vendredi 3 avril 2015

accord EU-Iran


Accord sur le nucléaire iranien : les républicains se déchaînent

Le Point - Publié le - Modifié le

Les détails n'étaient pas encore connus que les conservateurs étrillaient sur Twitter l'accord conclu à Lausanne, le "Munich" d'Obama, selon eux.

John Boehner (à droite), le porte-parole de la Chambre des représentants, a invité Netanyahu à parler devant le Congrès, puis est allé lui rendre visite en Israël.
John Boehner (à droite), le porte-parole de la Chambre des représentants, a invité Netanyahu à parler devant le Congrès, puis est allé lui rendre visite en Israël. © Debbie Hill/AFP/Pool
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De notre correspondante à Washington,
À peine les négociateurs avaient-ils annoncé l'accord avec l'Iran sur le nucléaire que les conservateurs dégainaient leurs tweets vengeurs annonçant, avec leur ton mesuré légendaire, la fin du monde. Ils accusent le président Obama de s'être aplati devant les Iraniens et d'avoir lâché trop de concessions. Peu importe si les détails ne sont pas connus avant l'échéance du 30 juin, ils sont convaincus que cet accord est une catastrophe majeure. Leur comparaison favorite, ce sont évidemment les accords de Munich en 1938. "Neville Chamberlain a obtenu d'Adolf Hitler un meilleur accord", a déclaré le sénateur Mark Kirk de l'Illinois. "Arrêtez toute cette négativité sur l'accord avec l'Iran, mes chers conservateurs. Les Iraniens n'ont pas eu la région des Sudètes", ironise Ed Morrissey, un blogueur de droite. Dans le magazine National Review, l'historien Victor Davis Hanson écrit : "Notre déshonneur à Lausanne, comme à Munich, peut éviter une confrontation aujourd'hui, mais notre honte garantit une guerre dans l'avenir proche."

"Bombardez l'Iran"

Les néoconservateurs, qu'on croyait enterrés avec le fiasco de la guerre en Irak, ont repris du poil de la bête et sont de nouveau très influents chez les républicains. Malgré leurs échecs répétés, ils ont conservé leur vision belliqueuse du monde et leur credo : pas de compromis avec les ennemis de l'Amérique, même si cela doit mener à une autre guerre et mettre la planète à feu et à sang. "Pour stopper la bombe de l'Iran, bombardez l'Iran," écrivait récemment John Bolton, l'ambassadeur aux Nations unies de George W. Bush, dans le New York Times.
Les conservateurs ont vraiment tout fait ces derniers mois pour torpiller les négociations avec Téhéran. Ils ont invité début mars le Premier ministre israélien, sans le dire à la Maison-Blanche. Benjamin Netanyahu, en plein Congrès, a attaqué la politique d'Obama en disant que tout accord "ouvrirait la voie" à une bombe atomique iranienne. Quelques jours plus tard, 47 sénateurs ont signé une lettre qu'ils ont envoyée directement à Téhéran à l'instigation du sénateur Tom Cotton de l'Arkansas. Objectif : rappeler au régime iranien que le Congrès pouvait faire machine arrière sur tout accord. Du jamais-vu dans les annales de la diplomatie.
Jeudi, ils se sont aussitôt déchaînés pour dénoncer ce que le président Obama a qualifié d'"accord historique". "Il n'y a pas d'accord avec l'Iran. Il y a seulement une liste de concessions américaines dangereuses", a clamé Tom Cotton. Jeb Bush, le candidat non officiel à la Maison-Blanche, a renchéri : "Je ne peux pas soutenir un tel accord foireux." Le gouverneur du Wisconsin, Scott Walker, autre présidentiable, a lancé sur Twitter : "L'accord dangereux d'Obama avec l'Iran récompense un ennemi, sape la sécurité de nos alliés et menace la nôtre."

La bataille du Congrès

Mais ils ont aussi beaucoup insisté sur le fait que le Congrès devait examiner l'accord et avoir le dernier mot. "Le Congrès doit être autorisé à revoir tous les détails de n'importe quel accord avant que les sanctions ne soient levées," a affirmé John Boehner, le speaker de la Chambre des représentants, qui a invité Netanyahu et est allé lui rendre visite en Israël la semaine dernière.
Le sénateur Bob Corker a ajouté qu'il allait faire pression pour faire voter une loi qui donne au Congrès le pouvoir de modifier l'accord. Le président Obama a dit et redit qu'il mettrait son veto à toute législation qui donne au Congrès la possibilité d'approuver ou de rejeter un accord. L'avenir des négociations avec l'Iran dépend donc de la capacité de Barack Obama à convaincre tous les démocrates et quelques républicains de lui laisser les mains libres d'ici la fin juin.
Signe encourageant pour la Maison-Blanche : le soutien étonnant de Bill O'Reilly, l'un des commentateurs vedettes de la chaîne conservatrice Fox News, connu pour ses positions farouchement anti-Obama. Il a déclaré à l'antenne que l'on devait donner à la diplomatie une chance. "Vous ne voulez pas une guerre avec l'Iran, vous ne voulez pas bombarder ce pays" parce que "ça va enflammer le monde". "Donc, si l'on peut obtenir quelque chose de correct, il faut tenter le coup", a-t-il lâché à la stupéfaction de la présentatrice de la chaîne qui l'écoutait.
Source : Le Point.fr