement mondial?). La notion de pays émergent est majeure, car elle désigne les pays à fort potentiel de croissance où il est bon d'investir. De plus, l'émergence n'est pas seulement économique, elle est politique, sociale et géopolitique : elle se traduit par une plus grande influence dans les relations internationales. 

Est-ce que le Kazakhstan peut faire partie des prochaines puissances mondiales régionales

I. Une incontestable réussite économique (Ines Moussous)

Le Kazakhstan est le premiers pays émergent d'Asie centrale. En effet ce pays a connu une croissance de son PIB de 10,6%/an en 2006, ce qui est assez remarquable pour un ancien pays de l'Union soviétique au régime communiste. Le pays est le plus avancé des États issus des anciennes républiques soviétiques en termes de mise en œuvre de réformes de marché.  L'économie du pays repose en très grande partie sur les énergies fossiles et non-renouvelables. Il est le premier producteur d'uranium au monde avec 33% de la production mondiale. De plus, il est le sixième pays exportateur de pétrole au monde et 65% de ses exportations sont issues de la production pétrolière. Il est également le dixième producteur et septième exportateur de charbon au monde. Le pays entre dans une logique de puissance, car celui-ci va diversifier son économie et va miser en particulier sur la technologie, car celle-ci est un élément de domination de la part des grandes puissances ces dernières années. Il va développer des projets alliant technologie et énergie renouvelable comme lors de l'Exposition internationale à Astana en 2017. Le Kazakhstan, mise sur la recherche et développement en matière d’ énergies du futur, de transition vers l’économie verte ainsi que de maîtrise d’une meilleure efficacité énergétique en cherchant à réduire de moitié du PIB national la part de la consommation énergétique fossile d’ ici 2050. Le pays attire également de nombreux investissements étrangers comme ceux des entreprises américaines. Noursoultan (ex Astana) joue un rôle très important dans cette croissance économique, car elle est le centre de développement économique du pays, avec de nombreux projets futuristes notamment sur les nouvelles technologies.  Le Kazakhstan est arrivé au terme de sa transition vers le modèle occidental d'économie de marché, il a abandonné l'ex-modèle économique soviétique et c'est tourné vers une économie plus libérale avec une adoption du modèle libre-échangiste. Cette réussite économique est possible par la politique économique forte de l'ancien président du Kazakhstan : Noursoultan  Nazarbaïev qui a annoncé sa volonté de faire croître son pays et de l'amener sur la scène internationale en proclamant le slogan « l'économie d'abord, la politique ensuite ! ». Cela à été possible grâce à sa stratégie de développement national « Kazakhstan 2050 ». 
   Le pays est donc en pleine insertion dans le processus de mondialisation et sa réussite économique a été possible grâce à une politique audacieuse et intelligente menée par le président Nazarbaïev.

II. Le Kazakhstan, un pivot diplomatique (Ilona Simeon)

   Le Président Nazarbaïev (au pouvoir de 1991 à 2019), a instauré une politique étrangère dont la réussite n’est plus à prouver. La ville d’Astana est devenue en l’espace d’une décennie la vitrine de l’ambition du pays et de son chef avec ses immenses gratte ciel. La capitale futuriste a accueilli en 2017 l’Exposition internationale et s’était portée candidate pour recevoir les Jeux Olympiques d’hiver de 2022, vaincue par la capitale chinoise Pékin à quatre voix près. Ces événements traduisent donc bien la volonté de Nazarbaïev de mettre en place un véritable soft power kazakhe.
   Mais, surtout, ce sont ses relations avec les autres puissances qui représentent un atout, car le pays, qui prône sa neutralité, a déjà engagé plusieurs partenariats avec la Chine, les Etats-Unis, ses voisins (lesquels?), ou encore l’Union Européenne ; cela est dû à son fort potentiel énergétique qui attire de nombreux investisseurs étrangers. En 2010, le Kazakhstan est même le premier Etat non-européen a occuper la présidence tournante de l’Organisation de la Sécurité et de la Coopération en Europe (OSCE).       
    Le Kazakhstan est par ailleurs un pivot majeur entre l’Europe et l’Asie. Le pays est fortement ancré dans le projet des nouvelles routes de la soie, annoncé par le président chinois Xi JinPing à Astana en 2013. Sa position de carrefour eurasiatique en est ainsi confirmée.
   En outre, le Président a plusieurs fois exprimé sa volonté de mettre en place une zone de libre-échange entre les pays d’Asie centrale de l’ancienne Union soviétique, l’«UNISTAN», afin d’être moins dépendant de ses exportations vers la Chine ou encore vers l’Europe ; mais aussi, parce que sa présence au sein de l’Organisation de Coopération de Shanghai ne lui semble pas suffisante pour mettre en valeur la région (sens à expliciter ?). La population kazakhe, ouverte au dialogue avec ses voisins et ses investisseurs, est sans aucun doute un atout supplémentaire pour la réussite diplomatique du pays.


III. Limites et contraintes (Agathe Robin) (titre non explicite)

Quelles sont ses fragilités et ses limites ? Quel avenir pour le Kazakhstan ?

Le Kazakhstan présente cependant quelques limites. Tout d’abord, il ne faut pas négliger son enclavement. Entre la Chine et la Russie, le Kazakhstan dépend des infrastructures de ses voisins pour pouvoir exporter son pétrole, qui représente tout de même 60% de son PIB en 2014. Le Kazakhstan a donc également besoin de diversifier son économie. Les cours du pétrole étant sujet à de nombreuses variations et étant une richesse non renouvelable, le pays devra un jour ou l’autre faire face à l’épuisement de cette ressource fossile si précieuse. Par ailleurs, il faut relever que l’extraction du pétrole en mer Caspienne est techniquement difficile et très coûteuse. 
Concernant les infrastructures, il faut également noter que le pays s’étend sur presque 3 millions de km2, soit cinq fois la superficie de la France et qu’il ne possède que très peu de routes pour connecter les différentes parties du pays. Les populations sont ainsi assignées à leur région, sans grande possibilité de se déplacer à travers le pays. 
En outre, le Chef d’Etat, Noursoultan Nazarbaïev, au pouvoir depuis 1990 (pas de démission en mars 2019 cf partie II ? maintien de son influence ? Nouveau président ?), installe un régime autoritaire, garantissant son poste de Chef d’Etat à vie et amenant petit à petit certains pouvoirs aux organes législatifs. On remarque que la capitale Astana porte désormais son nom et cette obsession pour l’économie au détriment des populations pourrait en agacer certains (vague?). Malgré la stabilité entre les différentes ethnies (des exemples?) qui peuplent le pays, le pouvoir devient de plus en plus autoritaire et la corruption se développe. 

Phrase de conclusion (rapide bilan) ?

Sources :
. François Guilbert, « Découvrir le Kazakhstan, un pays d’Asie centrale cinq fois plus étendu que la France »Diploweb (P.Verluise), 02/03/2018.
. Laurent Pinguet (dir.), Le Kazakhstan, un pays d’avenir ?, I.R.I.S (P.Boniface), Avril 2018.
. « Astana : vitrine du Kazakhstan », Le Dessous des Cartes (Jean Christophe VICTOR), Arte, 2018.
. Bilan économique du Monde, Collectif, Editions Le Monde, janvier 2019.


Colle n°3 ) -sept 2019: Youness ARIANI Thomas BALAVOINE et Thibault URSET oct 2019

HONG-KONG : une révolte qui annonce la démocratisation en Chine ?

I - Hong Kong : un statut particulier, un modèle démocratique ?
Hong Kong est une ancienne colonie britannique rétrocédée à la Chine en 1997. Depuis 1997, Hong-Kong est qualifié de « région administrative spéciale », se basant sur un concept nommé « un pays, 2 systèmes ». Ce concept octroie une indépendance relative vis-à-vis de la Chine, mis à part les questions de défense et de diplomatie. La dirigeante d’Hong Kong est aujourd’hui une femme, Carrie Lam, fidèle à la Chine, élue en 2017 par un conseil électoral, et non par un suffrage universel comme prévu dans la constitution de base.
Au niveau politique, Hong Kong possède un système politique multipartite, un conseil législatif et un chef de l’exécutif (chef du gouvernement). Le suffrage universel, réclamé depuis longtemps notamment lors du mouvement des parapluies en 2014, n’existe que pour les élections municipales. Le chef de l’exécutif est nommé par un collège électoral, apparenté à un parlement. Au niveau judiciaire et économique, Hong-Kong est libre de gérer son système de manière autonome. Ainsi, Hong Kong a conservé sa monnaie (dollar Hongkongais), son économie est dispensée de taxes, et la ville possède son propre système judiciaire, bien que la Chine (loi d’extradition) tente de s’y ingérer.
L’ingérence abusive de la Chine est un problème pour la démocratie hong-kongaise, profitant du fait que le poids économique de Hong Kong ait diminué. A titre d’exemple, la Chine a interdit le Parti National de Hong Kong (HKNP), un parti pro-démocrate. Par ailleurs, Carrie Lam est de plus en plus qualifiée de « marionnette de la Pékin », la Chine exerçant ce que Sang Pu appelle le « sharp power », c'est-à-dire le pouvoir de nuisance. Enfin, les inégalités sociales très importantes à Hong Kong sont révélatrices d’un territoire qui, malgré de nombreux atouts, est sujet à des problèmes importants.

II - Une remise en cause du statut démocratique
Depuis une dizaine d’années, Pékin s’immisce de plus en plus dans les affaires politiques de Hong-Kong, suscitant ainsi le mécontentement de la population à plusieurs reprises. En témoigne les nombreux mouvements de protestation que la ville a connu, durant lesquels les habitants ont réaffirmé leur attachement à l’autonomie. En 2014, le mouvement des parapluies s’opposait à ce que les candidats aux élections soient préalablement validés par une commission, craignant qu’il devienne un moyen d’éliminer l’opposition critique envers Pékin.
En 2019, de nouvelles manifestations ont lieu, cette fois contre le projet de loi pour l’extradition vers la Chine, qui menacerait l’Etat de droit à Hong-Kong. Malgré le retrait du projet, les manifestations se poursuivent, car au-delà de cette loi, c’est bien la remise en cause de l’autonomie de la ville qui est dénoncée. Le 1er octobre 2019, le contraste était ainsi saisissant entre les célébrations des 70 ans de la fondation de la République populaire et la violence des manifestations à Hong-Kong. Le virage conservateur entrepris par Xi Jinping, à l’opposé de l’esprit réformateur de Deng Xiaoping, pourrait expliquer ce changement de position de Pékin par rapport à 1997.
En réalité, l’ingérence croissante de Pékin révèle sa crainte d’une contagion du mouvement en Chine. Jean-Philippe Béja, sinologue, estime ainsi qu’un jeune shanghaïen pourrait bien considérer qu’il est en droit de revendiquer davantage de démocratie, à l’image des jeunes hongkongais. La Chine semble toutefois assouplir sa position, redoutant sans doute une dégradation de son image à la suite de ces événements. Xi Jinping a ainsi réaffirmé, à la veille des célébrations, que Pékin continuerait à respecter le principe de « 1 pays, 2 systèmes ».

Sources :
Essai de David Bartel, chercheur indépendant vivant à Hong Kong depuis 10 ans, publié le 16/06/19, « Comment pékin déconstruit patiemment le système électoral hongkongais ».  https://asialyst.com/fr/2019/06/16/hong-kong-comment-pekin-deconstruit-systeme-electoral-chine/

Article du journal Courrier International « pas de démocratie à Hong Kong sans démocratie en Chine », publié le 04/07/2019, par Deng Yuwen, spécialiste chinois commentant les affaires politiques.                                                                                         https://www.courrierinternational.com/article/point-de-vue-pas-de-democratie-hong-kong-sans-democratie-en-chine

Editorial du Monde, « Chine, un pays, deux commémorations », publié le 02/10/2019.

Article de l’Express (dépêche AFP), « Xi Jinping promet de respecter l’autonomie de Hong-Kong », article publié le 30/09/2019

Vidéo réalisée par le Monde (15/06/2019), avec l’intervention de Jean-Philippe Beja :



Colle n°4  -oct 2019: Baptiste CUBERTAFOND Camille RICHIR Baptiste PAUPY oct 2019

 L’Espace, reflet de l’émergencE

2019 est le 50ème anniversaire d’une date plutôt spéciale : celui du premier pas sur la Lune de l’Américain Neil Armstrong, le 21 juillet 1969. Lors de cette période, dans un contexte de Guerre froide, l’espace est un nouveau territoire aux enjeux géopolitiques cruciaux et un autre front d’une éventuelle bataille entre Américains et Soviétiques. Cependant, aujourd’hui, la conquête spatiale ne se cantonne plus aux Etats-Unis, à l’Europe ou à la Russie. En effet, plusieurs pays émergents, en pleine croissance économique, sont bien décidés à être présents dans l’espace comme le montre la première édition de la Global Conference on Space for Emerging Countries qui s’est tenue à Marrakech, en avril dernier. Quels intérêts l’espace représente-t-il pour ces pays émergents tels que la Chine ou l’Inde ?                                                                                  

 La conquête spatiale est d’abord un moyen d’affirmer sa puissance et de rayonner à l’international (I), mais permet également de développer de grands atouts économiques et technologiques (II). Elle permet par ailleurs aux pays émergents de rassembler leur population autour d’une fierté nationale, celle d’entrer dans le cercle prestigieux des puissances spatiales (III).


            La conquête spatiale est avant tout un moyen de rayonner à l’international. Certains exploits sont très médiatisés et prennent une allure de vrai spectacle à proposer au monde entier. La Chine a notamment su marquer les esprits avec l'atterrissage de sa sonde Chang’e 4 sur la face cachée de la Lune en janvier 2019, un exploit qui n’avait encore jamais été réalisé. Aller dans l’espace permet aussi de projeter sa puissance à l’international puisque mettre en orbite un satellite ou faire atterrir une sonde nécessite une certaine capacité économique et technique. En effet, le Brésil a interrompu en 2003 son programme de développement d’un lanceur spatial nommé VLS-1 (nécessaire à l’envoi de satellites ou modules spatiaux), après plusieurs incidents techniques qui ont rasé les installations et tué 21 techniciens : les pertes économiques sont près de 6.5 millions de dolars.
Depuis plusieurs années, la Lune est devenue un symbole, un cap nécessaire à franchir pour être considéré comme une puissance spatiale. Elle est au centre des ambitions de pays émergents, comme la Chine, qui désire à l’avenir implanter une base lunaire ou, comme l’Inde, qui a dernièrement essayé d’y envoyer un rover. Cette mission appelée “Chandrayaan 2” a échoué, car le contact avec son rover Vikram fut perdu lors de son alunissage, le 7 septembre dernier. Cependant l’ISRO (Indian Space Research Organisation) est capable de réaliser des exploits avec peu de moyens en comparaison avec son voisin chinois. L’Inde est par exemple la seule nation à avoir réussi une mission martienne du premier coup, le 5 novembre 2013.
La concurrence internationale est intense dans l’espace. En effet, l’exploit de l’Inde ravive la concurrence internationale, la Chine s’est avouée dépassée au sujet de la conquête de Mars : Ouyang Ziyuan, un des principaux responsables du programme lunaire chinois reconnait que l’évènement est perçu comme un échec, par rapport aux écarts technologiques entre les deux pays. Pays émergents se donnent tous les moyens pour dépasser leurs concurrents, comme le démontre la course à la Lune entre les pays émergents : en 2007 et 2008, la Chine et l’Inde ont envoyé leur satellite respectif (Chang’e 1 et Chandrayaan 1) pour effectuer leur première mise en orbite lunaire.
La conquête spatiale semble alors être un moyen efficace pour s’affirmer sur la scène internationale et concurrencer ses rivaux.

Outre les ambitions géopolitiques, l’espace est un atout économique et technologique. Dans ce domaine, de nombreux emplois voient le jour depuis quelques années. 200 000 personnes travailleraient dans le secteur du spatial en Chine, un nombre comparable à celui des Etats-Unis. La volonté innovatrice de l’industrie spatiale ou encore l’avancée technologique que ces innovations procurent sont bien synonymes de développement économique. La Chine développe notamment des champions nationaux dans le secteur spatial comme OneSpace (en directe concurrence avec l’entreprise américaine SpaceX).
De plus, la mise en orbite de satellites entraîne un essor des communications. Il en découle évidemment une augmentation des échanges et donc de l’intégration dans le marché économique mondial.
Par exemple, l’ISRO propose des tarifs défiant toutes concurrences, pour une qualité presque équivalente, grâce à une main d'œuvre peu coûteuse.
De nos jours, les pays aspirant à dominer économiquement visent à se positionner à la frontière technologique, et donc à être des pays innovateurs dans les secteurs primordiaux et d’avenir tels que le spatial ou l’Intelligence Artificielle. Ces derniers sont d’ailleurs interconnectés puisque l’IA aide, par l’apprentissage automatique, à passer au crible les données disponibles plus facilement que les humains, augmentant ainsi les chances de trouver des planètes. Pour émerger économiquement, il importe donc d’investir dans le spatial.

            Les accomplissements de projets spatiaux sont de véritables prouesses compte tenu du temps et de l’argent investis et de la forte probabilité d’échec. C’est pourquoi, les pays émergents sont fiers de leur conquête progressive de l’espace : le 22 juillet 2019 l’Inde a lancé Chandrayaan-2. Le pays a ainsi pu fièrement intégrer le prestigieux club fermé des Etats ayant tenté d’atterrir sur la Lune aux côtés de la Chine, des Etats-Unis, de la Russie et d’Israël (échec).
La Chine a également de quoi être fière : elle dispose d’une station spatiale nommée Tiangong-2, ce qui n’est pas le cas pour la grande majorité des autres pays. La Chine fait preuve donc d’indépendance vis-à-vis de la NASA, principal constructeur de l’ISS (International Space Station). Le drapeau chinois figurant sur le fuselage de la station est un symbole explicite de la fierté chinoise, tant du gouvernement que de la population, d’avoir pu mener à bien ce projet pharaonique. En outre, l’entreprise BeiDou projette d’envoyer des satellites afin d’établir un système de navigation comparable au GPS ou à Galileo pour permettre à la Chine de ne plus dépendre des systèmes occidentaux.
Par la médiatisation des réussites spatiales, les gouvernements auteurs des prouesses montrent aux populations que leur pays gagne en puissance et est en plein rattrapage des pays développés. Ce faisant, les habitants deviennent fiers de leur pays et des leurs astronautes et oublient pendant un temps les tensions internes à l’Etat.

            In fine, l’espace constitue un moyen de s’affirmer face aux autres Etats. Nouvel outil du soft et hard power des pays émergents, il devient un secteur clef, un sujet de discussion et est de plus en plus instrumentalisé. L’espace apparaît alors comme un enjeu stratégique pour l’affirmation des pays émergents. Mais la conquête spatiale possède un écho culturel notamment via le film de science-fiction du réalisateur chinois Frant Gwo The Wandering Earth dans lequel la Chine sauve une humanité au bord de l’extinction grâce à des missions spatiales à hauts risques. Sorti en février 2019, il s’agit du premier film de SF chinois à succès illustrant la montée fulgurante de la Chine et de ses ambitions spatiales.


SOURCES

. Olivier Guilliard, « L’Inde à la conquête de l’espace », Iris, avril, 2019,

. « La première édition de la Global Conference on Space for Emerging Countries, à Marrakech, en avril 2019 », https://www.youtube.com/watch?v=xhzeYAzwRXU 

. Syrielle Mejia, « Pourquoi vouloir à nouveau marcher sur la Lune ? », www.lemonde.fr, 18 juillet 2019, https://www.lemonde.fr/sciences/video/2019/07/18/pourquoi-vouloir-a-nouveau-marcher-sur-la-lune_5490908_1650684.html
Vidéo brève qui met en avant les nouveaux enjeux de la course à la Lune.


. Rémy Decourt, « La Chine réagit à l’arrivée de l’Inde autour de Mars », www.futura-sciences.com, septembre 2014. https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/exploration-martienne-chine-reagit-arrivee-inde-autour-mars-55414/
Article décrivant la réaction de la Chine face aux exploits martiens de l’Inde, vexée d’avoir été dépassée par son rival en matière de conquête martienne.

. « Chandrayaan-2 : Succès de l’insertion en orbite lunaire », agences-spatiales.fr, août 2019, https://www.agences-spatiales.fr/chandrayaan-2-la-mission-lunaire-de-linde/
Article sur la sonde Chandrayaan-2 sur avec des informations tirées du communiqué de l’ISRO.



Colle n°5 (Mathilde FRANCES Charlotte SALLE Kenza AIT MOUSSA -oct 2019: 

La politique du Premier ministre éthiopien
en attente



Colle n°6  2019:  
l'Afrique du Sud, puissance émergente ?

Avec ¼ du PIB africain, 57 millions d’habitants, l’Afrique du Sud, unique pays africain membre des BRICS et du G20, est la 2e économie du continent derrière le Nigeria et devant l’Égypte. Toutefois, en termes de richesses par habitant, l’Afrique du Sud se situe bien devant ces deux pays. La victoire de la Coupe du monde de rugby met en lumière cette nation dont l’unité et le dynamisme posent question. Peut-on toutefois parler d’une puissance en crise ?


Une société fracturée et violente ?

L’Afrique du Sud est un des pays les plus inégaux du monde. En effet, des inégalités économiques touchent le pays : le nombre de personnes vivant sous le seuil d’extrême pauvreté a doublé en seulement 10 ans. De plus, bien que l’apartheid soit terminé, les traces de cette période historique restent ancrées dans la société sud-africaine : 42% des noirs sont au chômage contre seulement 12% des blancs. En réalité, certaines écoles pratiquent encore la ségrégation raciale, (école privée de Schweizer-Reneke). Les inégalités foncières sont aussi essentielles : les ¾ des terres appartiennent aux riches blancs, ce qui provoque des tensions où de nombreux fermiers blancs sont assassinés par des paysans noirs sans terre.
S’ajoute à ces inégalités importantes, une violence sans précédent. Tout d’abord, 40 000 femmes sont tuées par an, le taux de féminicide est ainsi cinq fois plus important que la moyenne mondiale, ce qui explique que des centaines de femmes se sont regroupées devant le JSE pour réclamer une taxe de 2% sur tous les profits, afin de financer un fonds destiné à lutter contre cette violence. De plus, le taux de criminalité s’élève à 20 000 meurtres par an. Malgré la présence de 200 000 policiers et 400 000 militaires, les forces de l’ordre, mal payées et mal formées, laissent de nombreux magasins se faire vandaliser. Aussi, des violences xénophobes se sont installées dans le pays. Les politiques à l’attitude populiste font en fait croire que les migrants sont à l’origine du chômage et de la pauvreté alors même que ces migrants ont jadis aidé le pays à lutter contre l’apartheid. En effet, en septembre 2019, un nouvel épisode de violences xénophobes a frappé le pays, faisant une dizaine de morts. Ces violences effraient les migrants notamment nigérians dont 600 ont été rapatriés en 2019, mais aussi ceux originaires du Mozambique, de la Zambie et de la Namibie. Ainsi, chaque année, 300 migrants sont tués par les noirs sud-africains qui vivent dans la pauvreté. Cette crise sociale est de plus encouragée par les réseaux sociaux où de nombreux messages d’alertes alimentent une haine contre les étrangers.
Toutefois, la société sud-africaine tente de trouver une certaine unité. En 2010, elle organise la Coupe du monde de football et, en 2019, gagne la Coupe du monde de Rugby, ce qui permet de montrer une Afrique du Sud plus unie par le sport. De plus, pour lutter contre les féminicides, le mouvement #AmINext a été lancé sur les réseaux sociaux, qui permet à la manière du mouvement MeToo, d’unir les sud-africaines.


Une économie à bout de souffle ?

                Depuis la crise mondiale de 2008, l’Afrique du Sud est entrée en récession (2 trimestres consécutifs de baisse du PIB) qui a mené le pays à une crise économique majeure avec une baisse de la croissance de 3 à 0,8 % en 10 ans. La dette publique a doublé depuis 2008 : elle s’élève en 2018 à 60 % du PIB et le pays, autrefois attractif pour les FTN occidentales, a chuté de 48 places au classement Doing Business sur cette même période et se trouve aujourd’hui à la 82ème place sur 190 pays.
Cette crise est due en partie à la dépendance du pays aux exportations et au secteur minier (7 % du PIB avec des entreprises mondiales comme De Beers). En effet, son économie est largement ouverte grâce notamment à ses ports de conteneurs comme celui du Durban. L’essoufflement de l’économie sud-africaine est aussi la conséquence d’une faible performance du secteur agricole qui a diminué de 11 % après une sécheresse majeure dans certaines parties du Cap-Occidental au début 2019. De plus, le pays a des difficultés à sortir de cette crise économique à cause de son taux de chômage de 30% : les habitants ont un faible pouvoir d’achat ne permettant pas de dynamiser l’économie intérieure ; pas plus que les IDE qui ont diminué de 12 % en 2016 même si une hausse est notable depuis quelques mois.
                En réaction aux problèmes économiques, le président Cyril Ramaphosa (élu en février 2018) a mis en place des mesures pour redynamiser les investissements et lutter contre la corruption omniprésente. Il continue également de développer une redistribution agraire pour diminuer le chômage et les inégalités. Les résultats ne sont pas encore flagrants mais le pays reste toutefois une économie émergente avec de nombreux atouts : économie la plus moderne et diversifiée d’Afrique, secteur des services puissant (21 % du PIB), richesses en ressources naturelles (1ere réserve de fer mondiale), 1er exportateur mondial d’orange. Enfin, les entreprises peuvent également compter sur la qualité des infrastructures avec un réseau de transport développé.
                Ainsi, même si l’économie sud-africaine est en déclin depuis 2008, la « nation arc-en ciel » reste une puissance économique émergente.


Des problèmes environnementaux et énergétiques insurmontables ?

L’Afrique du Sud est le plus gros pollueur du continent africain.

Le secteur énergétique en Afrique du Sud est un monopole public, la société Eskom fournit 95% de l’électricité du pays. Cependant, Eskom est en pleine crise : une dette de 30 milliards de $, une direction absente depuis juillet 2019, des méga-projets ruineux et un sureffectif (50 000 employés). Son problème majeur est de fournir un courant en mode alternatif ce qui empoisonne le quotidien de la population et fragilise l’économie du pays. De plus, les infrastructures des centrales sont vétustes et les entreprises énergétiques demandent plus de délais afin de se mettre aux normes environnementales et donc continuent de dépasser très largement les limites d’émissions de nitrogène et de carbone.
Par ailleurs, le pays suit une politique du « tout charbon ». Près de 90% de la production électrique du pays repose sur le charbon (énergie fossile). La province de Mpumalanga concentre 22 mines et 12 centrales à charbon. C’est selon certains classements le 2ème lieu le plus pollué du monde et, ainsi, des milliers de personnes y meurent chaque année. De plus, la société civile se réveille, demandant au gouvernement de déclarer l’urgence climatique. En effet, les sécheresses sont récurrentes et de plus en plus persistantes. Cela entraîne alors une crise de l’eau et dans les grandes villes comme Le Cap (2ème ville du pays), les autorités restreignent les quantités d’eau par habitants à 50 litres/jour afin d’éviter d’arriver au « jour zéro » (plus d’eau dans les robinets).
Cependant, sur le plan écologique le gouvernement pratique un double discours. Lors des conférences climatiques, il est très actif mais dans les faits il n’applique pas les consignes. Ainsi, bien qu’il soit engagé dans les Accords de Paris signés en 2015, il ne sera pas en mesure de respecter les objectifs fixés. Depuis le 1er juin, une taxe carbone a été appliquée aux entreprises sud-africaines à hauteur de 8€ par tonne de CO2 émise, mais elle se révèle être peu efficace. En ce qui concerne Eskom, l’enjeu est de taille puisque sa dette représente 15% de la dette publique, pour cela le gouvernement compte créer 3 filiales (production, transport, distribution) afin de gagner en productivité. Le pays est le seul du continent à posséder une centrale nucléaire (Koeberg), cependant le programme nucléaire a été arrêté, ce qui signifie que le pays n’est pas dans la voie de la diversification énergétique.

Bilan :

Ainsi, l’Afrique du Sud, pays au passé douloureux, possède de nombreuses ressources minières ainsi qu’un poids économique non négligeable. Cependant, réduite à être la 2ème puissance africaine, son influence géopolitique s’affaiblit progressivement face à la montée d’autres puissances émergentes comme l’Ethiopie, avec qui elle se retrouve en concurrence. Toutefois, on observe une réelle volonté de l’Afrique du Sud de continuer à peser au niveau continental par sa future présidence de l’Union africaine à partir de janvier 2020, ce qui serait l’occasion de revenir à l’époque de Nelson Mandela, où le climat était en réalité plus apaisé qu’aujourd’hui.


Sources :
Crise environnementale et énergétique :
Noé Hochet-Bodin En Afrique du Sud, le charbon à perte de vue, à perte de poumon. RFI Afrique, septembre 2019. http://www.rfi.fr/afrique/20190922-afrique-sud-charbon-pollution

Extinction Rebellion contre le «tout charbon» en Afrique du Sud. RFI Afrique, octobre 2019. http://www.rfi.fr/afrique/20191012-extinction-rebellion-afrique-sud

Afrique du Sud - Crise de l'eau : Le Cap échappe de peu à la catastrophe. Le Point, juin 2018. https://www.lepoint.fr/afrique/afrique-du-sud-crise-de-l-eau-le-cap-echappe-de-peu-a-la-catastrophe-14-06-2018-2227114_3826.php

Afrique du Sud: le gouvernement dévoile son plan de sauvetage d’Eskom. RFI Afrique, octobre 2019. http://www.rfi.fr/afrique/20191029-afrique-sud-gouvernement-sauvetage-eskom

Crise sociale :
Marième Soumaré, Violences xénophobes en Afrique du sud, Revue Jeune Afrique, septembre 2019. https://www.jeuneafrique.com/827670/politique/violences-xenophobes-en-afrique-du-sud-pour-lua-cest-une-crise-securitaire-a-lechelle-du-continent/

Laurent Ribadeau Dumas, les autorités sudafricaines impuissantes face aux violences xénophobes, France Tv Info, septembre 2019. https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/economie-africaine/afrique-du-sud-pourquoi-les-autorites-semblent-elles-impuissantes-face-aux-violences-xenophobes_3612551.html

Claire Bargelès, #AmINext, hashtag contre les violences faites aux femmes, RFI Afrique, septembre 2019. http://www.rfi.fr/afrique/20190916-afrique-sud-aminext-hashtag-violence-femmes (montre l’importance des réseaux sociaux)

Crise économique :

L'Afrique du Sud : Faire avec une économie à bout de souffle par Marlène Panara paru dans Le Point le 13/03/2019 (modifié le 09/05/2019). https://www.lepoint.fr/afrique/l-economie-sud-africaine-a-bout-de-souffle-13-03-2019-2300774_3826.php  

Présentation de l'Afrique du Sud du site France Diplomatie (Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères), mis à jour le 11/07/2019. 


Colle n°8
La fin de Morales en Bolivie, un tournant historique ?

La Bolivie, un tournant historique ?


            La Bolivie est le seul pays d’Amérique du Sud enclavé et compte plus de 11 millions d’habitants. Suite aux luttes pour l’indépendance menées par Simon Bolivar, la Bolivie se voit dotée du statut de république démocratique et est divisée en 9 départements pour respecter la pluriculturalité de la population. Suite à la démission imprévue du président Evo Morales, le pays est plongé dans une crise sociale et politique dont l’issue reste incertaine. 

I / Un président poussé à la démission malgré un bilan positif
                        Le bilan de la présidence d’Evo Morales est globalement positif dans la majorité des domaines. D’un point de vue économique, plusieurs avancées majeures ont eu lieu. Le PIB a été multiplié par trois durant ses mandat de 2006 à 2019 et a atteint un record de croissance de 6,5% en 2013. L’économie se concentre sur un modèle exportateur, notamment grâce au lithium dont elle possède 40% des réserves mondiales dans la région du salar d’Uyuni. Dans le domaine social, la pauvreté a baissé de 65 à 30% (ce qui reste élevé) et le chômage est passé de 7,5% à 3,3% de la population. Les inégalités ont été aussi fortement réduites comme en témoigne l’indice de Gini tombé à 0,44. De forts progrès sont à noter en terme d’analphabétisme grâce, notamment au programme « Yo si puedo » (je le peux) qui enseigne l’espagnol aux enfants. D’un point de vue politique, Evo Morales apporte une certaine stabilité en effectuant 3 mandats entre 2006 et 2010, 2010 et 2014 puis jusqu’à 2019. Cependant, lorsqu’en 2017 il instaure un référendum demandant à la population bolivienne s’il peut se représenter aux élections de 2019, la population est contre à 51% Cependant, il se présente tout de même et est élu le 20 octobre 2019. Accusé de fraudes électorales et suite à des manifestations dans les rues de la Paz et à la perte de soutien de l’armée, Evo Morales est contraint de démissionner le 10 novembre.
II - Des opposants et un pays divisé

            La Bolivie s'est construite sur un fond historique instable soumise à l'alternance des régimes démocratiques et dictatoriaux entre 1965 et 1981. La démocratie s’installe ensuite durablement en Bolivie et les présidents qui se succèdent libéralisent l’économie nationale. En 2006 pourtant, dans un contexte de vide politique provoqué par le départ du Président Sanchez, après les guerres de l'eau et du gaz (entreprises privatisées par le président libéral du MNR), l'élection d'Evo Morales permet à la Bolivie de retrouver une certaine stabilité politique et sociale. Cependant, le débat politique bolivien est divisé en deux parties autour de la politique de Morales et de la répartition des richesses. Premièrement, les indigènes, sur lesquels s'appuie Evo Morales de part ses origines personnelles de cocalero (producteurs de feuille de coca qui ont des effet semblables à ceux d’une drogue douce), ont été protégés durant son second mandat par des mesures sur les cultures de feuilles de coca. Mais dans un second temps, le président bolivien délaisse peu à peu son électorat indigène pour développer l'industrie et favoriser les intérêts industriels. Parallèlement, une opposition de droite, voire d'extrême droite,  se structure dans les régions les plus riches comme celle de Santa Cruz à l'Est. Ces élites, issues majoritairement des succès de la rente pétrolière de la YPFB (Yacimientos Petrolíferos Fiscales Bolivianos), souhaitent s'accaparer des richesses boliviennes. A l'initiative du processus de destitution de Morales en novembre, on trouve notamment Luis Camacho et le Mouvement National Révolutionnaire (parti nationaliste et populiste de droite).


 
Parti arrivé en tête par département, Wikipédia, article Élections générales boliviennes de 2009.
La carte ci-contre présente le résultat du second mandat de Morales, les régions en bleu ont majoritairement élu Morales et concentrent la majorité des industries boliviennes




III - Une situation tendue sur fond de contre-révolution?

Malgré que la population ait exprimé la volonté, via un référendum, qu’ Evo Morales ne se représente pas pour un 4e mandat, il se fait réélire le 20 octobre 2019. Accusé d’avoir truqué les scrutins, les manifestations contre Morales redoublent de vigueur (3 morts, 200 blessés). On observe alors des mutineries de la part de la police et l’arrêt du soutien de l’armée à Morales. Il est alors obligé de démissionner le 10 novembre 2019. Lors de l’annonce de sa démission, il dénonce un coup d’État de la part de l’opposition et de l’armée. Rapidement ses alliés cubain (Diaz-Canel), nicaraguayen (Ortega) et vénézuélien (Maduro) le soutiennent, le président argentin Fernandez, l’ex-président brésilien Lula, le gouvernement espagnol social-démocrate de Sanchez ainsi que le Kremlin de Poutine reconnaissent le coup d’Etat. Le Mexique lui offre alors l’asile. Le 12 novembre, Jeanine Añez, membre de l’opposition, seconde vice-présidente au Sénat et avocate, s’autoproclame présidente par intérim de la Bolivie et promet de mettre en place de nouvelles élections au plus vite. Les partisans d’Evo Morales y voient la confirmation d’un coup d’État. Des affrontements entre partisans de Morales, opposants et forces de l’ordre ont alors éclaté et ont fait plus de 32 morts à travers le pays. Añez est porteuse d’une rupture totale avec la politique de Morales: elle s’est installée dans l’ancien palais présidentiel et pas dans la tour moderne de la maison du peuple construite par Morales, elle veut ramener la religion catholique au pouvoir, le nouveau gouvernement a adopté le drapeau d’une région de Bolivie qui s’est toujours opposée aux réformes du MAS - Movimiento al Socialismo (Mouvement vers le Socialisme) - (parti de Morales), enfin, le gouvernement ne contient aucun ministre issu de la majorité indigène du pays. De plus, chaque alliance avec la Bolivie va être revue. Beaucoup s’inquiètent du tournant très droitier qu’affiche le gouvernement d’Añez alors qu’il n’a pas été élu par le peuple. La montée de la droite traduit pour certains une montée du conservatisme général dans l’Amérique latine.

« Le Secrétaire général [de l’ONU, António Guterres,] exhorte toutes les parties concernées à s'abstenir de la violence, à réduire les tensions et à faire preuve de la plus grande retenue. Il appelle tous les acteurs à respecter le droit international, notamment les principes fondamentaux des droits de l'homme », a dit son porte-parole dans une déclaration à la presse, le 10 novembre 2019.




Sources :

-          IRIS, Christophe VENTURA, “La Bolivie, plongée vers le chaos”

-          Conflits, Raphaël FORT “Les défis de la Bolivie face à son histoire”

-          Bolivie: les soutiens de gauche de Morales dénoncent un “coup d’État”, RFI, le 11/11/2019: http://www.rfi.fr/ameriques/20191111-bolivie-soutiens-gauche-morales-denoncent-coup-état

-          Bolivie: l’ONU appelle à la retenue avec l’annonce de la démission du président Morales, ONU Info, le 10/11/2019: https://news.un.org/fr/story/2019/11/1055811

-          Camille Magnard, en Bolivie la transition post-Morales prend des allures de contre-révolution, sur France Culture dans Revue de presse internationale, le 15/11/2019: https://www.franceculture.fr/emissions/revue-de-presse-internationale/la-revue-de-presse-internationale-emission-du-vendredi-15-novembre-2019

-          https://www.youtube.com/watch?v=I9-Xm_jL6Fk = France 24, bilan économique

-          Bolivie. La mutinerie s’étend, Morales dénonce un coup d’État, le Télégramme, le 09/11/2019: https://www.letelegramme.fr/monde/bolivie-la-police-se-revolte-morales-denonce-un-coup-d-etat-09-11-2019-12428747.php



Colle n°9 : 

Le Mexique d'AMLO : entre enjeux nationaux et locaux et ambitions mondiales

Alors que le tourisme représente plus de 13,2 % du PIB mexicain, la violence jamais au Mexique n'avait atteint de tels sommets depuis 1997. Le record de 33.743 meurtres commis en 2018 est en passe d'être battu en 2019. On peut donc se demander en quoi l’émergence du Mexique sur la scène internationale est-elle freinée par les défis internes qui persistent ?

A.     Un pays gangrené par le trafic de drogue : entre criminalité et corruption

Alors que AMLO avait fait de la baisse de la criminalité sa principale promesse de campagne, les violences battent aujourd’hui de nouveaux records. Comme l’expose Thierry Noël dans son ouvrage La Guerre des cartels, le Mexique était autrefois cantonné au transit de la drogue. Passé l’explosion de la consommation de la marijuana à la fin des années 60, le pays se tourne vers la cocaïne. En quelques chiffres : 1er fournisseur de drogue des USA, 7000 et 10000 tonnes de cannabis produits par an, 20 milliards de $ aux empires mexicains de la drogue.

AMLO est un symbole de lutte contre la violence et la corruption au Mexique et il  s’est fait élire pour contrôler cet « antimonde » (R. Brunet). Il a promis «de chasser les mafias au pouvoir», d’éradiquer la corruption et l’impunité qui sont pour lui à l’origine des maux du pays. Une fois au pouvoir, il crée la Garde nationale pour une meilleure coordination entre les forces de la paix mexicaine.
Pour la corruption, il fait un choix symbolique : il a annulé la construction (alors bien avancée) du Grand aéroport de Mexico pour cause de corruption élevé. De plus, il n’y a eu pour l’instant aucun gros scandale de corruption dans le pays durant sa présidence.

Néanmoins, le problème est loin d’être résolu, il n'a pas réussi à enrayer la spirale de la violence des narco-trafiquants. Aucun plan pour les neutraliser n’a été mis en place. "Il est vrai qu'un an n'est pas suffisant pour qu'une stratégie sécuritaire donne des résultats. Le problème est que cette stratégie est pour le moins floue", explique le politologue Jose Antonio Crespo.
Le pays bat son propre record de morts violentes : 200 000 personnes assassinées depuis 2006 à cause de la guerre qui dure depuis 11 ans contre les narcotrafiquants. De nombreux quartiers sont d’ailleurs contrôles par les mafias à l’image du MS 13.
Par ailleurs, AMLO est critiqué pour son inefficacité : aucun dossier de corruption n'a été jugé, il est accusé de centraliser les pouvoirs et miner les institutions, comme les tribunaux. Le fiasco judiciaire de l’affaire des 43 élèves disparus d’Ayotzinapa, n’est toujours pas résolu et cela suscite de nombreuses mobilisations.

La corruption et la violence ralentissent la croissance économique du pays et ne permette pas une émergence rapide. AMLO doit se concentrer sur les problèmes internes qui sont sources de tension et d’anxiété permanente pour les mexicains : les 3/4 des Mexicains ne se sentent pas en sécurité dans leur ville. La ville touristique et mythique d’Acapulco est aujourd'hui gangrenée par la violence : plus de 17 meurtres par semaine. L’État se plie face aux volontés des narcos : un des fils d’El Chapo a été immédiatement relâché pour calmer les fusillades dans le pays récemment.

B.     Le Mexique, une politique migratoire reconsidérée

500 000 Latino-Américains réussissent à traverser la frontière entre les USA et le Mexique illégalement chaque année et 56% d’entres eux sont Mexicains. Sous la pression américaine, AMLO a été forcé de revoir sa politique migratoire afin de réduire les flux de migrants.

Tout d’abord, le Mexique est en pleine explosion démographique ce qui constitue une réserve de main-d’œuvre pour son puissant voisin du Nord par des migrations de travailleurs peu qualifiés ou des diplômés ou bien en travaillant dans des usines de maquiladoras. En 2007, le Pew Hispanic Center estime à 7 millions le nombre de migrants irréguliers. Désormais, la circulation migratoire entre le Mexique et les États-Unis se heurte à une frontière de moins en moins perméable. Depuis plusieurs années, la perception négative des migrants mexicains sur le territoire américain se conjugue à une politique dissuasive censée répondre à la crise économique. AMLO a cédé au chantage lancé par Donald Trump : l’augmentation de 5%, dès le 10 juin, des taxes sur les exportations du Mexique vers les Etats-Unis.

Ainsi, AMLO contient les migrants, face à l'afflux migratoire il crée de nouvelles structures destinées à accueillir ces exilés qui s'entassent dans des camps de fortune le long de la frontière en attendant que l'administration américaine s'occupe de leur dossier. Le visa humanitaire proposé permettrait à ceux qui en disposent de travailler et d'accéder à des soins et à l'éducation pour leurs enfants. Entre Donald Trump qui a fait de l'immigration le thème prioritaire de sa présidence & les petits pays de l'Amérique centrale dont la population cherche à tout prix à fuir la misère & la violence, l’enjeu migratoire est au coeur des débats politiques.

C.     Les ambitions du Mexique : un retour aux fondamentaux en politique étrangère

La politique étrangère menée par AMLO depuis le début de son mandat, s’appuie sur un retour aux fondamentaux énoncés dans la Constitution mexicaine.

Cela se traduit dans un premier temps par une révision des relations avec les USA. Relations asymétriques puisque les États-Unis représentent 80% des exportations mexicaines. Ainsi, afin de se défaire de cette dépendance économique sans pour autant contrarier son homologue américain, AMLO a décidé d’ouvrir des négociations au sein de l’ALENA sans tomber dans le piège des polémiques.

Dans un second temps, le président mexicain fait de la coopération pour le développement une priorité, comme en atteste son intention de créer un pacte de coopération entre les États-Unis, le Honduras, le Guatemala et le Salvador afin de promouvoir et participer au développement des pays à faible croissance économique.

Enfin c’est finalement une position de non-ingérence dans les politiques étrangère qui est prônée par AMLO. Ce dernier ne souhaite plus s’immiscer dans les politiques des gouvernements étrangers à l’image de sa position de médiateur dans la crise vénézuélienne.

Sources :

Le dessous des cartes - Mexique : murs, drogues et corruption

Colle n°10 :
Le Chili, échec du modèle rentier et néolibéral ?


·   Un modèle à bout de souffle.

            La dictature de Pinochet au Chili de 1973 à 1990 permet la construction d’un modèle rentier et néolibéral.  En fait, le néolibéralisme est popularisé dès 1980 par Margaret Thatcher et Ronald Reagan, c’est une  idéologie, une vision du monde et un mode de gouvernement qui prônent une limitation du rôle de l’État en matière économique, sociale et juridique, l'ouverture de nouveaux domaines d'activité à la loi du marché,  une vision de l'individu en tant qu'"entrepreneur de lui-même" ou "capital humain" que celui-ci parviendra à développer et à faire fructifier s'il sait s'adapter, innover...
Le retour à la démocratie n’entraîne cependant pas un changement de modèle, les héritages sont conservés. La croissance chilienne (2%/an) se fonde sur la rente. En effet le cuivre constitue 10% du PIB du Chili et 50% des ressources. Le cuivre devient donc une ressource importante du pays : la mine de Chuquicamata, au Chili, est la plus grande mine de cuivre à ciel ouvert du monde. Ce modèle rentier permet au Chili de se développer, ainsi le pays se trouve aujourd’hui parmi les 5 premiers en Amérique latine.
Toutefois le modèle libéral et rentier n’a pas que des avantages. Le Chili reste soumis aux conjonctures du marché (bourses en Occident) et le libéralisme est aujourd’hui responsable du fort endettement des ménages chiliens (la dette des ménages représente près de 30% du PIB) puisque les secteurs tels que ceux de la santé ou de l’éducation ont été privatisés.
Aujourd’hui, en fait, la majorité des chiliens sont en colère. Le soulèvement et les émeutes au Chili depuis octobre 2019 qui ont fait 26 morts et 2459 blessés le montrent bien. Le Chili est actuellement sous état d’urgence et le peuple demande de vive voix la démission de Sebastián Piñera.

·   Un système qui perdure car soutenu par divers partisans.

            En devenant le premier pays d’Amérique du Sud à adhérer à l’OCDE en 2010, le Chili, 4ème économie du continent, est considéré comme un modèle de stabilité économique. Et pour cause, le PIB s’élève à plus de 298 milliards de dollars en 2018, avec une croissance de 4% la même année (bien qu’aujourd’hui les manifestations pourraient faire chuter les prévisions  pour 2019 de 2,5% à 1%). De surcroît l’IDH de 0,843 s’ajoute à des atouts économiques comme les ports de Valparaiso ou encore Antofagasta, les traités commerciaux (22 accords de libre-échange avec 60 pays) ou encore la tertiarisation croissante qui représente plus de 68% de l’emploi total.
Les partisans du système sont à la fois publics et privés. D’abord les élites économiques tels que les groupes miniers. L’entreprise publique Codelco (premier producteur de cuivre mondial), le groupe australien BHP Billiton qui  exploite la plus grande mine du pays, « Minera Escondida » ou bien encore l’acteur privé chilien Antofagasta Minerals (du groupe Luksic) soutiennent le système car en ils profitent directement. Les politiques en profitent tout autant car les indemnités parlementaires sont les plus élevées de l’OCDE. Aussi, aux plus haut sommet de l’Etat la sphère économique est prégnante : le président Piñera est lui même un homme d’affaire milliardaire.
Les autorités ne proposent finalement pas de remise en question du système, en témoigne le plan de relance économique du le ministre des Finances Ignacio Briones à hauteur de 5,5 milliards d’euros.

·   Quel bilan et quelles perspectives ?

            Le modèle néolibéral est de plus en plus fragilisé à cause des nombreuses inégalités, en particulier dans l’éducation, la santé et l’énergie. Par exemple, la privatisation de l’éducation pousse les étudiants et leurs familles à s’endetter. Une fois sur le marché du travail, les jeunes ne trouvent pas d’emploi ou parfois, ils ne sont pas suffisamment rémunérés pour sortir de cet endettement post-universitaire (23000€ pour un cursus en biologie par exemple mais avec les intérêts cela atteint finalement parfois le double de la somme empruntée initialement). Le Chili fait face à de nombreuses affaires de corruptions, des institutions jusque-là jugées au-dessus de tout soupçon, comme l’armée et la police, sont au cœur de la tempête avec une affaire de détournement de 40 millions de dollars depuis 2006 qui secoue la police.
Aujourd’hui, malgré les concessions populistes du président Piñera afin de calmer la colère des manifestants, et de reprendre le contrôle de la situation avec de nombreuses aides sociales, la crise sociale s’accentue. La première demande des manifestants est le souhait d’une nouvelle constitution avec la création d’une assemblée constituante ou bien encore la démission du président. De plus, avec la mise en place d’un couvre-feu, le Chili voit le retour des années sombres de la dictature de Pinochet (1973-90). On a donc un système démocratique imparfait.
Cependant, le modèle n’est pas remis en cause par le président et les élites et l’objectif du président Piñera et de maintenir un Etat libéral dont les prérogatives doivent rester restreintes pour permettre aux forces du marché d’assurer la croissance économique. Le Chili doit renforcer ses recettes fiscales car elles correspondent à seulement 20% du PIB du pays. De plus l’Etat à tendance à utiliser les recettes fiscales qui découlent des revenus des matières premières pour augmenter les dépenses publiques plutôt que de diversifier  l’économie du pays. 



Sources :






Colle n°11 :
Les nouveaux enjeux de la santé
I. La santé un véritable enjeu international ?
                La santé est un enjeu pour toutes les populations. C’est donc un enjeu international qui soulève des questions éthique, environnementale, sociale, économique et politique qui peuvent être paradoxale comme le fait que les Etats doivent être capable de garder, voire d’augmenter la santé de leur populations avec des budgets de santé qui ne font que décroitre. De plus, l’enjeu santé diffère en fonction des Etats : les Etats du nord sont très tournés vers les innovations dans le domaine médical alors que les pays du Sud doivent d’abord augmenter l’espérance de vie de leur population. Quels sont les nouveaux défis que soulève la question de la santé au niveau international ?                                                                                                                                                                              Les enjeux sociaux pour les pays du Nord reposent sur le fait que la population est de plus en plus âgée : la médecine doit trouver des solutions pour que ces populations âgées aie une espérance de vie en bonne santé qui soit de plus en plus élevée. De plus les Etats font face à différend type d’épidémies, c’est le cas au USA avec la crise des opioïdes ; d’autres Etats comme les Etats africains doivent eux trouver des solutions pour lutter contre des pandémies telles que les SIDA qui a tué plus de 709 000 personnes en 2016. En France un des problèmes majeurs pour les médecins est que ¼ de la population refuse de se faire vacciner car elle n’a pas confiance en les nouveaux vaccins ce qui paradoxale avec la demande croissante d’augmentation du niveau de vie. La question environnementale est aussi importante dans la compréhension de l’avenir de la santé. Par exemple à Oulan-Bator (capitale Mongole) la pollution atmosphérique peut être jusqu’à 25 fois plus élevée que ce que conseil l’ONU ce qui entraîne des maladies respiratoires et des cancers.                                                                                                                                   L’enjeu économique vient du fait que les nouvelles maladies (cancers, respiratoires, cardiaques) demande un certains nombres de recherche de la part des laboratoires médicaux mais pour cela l’Etat doit accepter d’investir plus qu’il ne le fait dans le secteur de la santé. Cela est nécessaire étant donné que le marché de la santé ne fait qu’augmenter grâce à une démocratisation des appareils médicaux mise en place par les services privés de la santé.                               Enfin les questions éthique sont des plus importantes étant donnée les avancée vers lesquelles ont tend à aller. De fait les questions vers lesquelles se tournent les chercheurs font que l’on peut se demander s’il ne faut pas mettre des nouvelles réglementations en place. De plus il s’agirait aussi de se demander s’il faut uniformiser ces règles où si elles peuvent différer en fonction des pays. Par exemple en Chine les règles éthique sont plus flexible ce qui a permis a un chercheur chinois de modifier des embryons pour les rendre résistants au VIH mais cela va pour l’instant à l’encontre d’un nombre important de règles éthique. Enfin il s’agit pour les chercheurs et les médecins de décider comment c’est nouvelles technologies pourront être mise en place pou respecter les règles dictées par l’éthique.
II – La place de l’innovation dans la santé de demain
            Aujourd’hui, nous assistons à une révolution dans le domaine de la santé, résultant de l'association entre biotechnique et numérique. Ce que Joël de Rosnay appelle « biotique » en 1982. Les nano biotechnologies permettent de stocker les informations dans le Big Data. L’accumulation d’informations sur le malade permet alors un meilleur diagnostic et donc un meilleur traitement. Les technologies remettent ainsi en cause le système de santé traditionnel (sans suivi après prescription de médicaments) et permettent une transition vers une santé préventive.                                                                                                                                                                                   
                Dans un tout autre domaine, les innovations énergétiques seront nécessaires afin de diminuer la pollution qui apparaît aujourd’hui comme un danger pour la santé. En effet, selon l’OMS, la pollution tue plus que le tabac avec 7,2 millions de mort en 2015.                                           Par ailleurs, les laboratoires pharmaceutiques publics ne sont plus les principaux acteurs dans le domaine de la santé puisque des entreprises comme Google se mettent à investir dans la santé, avec un plus grand savoir-faire technologique, des budgets colossaux et une base de données sur leurs utilisateurs constituant un réel avantage. Ainsi, est crée en 2013, la filiale Calico avec pour objectif de « tuer la mort » en repoussant les frontières de la longévité. Cela se traduit par exemple avec le projet de lentilles de contact mesurant la glycémie du porteur. En 2015, la filiale de Google Verily voit le jour et permet quant à elle d’analyser les traitements les plus adaptés pour mieux diagnostiquer à l’aide d’algorithmes. L’immense stock de données de Google permet à ces algorithmes de se perfectionner grâce au mécanisme du deep learning.                                                                                                                                 Cependant, cette évolution doit faire face à des problèmes éthiques liés au mélange inévitable entre santé et innovations. Les patients sont-ils réellement prêt à donner toutes leurs informations sur leur santé et faire confiance à des entreprises comme Google qui stockent ces données ? Le contrôle permanant de notre état de santé par des IA ne constitue-t-il pas un problème éthique ? De plus, des problèmes de régulation du droit international au sujet de la santé voient le jour avec notamment la question de savoir jusqu’où le transhumanisme doit aller.                                                                                                                                                    Enfin, doit-on continuer à allonger l’espérance de vie indéfiniment? Le film « In Time » de 2011 montre une société dans laquelle les avancées technologiques permettent de vivre éternellement : santé et numérique ont fusionné. La question démographique y est résolue par une sélection par l’argent. De plus, la pertinence de vivre éternellement pour les individus les plus riches est remise en question.

III – La privatisation, un risque pour l’accès à la santé ?
            En 2018, en France, les établissements de soins publics ne représentaient plus que 45% de l’ensemble des hôpitaux et cliniques implantées sur le territoire. Dans le même temps, les fleurons de l’industrie pharmaceutique privée mondiale ont généré des bénéfices à hauteur de 1019 milliards de dollar en seulement 10 ans, l’équivalent du PIB mexicain. Ainsi, le transfert des activités liées à la santé du public vers le privé est de plus en plus important et ces firmes tendent à devenir de véritables mastodontes. Pour autant, ces entreprises, dans une perspective capitaliste, se doivent de générer des profits, quitte à négliger le « devoir moral », l’accès au soin pour tous, qui fait partie des fonctions régaliennes. La privatisation de la santé menace-t-elle les individus ? Ce phénomène risque-t-il de renforcer les inégalités?                                                                  De manière évidente, les firmes privées ont moins de responsabilités et de devoirs que les Etats en matière d’accès à la santé. Dès lors, leurs stratégies d’investissements ne résultent que d’un calcul de rentabilité et de profit a contrario de l’acteur étatique, qui se doit de répondre aux besoins de sa population, au péril de la santé économique. Dans cette perspective, les laboratoires de recherche privés ne s’orientent que trop peu vers les maladies rares, jugées peu rentables en raison du maigre marché potentiel. Toujours dans cette logique, les prix proposés aux patients sont en adéquation avec les coûts de production et la demande. En France, les médicaments qui ne sont plus remboursés voient leur prix augmenter en moyenne de 39%, pour compenser d’éventuelles pertes.                                                                             Dès lors, la privatisation de la santé menace assez fortement de contribuer aux inégalités entre lowerclass et upperclass. Cependant, les dangers évoqués ici ne doivent réduire la privatisation à un phénomène dangereux et inadapté aux besoins d’Etat-providence actuels. En effet, les firmes privées peuvent apporter des financements dans la recherche ou dans la production médicamenteuse, à des niveaux inégalables par les Etats. En Europe, la majorité du mécénat pour la recherche contre le cancer provient des entreprises privées. Ainsi, tout l’enjeu de la privatisation de la santé réside dans la régulation mise en place par les Etats. L’exemple des opioïdes qui tuent chaque année plus que les armes à feu aux Etats-Unis tend à prouver que malgré la culpabilité de Purdue Pharma ; la Food and Drug Administration (FDA) américaine avait un rôle à jouer et en aura un face aux crises à venir.

Sources : Futura Santé « La pollution de l’air tue 2 fois plus qu’on ne le pensait » 17/03/19, Intervention de Joël de Rosnay au dîner organisé le 26 janvier 2016 par le Cercle des Décideurs Numérique & Santé, JDN « Le plan de Google pour devenir un géant mondial de la santé », Le Monde, Courrier international.



Colle n°12
La montée de l'extrême-droite en Europe : une menace ?
En janvier 2020, la police allemande s’est retrouvée au centre d’une polémique après la diffusion d’images montrant un policier, rieur, prenant des photos d’un homme grimé en Hitler sans intervenir, au cours d’un festival de motos anciennes à Augustusburg. Cet événement résume bien la situation de l’Europe face à la montée et la banalisation de l’extrême droite, pourrait souffrir de la vague extrémiste.

Partis d’extrême-droite : Partis radicalistes animés par des questions sociétales fortes centrées sur l’identité, la souveraineté de la nation. Sont dirigés par des figures fortes, représentant l’opposition face aux élites et au système, et font souvent l’usage du populisme pour arriver à leurs fins.

I°) La montée de l’extrême droite en Europe représente une menace

       La montée de l’extrême droite représente d’abord une menace réelle, ancrée dans le temps : les attentats du 11 septembre 2001 et le climat islamophobe qui en a découlé, la crise financière de 2008 qui a eu pour conséquence une augmentation du taux de chômage et une fragilisation des classes moyennes et la crise migratoire des années 2015 forme le terreau des contestations identitaires et extrémistes de droite, qui se retrouve aujourd’hui dans les urnes (voir photos).
        Cette montée entraîne une banalisation des idées et comportements extrémistes qui peuvent être dangereuses pour la préservation des valeurs européennes(respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités.).
     En effet, le repli identitaire / nationalisme prôné par les extrêmes pourrait fragiliser le fédéralisme et l’intégrité de l’Union Européenne (“Unis dans la diversité”). Lors d’un discours en 2014 à  Băile Tușnad, Viktor Orban, actuel président hongrois,  affirmait vouloir construire “un Etat illibéral”, supplantant l’Etat de Droit et représentant alors un danger pour l’UE. Ces mouvements entraînent alors plus d’autoritarisme, et plus de débordements haineux : les récurrentes “chasses à l’homme” contre les immigrés orchestrées par les ressortissant de l’AfD à Chemnitz (Allemagne) en août 2018 témoignent du climat de tensions sociales que véhiculent les partis d’extrême-droite.  
 De plus, ces extrêmes font l’usage impropre d’alliances pour gagner en influence au parlement européen. Depuis le 8 avril 2019, le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur italien, Matteo Salvini, a entrepris des démarches au niveau européen pour constituer, avec d’autres partis d’extrême-droite, l’Alliance des Peuples et Nations d’Europe. Dans cet objectif, il a rencontré à Milan les leaders des partis d’extrême-droite allemand, finlandais et danois, et le vice-Premier ministre autrichien Heinz Christian Strache.
     Enfin, le rejet des institutions européennes constitue une partie majeure des programmes politiques des partis d’extrêmes droite : le Brexit britannique, ainsi que les volontés du RN de sortir de la zone euro sont les témoins d’un ras-le-bol du vivre-ensemble. Les électorats d’extrême droite se sentent soit utilisées soit oubliées par l’Europe, d’où le rejet de leurs instances. Et si ils ne sont pas au pouvoir, ces partis influencent malgré tout les questions sociales en suspens : le traitement francais de la crise migratoire est profondément influencé par les mentalités d’extrême-droite.

II°) La montée de l’extrême droite en Europe n’est pas une menace

            Néanmoins, on peut en parallèle considérer que la montée de l’extrême droite en Europe ne constitue pas une menace pour les institutions de l’Union européenne.
            En effet, le Brexit a été à ce jour condamné par les 27 autres membres que compte l’Union européenne. L’hésitation des Britanniques lors des difficiles négociations avec cette dernière et le coût (on parle de plus de 200 milliards de dollars) de cette sortie semblent avoir rendu hésitants les plus europhobes. L’extrême droite est même est divisée au sujet de l’adhésion à l’UE, à l’instar du nouveau parti créé par Florian Philippot, “Les Patriotes”, qui prône désormais plus le “Frexit” que le Rassemblement National, dirigé par Marine Le Pen, qui défend plutôt (et même de moins en moins) une sortie souveraine de la zone euro.
De plus, les mouvements pro-européens se multiplient, à l’image des manifestations anti-Brexit au Royaume-Uni ou du mouvement des sardines, mouvement italien d’inspiration antifasciste et fervent opposant à l’extrême droite du pays, portée par Matteo Salvini.
            Il faut en outre noter que l’extrême droite hongroise, menée par le populiste Viktor Orbán, a été l’objet de sanctions pour avoir mis en place des lois liberticides contre l’État de droit (restriction de l’indépendance des médias et de la justice, limitation des libertés individuelles, qui forment pourtant l’ADN du Conseil de l’Europe, etc.). En effet, le Parlement européen a lancé la procédure dite de l'article 7, mécanisme qui constate le bafouement des valeurs européennes inscrites dans l’article 2 du traité de Maastricht (“respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités”).
            Même si la montée europhobe à Strasbourg en mai dernier, lors des élections européennes, a été largement médiatisée, elle ne représente que 73 députés sur les 751 que compte le Parlement, soit approximativement 10%. Les partis écologistes et le centre-droit sortent de surcroît vainqueurs, cela illustrant plus structurellement la fin du bipartisme traditionnel précédemment dominant dans cette organe parlementaire. Le groupe européen d’extrême droite, “Identité et démocratie”, ne regroupe pas plus de neuf pays parmi les désormais 27 pays membres.

            Finalement, même si les extrêmes droites peuvent représenter une menace certaine pour les institutions de l’UE, en cela qu’elles les critiquent et voudraient s’en distancer, elles sont aussi confrontées à des oppositions internes aux pays de l’Union et à des oppositions idéologiques entre les pays membres.

Sources utilisées

-       ZALEWSKI Frédéric, “Pologne-Hongrie, dérives autoritaires et nationalistes”, n°95 de Diplomatie “Populisme, nationalisme, souverainisme, l’Europe en crise”, publié en novembre-décembre 2018.
-       BOUILLAUD Christophe, “Nationalisme italien, de la fierté européiste au nativisme eurosceptique”. n°95 de Diplomatie “Populisme, nationalisme, souverainisme, l’Europe en crise”, publié en novembre-décembre 2018.

-       LICOURT Julien, article Grand-Angle du Figaro [en ligne], décembre 2016, “Que pèse réellement l’extrême-droite en Europe ?”. Disponible sur : http://grand-angle.lefigaro.fr/extreme-droite-europe-enquete-vote-populisme, [consulté le 01/02/2020].

Colle n°13 : 
QUELLE PLACE POUR LA FRANCE EN EUROPE AUJOURD'HUI ?


La France est un des six membres fondateur de l'Union européenne avec la création de CEE (Communauté économique européenne) en 1957 par le traité de Rome. Elle est un acteur majeur de la construction européenne depuis les années 50 jusqu'à nos jours. Cette place dominante est marquée par la déclaration du 9 mai 1950 de Robert Schuman, le ministre français des Affaires étrangères. Cette déclaration est considérée comme le texte fondateur de la construction européenne. Cependant, cette place dans l'Union européenne est remise en cause par d'autres pays et par les habitants eux mêmes.
La France est-elle toujours l'acteur majeur de l'Union européenne ? Quelle est sa place aujourd'hui ?

I/ La France a une place traditionnelle dans l'Union européenne (Ines Moussous)

            Tout d'abord, la construction européenne occupe une place prépondérante dans la politique étrangère française dès 1945. Le rapprochement entre la France et l'Allemagne, dont Jean Monnet, Robert Schuman et Konrad Adenauer sont les principaux artisans va aboutir en 1951 à la création de la CECA (Communauté européenne du charbon et de l'acier). Cette volonté de construction européenne encouragée par la France a abouti en 1957 à la création de la CEE (Communauté économique européenne), instituée par le traité de Rome. Cette construction européenne est concrétisé le 7 février 1992 avec le traité de Maastricht créant l’Union européenne.
            La France a une place centrale dans l'Union européenne dans le domaine économique. Elle est l’un des principaux contributeurs financier à l'Union européenne. En 1992, la France versait 10,5 milliards d'euros à la construction européenne contre 23,2 milliards en 2019 et prévoit de contribuer davantage en 2020. Le pays a également encouragé la création d'une monnaie commune, l'euro, institué en 1999. La France bénéficie de l'Union européenne car elle effectue la plupart de ses échanges avec les pays membre de l'Union. L'Allemagne est son premier partenaire commercial avec 17% des échanges totaux de la France en 2016.
            Elle a une place centrale dans le domaine diplomatique au niveau de la présence d'institutions importantes tel que le Parlement européen à Strasbourg. Elle est le deuxième pays après l'Allemagne à posséder le plus de siège au Parlement avec 74 eurodéputés. Dans le domaine démographique, la France compte 14% de la population totale de l'Union européenne. Dans le domaine culturel, la France a une place importante car le français est une des trois langues officielles et de travail au sein de l'Union européenne. La France participe également à de nombreux accords, tel que les accords de Schengen permettant la libre circulation des habitants des pays membres de l'Union, dont les étudiants français sont les principaux bénéficiaires du programme Erasmus. Enfin les Français et le président ont également un rôle a jouer dans cette place ancrée dans l'Union européenne. Les derniers président français restent en faveur d'une construction européenne. Le président actuel E.Macron est en faveur d'un centrage de l'Union autour d'un noyau dur composé  des pays forts de l'Union européenne  : « L'Europe c'est nous. C'est nous qui l'avons voulue. Et nous avons besoin de l'Europe parce que l'Europe nous rend plus grands. Parce que l'Europe nous fait plus forts » a-t-il déclaré lors d'un meeting à Lille le 14 janvier 2017. En ce qui concerne les Français, 70% étaient opposés a un « Frexit » (sortie de la France de l'Union européenne) en 2017.
Cependant, cette place a été remise plusieurs fois en question, avec une opinion publique qui tend à changer, en 2018, le nombre de personnes opposés à un Frexit a diminué et est passé à 64%.



II/ Le rôle de la France affaiblit, dû à un manque de perspectives ?

  Le fait que la France pèse désormais moins dans l’UE qu’au XX siècle (construction européenne) est une réalité.
Le déclin de la puissance française au sein de l’UE s’explique par deux causes pour Olivier Rozenberg (professeur à Sciences Po). La première est l’affaiblissement politique du pays dû à un affaiblissement économique suite à la crise de 2008 : le taux de chômage de la France est le 4ème plus élevé de l’UE, et le pays est accusé de déficit budgétaire notamment suite à la crise des gilets jaunes. La France perd ainsi en crédibilité, d’autant plus que la deuxième cause de son déclin est la perte de centralité due aux élargissements de 2004, 2007 ou encore de 2013, qui ont déplacé le centre de gravité de l’UE de l’ouest vers le centre est. On perçoit donc un certain malaise français provoqué par cet affaiblissements progressif du rôle français dans l’UE alors que la construction européenne se devait être, pour De Gaulle, un multiplicateur de la puissance française…

  Pourtant, le président E.Macron (2017) fait des efforts et s’implique au sein de l’UE, comme le montre sa volonté d’instaurer une Europe de la défense qui explique sa critique de l’OTAN au cours d’un interview de 2019. Même si il peut paraître unilatéraliste, il s’est, au début de sa présidence, rapproché de la chancelière A.Merkel en proposant d’effectuer des réformes structurelles dans l’UE ( comme l'intégration de la zone euro et un renforcement la défense européenne). Toutefois les propositions sont restées sans réponses. Le couple franco-allemand semble donc en panne, avec une UE plutôt à l’heure allemande : F. Hollande qui avait lancé un projet européen sur les estrades électorales, s’est fait rudement recadrer (par Berlin) une fois élu. Là encore, la crédibilité française s’amenuise.

  On perçoit donc une remise en question de l’influence française dans l’UE, une contestation à la fois interne et externe. Au delà de la critique allemande envers le leadership français, l’euroscepticisme en France est à la hausse. Par ailleurs, ce phénomène alimente les nationalistes comme Mme. Le Pen qui trouve que le budget versé à l’Union est beaucoup trop important et représente une perte d’argent. Ainsi, les Français veulent-ils retrouver leur importance d’antan au sein de l’UE, ou bien se tourner davantage sur eux mêmes ? Certains invitent justement la France à d’abord s’imposer comme un Etat nation au lieu d’une puissance européenne qui peine à redevenir moteur des politiques et des actions européennes.

Bilan : Ainsi, bien que la France reste un acteur majeur et moteur de l’UE, il semble que son leadership soit contesté et remis en question par une Allemagne toujours leader (malgré elle). Cependant, le Brexit sera t-il alors l’occasion pour la France de regagner en puissance et d’augmenter son poids en Europe, alors que l’Allemagne est elle aussi affaibli par la crise migratoire et sa procrastination, et où la fin du règne d’Angela Merkel s’accompagne d’un grave crise politique déclenchée par l’extrême droite qui pourrait contraindre la chancelière à quitter son poste plus tôt que prévu. L’implantation croissante de l’AfD, parti politique eurosceptique et nationaliste allemand, dans le pays montre que l’Allemagne semblerait ne plus vouloir être le moteur de l’UE.

Carte : La France dans  l’UE et l’Europe


SOURCES

Site Toute l’Europe V.Lequeux

Video et Article tiré du site Diploweb - le 7 mai 2014 par P.Verluise


Article du Monde S.Agnes - le 19 mars 2019

Article Slate FR
Benjamin Haddad et Foreign Policy — Traduit par Peggy Sastre — 13 décembre 2019


Colle n°14
Vers une Europe plus verte ?

L’Union Européenne a depuis un certain temps vocation à adhérer au changement climatique et se place au premier rang dans de nombreux programmes. Mais aujourd’hui, quels sont réellement les outils et les moyens de l’UE pour avancer dans un « verdissement » à la fois politique mais aussi économique et social ?

                                                          Une préoccupation précoce

Dès 1971, la Commission de la Communauté économique européenne (CEE) a commencé à sensibiliser les dirigeants des Etats membres au sujet de l’environnement . Cela démontre bien une attitude précoce, que ce soit par rapport aux autres pays développés tels que les Etats-Unis ou par rapport aux Nouveaux pays industrialisés (NPI) comme la Chine.

              Des principes politiques définis relativement tôt en Europe
En effet, les plans d’action pour l’environnement (PAE) ont débuté en 1973, ayant pour but d’orienter la politique environnementale de l’Europe. S’en suivent ensuite l’Acte Unique de 1986 qui ajoute au traité de Rome (1957) un volet Environnement, et le traité de Maastricht (1991) qui l’insèrent dans les objectifs de la CEE. Enfin, le traité d’Amsterdam (1997) donne un nouvel objectif pour l’UE : le développement durable. Suite à ces traités ont été instaurés différents principes qui doivent être appliqués par les pays membres : les principes de précaution, de prévention, de pollueur-payeur et de correction de la pollution à la source.
              Une économie qui a favorisé cet élan écologiste
La délocalisation des usines et la désindustrialisation qu’ a subi une grande partie de l’UE ainsi que la croissance du secteur tertiaire ont permis à l’Europe de faire énormément baisser ses émissions polluantes, mais en les déplaçant dans des pays tels que la Chine ou le Vietnam. D’un autre côté, le tertiaire est le berceau des nouvelles technologies et en particulier, des technologies nécessaires au développement des énergies renouvelables. Par exemple, le Danemark et la Suède ont beaucoup développé l’éolien.
              Des initiatives locales anciennes
En dehors des politiques globales, la société civile et les villes agissent depuis longtemps pour tenter de changer les choses. Au niveau des villes, certains PDU comme celui de Toulouse mettent en place une politique « de la ville sans voiture » afin de limiter la pollution et développent les transport en commun de façon importante avec par exemple la prochaine troisième ligne de métro.
A l’échelle de la société civile, les circuits-courts sont anciens : les AMAP (association pour le maintient de l’agriculture paysanne) existent depuis longtemps et prônent les liens directs producteur-consommateur comme l’AMAP Zest qui propose des paniers de légumes aux étudiants toulousains. Cela montre bien qu’il y a une prise de conscience sociale de la situation qui pourrait bien être relayée actuellement au niveau institutionnel.

                      L'Union Européenne se met au vert avec Ursula von der Leyen
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs » a prononcé Jacques Chirac lors de l’ouverture de son discours devant l'assemblée plénière du IVᵉ Sommet de la Terre le 2 septembre 2002 à Johannesburg, Bien que précoces les mesures européennes ont toujours été peu efficaces. Mais l’Union Européenne n’est-elle pas en train de vivre un tournant dans sa politique écologique ?
La montée des partis vert
Les partis verts deviennent de plus en plus puissants au sein de l'UE, au point de peser sur l’équilibre du nouveau Parlement européen. En effet les verts sont le 4e parti au parlement européen.
En Allemagne, aux Européennes de 2019, les Verts sont devenus les nouveaux maîtres de l’échiquier politique. En réunissant 20,9% des suffrages (contre 10,7% en 2014), le 25 mai dans les urnes, Bündnis90 / Die Grünen, multiplie par deux son nombre de voix ainsi que son nombre de siège.
Cependant à l'est et au sud du continent, l'écologie politique reste encore balbutiante. Effectivement voilà déjà dix-sept années en Pologne que Partia Zieloni (le Parti Vert, en polonais) a vu le jour, en 2003. Mais, en 2018 le parti écolo ne compte aucun député à la Diète, et pas plus d’élus locaux dans les villes.
L’ambitieux projet d’Ursula von der Leyen
Kévin Puisieux, ancien conseiller politique d’Eva Joly au Parlement européen, souligne « un moment politique important ». En effet relever le défi du changement climatique devient l’un des trois principaux objectifs que la nouvelle présidente de la Commission Ursula von der Leyen, entrée en fonction le 1er décembre, s‘est fixé car pour elle : « L’Europe doit faire la course en tête ».
Avec son « Pacte vert » présenté en décembre, quelques jours seulement après sa prise de fonction, Ursula von der Leyen a fait du climat la priorité de sa Commission. Dans la continuité de son combat, elle a dévoilé le mardi 14 janvier 2020 son « plan d’investissement pour une Europe durable », aussi appelé «Green New Deal». Autrement dit, il s’agit la feuille de route climatique compilant les propositions législatives, instruments financiers et plans d’actions (notamment pour parvenir à la neutralité Carbonne d‘ici 2050). Il s’agit de mobiliser jusqu’à 1 000 milliards d’euros dans les dix prochaines années en faveur de la transition d’un continent où les émissions de gaz à effet de serre devraient être les plus faibles possibles. Un des grands défis sera d’aider les régions qui sont très dépendantes du charbon dans leur économie.
Les ambitions sont fortes mais les propositions ne sont-elles pas trop vagues ? En effet dans sa présentation, l’ambition 2030 (dont les objectifs clés sont la réduction des émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40 %, l’augmentation de la part des énergies renouvelables à au moins 32 % et l’amélioration de l'efficacité énergétique d'au moins 32,5 %) passe au second plan, déplore-t-on au Réseau “Action Climat”. Et plusieurs des mesures annoncées sont encore peu détaillées, ajoute-t-on à la Fondation Nicolas Hulot. En effet par exemple la réforme de la PAC est un sujet crucial mais ce "pacte vert" ne précise pas comment celle-ci va refléter les ambitions. Et on ne sait pas non plus où seront trouvés les 100 milliards d’euros du fonds pour la transition juste. De plus il n’est pas certain que ces propositions donnent satisfaction à Prague ou à Budapest, qui ont beaucoup hésité avant de s’engager, fin 2019, pour la neutralité carbone, ni qu’elles convainquent Varsovie, qui est aujourd’hui le dernier des Vingt-Huit à n’avoir toujours pas adhéré à cet objectif communautaire. Les moyens sont donc encore flous, car outre les financements, la question des régions éligibles s’annonce également délicate et le soutien au nucléaire est en débat.

                                            Les limites de la transition verte de l’UE

L’UE peut-elle concilier sa politique environnemental et ses obligations économiques et politiques ?

           Des freins politiques
Il persiste de nombreux lobbies à Bruxelles comme l’entreprise Bayer qui cherche à contrecarrer les normes sur la production agricole pour ouvrir le marché européen aux exportations agricoles OGM ou encore le débat quant à l’utilisation du glyphosate jugé cancérigène et polluant et pourtant ne faisant l’objet d’aucun arrêté européen. Le poids des lobbies serait ainsi un frein à cette transition mais pour saisir leur importance il faut comprendre l’enjeu économique en filigrane.
Des freins économiques et géopolitiques
L’UE s’est toujours affirmé comme maîtresse du libre échange et de la libre concurrence ? C’est pourquoi, il lui est difficile de renier ses valeurs au nom de l’écologie. C’est ce dont atteste le débat avec le groupe de Cairns (association des pays d’Amérique Latine pour faire pression sur le protectionnisme agricole) qui produit notamment des viandes bovines ne respectant pas les normes sanitaires et écologiques de l’UE, pourtant un accord a été trouvé en 2019 au nom de la libre concurrence et de l’intérêt économique.
De plus de nombreux paradoxes géopolitiques persistent. L’Allemagne qui veut assurer sa transition énergétique en se passant de l’énergie nucléaire d’ici 2022 à d’une part ré-ouvert de nombreuses centrales à charbon et a augmenté sa consommation de gaz. Le nouveau gazoduc, le North Stream 2, reliant la Russie à l’Allemagne fait débat au sein de l’Union car le Conseil Européen cherche à réduire sa dépendance énergétique envers la Russie, ainsi la question énergétique divise le continent européen.
Hiatus entre les politiques et la société
Finalement toutes ces incohérences quant à la question environnementale freinent la création de mesures politiques concrètes et leur application. De ce fait, l’écart entre une société civile demandeuse de changement et l’inaction politique crée des mouvements populaires cherchant à accélérer le processus à l’image du mouvement lancé par Greta Thunberg (activiste écologiste menant des manifestations contre l’inaction des États et qui intervient lors de sommets mondiaux) qui a réellement pris de l’ampleur en 2019 ou encore d’Extinction Rébellion fondé en 2018 revendiquant l’usage de la désobéissance civile pour lutter contre l’inaction de l’État en matière de transition énergétique, forme d’altermondialisme.

Finalement si l’Europe s’est avérée en avance en matière écologique, avance qui semble se confirmer avec les dernières élections européennes, l’Union doit encore jongler entre ses impératifs économiques et ses obligations écologiques. Ce paradoxe ne manque pas de faire réagir la société civile qui pourrait d’ailleurs être la clé de cette transition.

Sources :

- Le plan de la Commission Européenne pour aider à financer la transition écologique, Le Monde, Virginie Malingre, le 14 janvier 2020

- Les experts du Dessous des cartes, Marc-Antoine Eyl-Mazzega, émission du 16 janvier 2020,

- Intégration européenne et environnement : vers une Union verte ?, Politique Européenne 2011, Nathalie Berny

- L’Europe, fer de lance d’une mondialisation écologique ?, Arte, 28 Minutes, interview de Sylvie Matelly