Analyse de carte : le déploiement stratégique de la marine chinoise
Corrigé
Phase
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Etape
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Détails
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REPONSES
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Intro-duction
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1.
Présenter le sujet
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-analyse des termes
- bornes chrono/espace
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-extension
récente de la marine chinoise tant au niveau équipement (2 porte-avions)
qu’au niveau géographique (bases, interventions).
-carte
mondiale non entière (donc extension géo partielle), eurocentrée = choix
technique inadapté au sujet ; source = revue Diplomatie à partir de 3 sources
différentes
- intérêt =
analyser l’extension de la marine chinoise afin de voir les différents axes
et motivations des dirigeants chinois
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2 Présenter la carte
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-sources/auteur
-nature
-échelle/projection
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3. Intérêt de la carte
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- lien entre le sujet et la carte
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Analyse
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3
Analyse…
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-plan : de 2 à 4 thèmes
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1 Priorité
à la mer de Chine =1ère étape
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2 Une
stratégie actuelle pacifique de sécurisation énergétique
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3 Une
stratégie nationaliste croissante
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4 A terme, un conflit inévitable avec les
Etats-Unis et les voisins ?
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-arguments précis visibles dans la carte
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Façade
maritime nationale : 3 bases navales
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Détroits
d’Ormuz, détroit de Bal-el-Mandeb
7 pays
alliés du Cambodge à l’Iran
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5 lieux à
litiges dont Archipel Diaoyutaï
Spratley
Paracels
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« blue
line » à 2 ou 3000 km des côtes chinoises
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-connaissances
-vocabulaire clé
-analyse
-complément
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ZEE
Equipement
croissant de la marine = 2nd budget mili mondial
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Collier de
perles = réseau d’alliés
Piraterie
somalienne
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Différents
frontaliers avec nbx paysEnjeux =
1 ressources
(poissons, hydrocarb)
2
nationalisme avec question de Taïwan
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Pol étr am
du « pivot » = protection pour pays de la région
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4 …
critique
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-visible
-invisible
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Route maritime non tracée
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Aucunes infos sur les Etats-Unis
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Conclu-sion
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5 Portée
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En
quoi la carte-t-elle répond au sujet et à l’intérêt dégagé en
introduction ?
Déploiement non mondial, mais
motivations éco et pol = marine = outil de puissance avec une extension
progressive d’abord régionale, et non encore mondiale.
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Dissertation
Sujet 1 :
La territorialisation des espaces maritimes asiatiques : atout ou risque pour le monde ?
Corrigé :
Erreurs à éviter : -trop limiter le sujet à l’Asie
de l’Est, surtout à la Chine
-traiter
« pour le reste du monde » et non « le monde », donc
aspects internes à l’Asie importants
-ne
voir qu’un de des deux gds thèmes su sujet : soit géopol, soit éco
-penser
aux acteurs du sujet : organisations mondiales ou régionales, Etats,
firmes, élites, peuples
-se
contenter d’un plan sans risques (mais non interdit) I/ terr
II/ atout III/risques
-négliger
la question environnementale
-ne
pas voir tous les aspects multiscalaires du sujet (voir jeu de couleurs du
corrigé visible sur le blog)
Signes d’une réussite : -plan qui nuance le propos (ce qui
justifie le point d’interrogation)
-variété
de l’argumentation au niveau géo
-précision
de l’argumentation (développer un ex bien maîtrisé)
-conclusion
qui ne se contente pas de faire le bilan des 3 parties, mais répond à la problématique
et propose une relance du débat (ouverture)
Problématique : Les intérêts
éco, pol et géopol des pays asiatiques liés à l’extension de leurs espaces
maritimes sont-ils compatibles avec la logique mondialiste ? Mais, les
problèmes ne viennent-ils pas surtout de l’Asie elle-même ?
Partie
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Idée
centrale
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Sous-partie
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Ex /types
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Mots clés
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acteurs
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I
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La territorialisation est un prolongement récent et
positif pour un éco mondialisée…
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A –Une logique économique
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Diaoyu/Senkaku
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Ressources halieutiques, hydrocarbures
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FMN chin et jap
Consommateurs
du monde entier
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B – Une logique commerciale
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Ormuz ou détroit de Malacca
|
Mondialisation ports exp
routes maritimes
Sécurisation r
|
Marines eur, am,
chinoise…
|
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C – d’où l’évolution juridique
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1982
|
Montego Bay
ZEE
Plateau continental
|
Communauté
internationale
Tribunal inter
du dt de la mer Hambourg
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II
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… mais aussi sources de problèmes à la fois en Asie
et dans le monde…
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A – En Asie
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Conflits
anciens non résolus
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Corée du
Nord
Vietnam/Chine
Taïwan
|
Kim Jon Un
PCC PCV
|
Différends
insulaires :
Spratley
|
Souveraineté
Nationalisme
populisme
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Elites/armées/peuples
|
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B – Ds le
monde
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Risques géopol :
menace chinoise, réarmement
|
Etats-Unis
|
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Risques éco et env
|
pollution
Continent plastique
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III
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D’où une forte incertitude pour l’avenir qui oblige à
dépasser les risques ?
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A – L’Asie de l’Est et le Pacifique or, territoires
clés
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Asie du Sud-Est
Pacifique or
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ASEAN « circuit intégré asiatique »
« blue line » =
risque
Ou ASEAN étendue =
coopération
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FMN eur, am, jap
Etats-Unis
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B – Des solutions éco et géopol pour apaiser les
tensions
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Route du Nord (Arctique)
Routes terrestres
Xinjiang-Europe de l’Est
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Réchauffement climatique
Pont intercontinental
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Russie
Asie centrale
|
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G2 EU-Chine ou retenue
PCC
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Coopération
pivot
|
Etats-Unis
|
corrigé rédigé :
En 1982, plus de 150 Etats (soit la presque totalité des Etats
de l’époque) se réunissent à Montego Bay et aboutissent à la signature
d’accords juridiques sur le droit de la mer avec, en particulier, la création
de Z.E.E., zones économiques exclusives ainsi que de leur extension possible
via le plateau continental. Cet accord international majeur illustre parfaitement
la territorialisation des espaces maritimes. Il s’agit d’un processus
d’occupation par les hommes et de maîtrise par les Etats des espaces situés
dans les mers et océans. Il implique donc une fragmentation de l’espace
maritime par la création de frontières nouvelles. Cette occupation débute par
une demande de souveraineté de la part des Etats sur des espaces maritimes
ainsi que sur les îles qui y sont intégrées et implique souvent les firmes,
notamment pétrolières. L’importance des hydrocarbures et leur essor en
off-shore peut ainsi justifier d’avoir une vision large de l’Asie et d’y
inclure sa partie occidentale, c’est-à-dire le Moyen-Orient. En Asie, le plus
grand océan est le Pacifique dont la superficie est de 180 millions de
km² ; quant à l’Océan indien, il est 3 fois plus petit. S’ajoutent de
nombreuses mers dont la mer de Chine dont plusieurs îles défrayent l’actualité.
Ainsi, l’année 2012 a été marquée par de multiples incidents entre la Chine et
le Japon au sujet des îles Senkaku (nom japonais) ou Diayo (nom chinois).
Pourtant, les relations commerciales entre ces deux pays sont importantes et,
évidemment, la plupart des échanges de marchandises passent par la voie
maritime. Depuis 1984, les échanges trans-pacifiques ont dépassé ceux qui concernent
l’Atlantique. Les enjeux économiques de l’Asie sont en effet colossaux. Le
principal continent émergent est devenu « l’usine du monde » ;
une partie importante des biens consommés par les Occidentaux viennent d’Asie.
Ainsi le
contraste entre les tensions et les relations sino-japonaises nous amènent
logiquement à nous interroger sur la compatibilité entre les intérêts
économiques, politiques et géopolitiques des pays asiatiques liés à l’extension
de leurs espaces maritimes et la logique mondialiste et libre-échangiste… mais
au final les principaux problèmes ne pourraient-ils pas venir des pays
asiatiques eux-mêmes ?
La
territorialisation est en effet un prolongement récent et positif pour une
économie mondialisée (I), mais aussi sources de problèmes à la fois en Asie et
dans le monde (II), d’où une forte incertitude pour l’avenir qui oblige à
dépasser les risques tant à l’échelle régionale que mondiale (III).
***
La
territorialisation correspond surtout à trois logiques : commerciale, économique
et juridique.
La logique
commerciale est ancienne. Dès le XIVè siècle, l’amiral chinois Zheng He a
certainement passé le Cap en Afrique. Depuis le XVème siècle, l’européanisation
du monde se caractérise par l’appropriation par les Portugais, puis les
Hollandais et les Britanniques, de voies maritimes reliant l’Asie à l’Europe.
Ces voies ont abouti à la création de comptoirs situés stratégiquement afin de trouver les distances les plus
courtes et donc gagner du temps. En Asie, l’ouverture du canal de Suez en 1869
va donner au détroit de Malacca une grande importance que les dirigeants de
Singapour vont très bien exploiter. Cette appropriation implique une sécurisation
des navires commerciaux par la création de ports qui permettent de protéger les
navires de la piraterie, mais aussi d’approvisionner navires (en charbon hier,
en carburant aujourd’hui) et marins. Aujourd’hui,
la principale route maritime est l’axe qui relie les ports pétroliers et
gaziers du Golfe arabo-persique aux ports asiatiques dont le premier du monde,
Shanghai. Cette route est marquée par deux lieux clés : au départ, le
détroit d’Ormuz (géographiquement en Asie) voit passer les 2/3 du trafic
d’hydrocarbures du monde tandis que le détroit de Malacca, plus de 200 navires
dont beaucoup de porte-conteneurs venus des ports exportateurs chinois,
japonais ou sud-coréens.
Cet essor
du commerce implique aussi l’essor de l’activité commerciale bordière, le long
des littoraux. Le cabotage est en effet très ancien et permet d’éviter
la saturation des axes autoroutiers ou ferroviaires terrestres. De même, la poldérisation
permet un gain d’espace parfois important comme à Singapour qui a fortement
augmenté sa superficie. Manquant de terrains disponibles, la construction de
quais a été la clé du succès de ce micro-Etat parfaitement situé le long de la
route maritime la plus fréquentée du monde, du Moyen-Orient à l’Asie de l’Est.
A cette
logique commerciale, s’ajoute une logique économique.
En effet, de
nombreux Etats au cœur de la mondialisation bordent cet axe : depuis
la réussite du modèle japonais (marqué par une littoralisation des activités
industrielles) et une extraversion de l’économie (essor des firmes
exportatrices), la plupart des pays d’Asie de l’Est et maintenant de toute
l’Asie ont développé des politiques économiques d’insertion à la
mondialisation. De la Corée du Sud à l’Inde, de nombreux Etats asiatiques
portent un intérêt majeur à la territorialisation car leurs façades maritimes
concentrent une partie importante de leurs industries, de leurs métropoles et
donc de leurs richesses. Assez littorale, la mégalopole japonaise regroupe plus
de 100 millions d’habitants, soit les 80% de la population du pays. L’intérêt
est aussi mondial : les consommateurs du monde entier, et Occidentaux en
particulier, profitent beaucoup des produits asiatiques peu chers.
Or, la
logique de croissance industrielle et de consommation de masse a impliqué un
épuisement des ressources terrestres, d’où la nécessité d’en rechercher de
nouvelles en mers ; pour l’instant, il s’agit de deux types de
produits : les hydrocarbures en off-shore et le poisson. Depuis quelques
années, on assiste à l’essor de champs éoliens marins : les hydroliennes
semblent vouées à un essor important. Plus tard, l’exploitation de nodules
polymétalliques devrait être possible et rentable. Cette recherche de nouvelles
ressources est particulièrement forte en Asie en raison des besoins énormes des
puissances émergentes : la Chine, mais aussi les « nine eleven »
comme l’Indonésie déjà peuplée de 250 millions d’habitants. La Chine importe
aujourd’hui près de 40% de certains minerais vendus dans le monde. Il est donc
logique que les Etats qui ont des littoraux souhaitent s’approprier les espaces
maritimes tels que la mer de Chine méridionale, par exemple, qui possède des
ressources pétrolières et halieutiques.
C’est cette
double logique (économique et commerciale) qui pousse à une logique
juridique de souveraineté des Etats sur les espaces maritimes. La
conférence de Montego Bay reconnait 5 espaces maritimes : les eaux
intérieures et la mer territoriale, où l’autorité de l’Etat est totale ;
la Z.E.E. (jusqu’à 200 milles) et son prolongement éventuel, le plateau
continental (jusqu’à 400 milles) ; enfin la haute mer, dont les fonds sont
gérés par une Autorité internationale, créée en 1994 et localisée à Kingston.
La totalité des Z.E.E. recouvre le tiers de la surface des mers, mais en Asie,
l’existence de plusieurs états insulaires (Indonésie, Philippines, Japon,
Taïwan…) implique une forte présence étatique au sein des espaces maritimes, en
particulier sur la façade pacifique. Au contraire, pour l’Inde, Etat-continent
au littoral étendu, le nouveau droit international permet une formidable
extension des espaces maritimes où elle peut exercer sa souveraineté ; en
effet, à l’exception du Sri Lanka, rien de freine la délimitation d’une Z.E.E.
maximale.
Ainsi, la
territorialisation est une émanation de la mondialisation. La conférence de
Montego Bay est la conséquence d’une demande d’Etats qui sont en concurrence.
*
En
effet, si la territorialisation
représente un atout extraordinaire grâce aux ressources et aux enjeux
commerciaux, parfois, comme en mer de Chine, cette concentration d’Etats et
d’îles rend complexe le découpage des Z.E.E. et implique de nombreux litiges,
d’où des différends, risques potentiels de conflits et ce d’autant plus que les
Etats ayant les plus grandes superficies de Z.E.E. sont les Etats-Unis et la France.
Leur possession d’îles leur permet de demander l’extension de leurs espaces
maritimes.
Lorsqu’un
archipel comme les Spratley, se situe à égale distance de plusieurs Etats la
situation est compliquée : la Chine, le Vietnam, la Malaisie, les
Philippines et le Brunei revendiquent cet archipel !
Les
conflits éventuels sont d’autant plus plausibles que l’Asie est un continent où
certains aspects de la Guerre froide y subsistent encore. Il s’agit pour
l’essentiel de deux cas : d’une part, l’opposition des deux Corée et,
d’autre part, Taïwan. La Corée du Nord reste en effet le dernier régime
qualifié de stalinien : dirigé par Kim-Jon-Un, petit-fils du fondateur de
la Corée communiste, le pays dispose de l’arme nucléaire qu’il menace
fréquemment d’utiliser contre certains pays tels que le Japon. Ces dernières
années, une île sud-coréenne, située sur une zone revendiquée par la Corée du
Nord, a été l’objet de bombardements qui ont provoqué quelques morts. Si la
question de Taïwan est moins meurtrière, elle n’en n’est pas moins
conflictuelle : depuis la fuite des troupes de Jiang Jieshi en 1949 dans
cette île, le Parti communiste chinois la considère comme faisant partie
intégrante du territoire chinois. Or, le régime taïwanais est sous la
protection de la marine étatsunienne. Les incidents sont donc fréquents :
on dénombre trois crises de Taïwan dont la dernière dans les années 1990. Nous
savons qu’un parti indépendantiste a été au pouvoir récemment et que le P.C.C.
considérera toute proclamation d’indépendance comme « casus belli ».
Les
différends sont parfois plus anciens et liés aux rancoeurs nationalistes
liés à l’époque de l’expansionnisme japonais (fin du XIXème siècle). C’est
le cas de Taïwan qui a été pris par les Japonais à la Chine en 1895 ainsi que
la Corée qui a été occupé un peu plus tard et surtout du territoire continental
chinois qui a été occupé de manière violente comme lors du massacre de
Nankin en 1937. Les « remords » de l’ancien Premier ministre Koizumi
n’ont pas suffit, surtout en raison de sa visite au sanctuaire où résident les
grands militaires japonais qui ont justifié ces offensives. Ainsi, ces
animosités nationalistes débouchent fréquemment sur des crises. L’archipel des
Senkaku-Diayo cristallisent le problème sino-japonais. Occupé par les
Etats-Unis jusqu’en 1972, elles sont redevenues japonaises ensuite… mais elles
appartenaient auparavant à la Chine qui, depuis peu, revendique la
souveraineté. Lors du printemps 2014, le P.C.C. a proclamé de manière
unilatérale le contrôle aérien au-dessus de ces îles riches en poissons et en
hydrocarbures. Mais ici, l’enjeu est politique. Face à des mécontentements
croissants liés aux inégalités croissantes, à la pollution ou à la pollution,
le P.C.C. instrumentalise le sentiment anti-japonais des Chinois en se
focalisant sur la revendication d’îles telles que les Senkaku… éternelle tactique
politique populiste qui consiste à externaliser un problème interne. En
2012, des magasins japonais ont été saccagés et il semble aussi que les ventes
des véhicules japonais aient moins progressé sur le marché chinois.
L’inquiétude
gagne aussi l’Asie du Sud où les populations et les élites indiennes ont le
sentiment d’encerclement face au « collier de perles ». Du
Cambodge à l’Iran, le P.C.C. développe en effet une série d’accords afin
d’obtenir des facilités portuaires pour les navires civils et militaires
chinois. L’objectif est de sécuriser la route des hydrocarbures, mais il
illustrer l’essor des ambitions et donc du budget militaire chinois qui est
désormais le second mondial, derrière les Etats-Unis.
Tout cela
est anxiogène pour les peuples et dirigeants dont certains, déjà alliés depuis
la Guerre froide avec les Etats-Unis, réclament une aide supplémentaire de leur
part. La politique dite du « pivot », c’est-à-dire de réorientation
des forces militaires étatsuniennes de l’Europe (où la menace soviétique a disparu)
vers l’Asie, est bien une réponse à l’offensive récente de la Chine qui semble
vouloir devenir une grande puissance régionale asiatique. Ainsi, 8 des 10
premiers clients des ventes militaires étatsuniennes sont Asiatiques et le
premier est la Corée du Sud. Les achats cumulés de celle-ci, de Singapour et du
Japon atteignent 8 milliards de dollars ces dernières années. Par ailleurs,
l’Inde a en projet d’avoir plusieurs porte-avions. L’Asie est donc clairement
lancer dans une course aux armements. L’économiste de l’I.F.R.I., Françoise
Nicolas compare cette situation d’une interdépendance économique et commerciale
et d’alliances militaires de l’Asie actuelle à celle de l’Europe de 1913.
La menace
n’est pas seulement étatique ; elle peut aussi venir de populations
pauvres qui cherchent un butin facile en profitant de la faible protection au
sein des navires ainsi que de multitude d’îlots non peuplés où se cacher :
c’est ainsi que le détroit de Malacca et les côtes somaliennes sont des hauts
lieux de piraterie. Les pirates profitent aussi de la proximité d’eaux
internationales où ils peuvent éviter les polices ou douanes nationales.
Un dernier
problème s’ajoute : il s’agit des risques environnementaux liés au
modèle de croissance de masse qui
concentre hommes et activités sur les littoraux. La pollution des navires par
dégazage de leurs soutes ou bien l’utilisation massive de sable pour construire
des polders en sont deux exemples connus. Le continent plastique, évoqué par
Jean-Christophe Victor dans son émission « le dessous des cartes » l’est
un peu moins. La concentration de sacs poubelles et autres déchets plastiques
s’accumulent dans une partie centrale de l’Océan Pacifique sur une distance de
plusieurs centaines de km et une épaisseur de plusieurs mètres. Toute
récupération de fines particules est très complexe.
*
Cette
situation est évidemment une catastrophe pour la faune et pose la question
d’une gestion internationale de ces déchets situés en eaux internationales sans
propriétaire étatique… Face à de tels problèmes et différents dont certains
peuvent déboucher sur des conflits, la solution ne peut venir que d’une volonté
des différents acteurs politiques asiatiques à se mettre d’accord, soit par la
menace américaine, soit par une coopération régionale ou transrégionale.
Seuls les
Etats-Unis ont la capacité militaire de freiner l’expansionnisme militaire de
la Chine. L’augmentation du nombre de soldats (comme à Singapour, par exemple) est
bien une réponse militaire qui vise à persuader les autorités chinoises d’aller
trop loin. La « green line » et surtout la « blue line »,
présentées par la revue Diplomatie, montrent de manière précise les velléités
militaires chinoises qui entrent en totale opposition avec la réalité politique
et militaire actuelle de l’Asie de l’Est. Ces lignes illustrent peut-être
l’espoir du P.C.C d’un retrait militaire américain, signe d’un vide
géopolitique qu’il serait prêt à combler. La perspective d’un arrêt de l’aide
américaine à certaines îles du pacifique explique les investissements récents
chinois qui visent à étendre l’influence de la chine au détriment des Etats-Unis.
Mais, le voisin vietnamien, pourtant anti-américain de part son histoire, a
donné une facilité portuaire à la marine étatsunienne.
Cependant,
l’usage de la menace s’accompagne souvent de celui de la diplomatie. Le P.C.C.
demande une souveraineté maritime très étendue peut-être pour obtenir
simplement la possession de Taïwan et l’acceptation par la communauté
internationale de l’occupation du Tibet. La tactique d’une demande forte et
menaçante pour obtenir le but recherché est connue et classique lors de toute
négociation. La « pax
americana » de la fin du XXème siècle peut éventuellement être suivie par
un G2 sino-étatsunien où Etats-Unis et Chine exercerait une autorité équilibrée
sur le monde. Cependant, vu l’absence de toute action diplomatique chinoise à
l’O.N.U. d’août à octobre 2012, cette hypothèse semble peu crédible. Mais la
Chine a-t-elle intérêt à provoquer un conflit ? Selon le géographe français
Thierry Sanjuan, la Chine est « contrainte à la puissance » et n’est
donc pas prête à assumer un rôle international. L’armée chinoise ne semble pas
encore au niveau de celle des Occidentaux. Est-elle aussi prête à affronter les
pays adversaires qui s’équipent aussi. De même, l’Inde qui a déjà perdu un
conflit face à ce pays est-elle à nouveau prête à une nouvelle guerre ?
En effet,
l’Asie est aussi un continent plein de coopérations : l’Association
des Etats du Sud-Est Asiatique (A.S.E.A.N.), né en 1964 et qualifié aussi par
Vincent Thébault, géographe toulousain, de « circuit intégré asiatique » illustre bien l’importance des
flux inter-firmes et donc de l’intégration régionale croissante. Après
l’Europe, l’Asie de l’Est et du Sud-Est est la seconde région du monde au
niveau de ses échanges intra-régionaux : hommes (diaspora chinoise,
indiennes…), capitaux, produits, idées circulent énormément. Par exemple, le
sous-traitant taïwanais d’Apple, Foxconn, a la plupart de ses usines en Chine. Tout
conflit remettrait en question son activité et la prospérité régionale… mais
aussi mondiale (puisque les Ipod ou Ipad sont vendus dans le monde entier). L’interdépendance
concerne aussi la Chine et les Etats-Unis. Toute chute de la consommation américaine
(ou européenne) entraîne celle de la production industrielle de la Chine. Le
Forum de l’A.P.E.C., réuni à Singapour en 2009, exprime bien cette idée dans sa
déclaration finale : « Les
membres de l’A.P.E.C. doivent forger un partenariat fondé sur l’intérêt commun
de produire une croissance forte, équilibrée et durable ». De manière
réaliste, la piraterie développée dans le détroit de Malacca a fortement baissé
grâce à une coopération des polices de différents pays (Singapour, Malaisie,
Japon). De même, la marine chinoise participe à la lutte contre la piraterie
somalienne, en collaboration avec de nombreuses marines du monde entier, en
particulier celle de l’Union européenne (opération Atalante) et celle des
Etats-Unis ou même du Japon !
La coopération
est aussi une solution à l’éventuelle saturation des routes maritimes
asiatiques. Le trafic est en effet très intense : 200 navires par jour
dans le détroit de Malacca, soit un toutes les 7 mn ! Le désenclavement
actuel de l’Asie centrale permet la construction d’un vrai pont
intercontinental qui relie l’Europe à l’Asie plus rapidement (7 jours pour des
trains de la compagnie Deutsche Bahn). C’est peut-être la revanche de la
vieille route de la soie. De même, le géographe canadien Frédéric Lasserre a
montrée que le dégèlement des mers froides russes permettait d’envisager la
perspective d’une nouvelle route commerciale qui passerait par le Nord ; autant de possibilités maritimes qui obligent
les différents gouvernements à discuter
et à élaborer des solutions négociées. Enfin, la relance récente de
l’O.M.C., présidé par son nouveau directeur brésilien, Roberto Azevedo qui a
œuvré pour un nouvel accord-cadre, laisse présager un certain espoir sur les
perspectives pacifiques du XXIème siècle. L’interdépendance des grandes
puissances est si forte qu’aucune n’a intérêt à déclencher des hostilités,
signes d’arrêt des échanges ou d’embargo.
***
Ainsi, la territorialisation des espaces
maritimes, phénomène contemporain majeur est bien à la fois un atout et une
source de risques. L’interdépendance croissante des économies asiatiques et
mondiales rendent la perspective d’un conflit d’origine éventuellement maritime
difficile, mais non impossible. Mais il est certain que l’essor des espaces
maritimes est compatible et même une réponse à la mondialisation. Territorialisation
et mondialisation sont intimement liées. La seule véritable incertitude concerne
l’attitude de la Chine face à la politique de « pivot » des
Etats-Unis qui restent la première puissance navale mondiale.
Plus que jamais Si Walter Raleigh, navigateur anglais
du XVIème siècle semble avoir raison « Qui
tient la mer tient le commerce du monde ; qui tient le commerce tient la
richesse ; qui tient la richesse tient le monde ». Ainsi, tout
déclin américain important serait facteur de vide géopolitique en Asie et donc d’instabilité…
3ème sujet sur l'Asie proposé par Alain Joyeux dans un de ses ouvrages méthodologiques :
Depuis le début des années 1980, dans quelle mesure le
Japon, la Chine et l’Inde établissent-ils un nouvel équilibre des puissances en
Asie méridionale et orientale ?
Corrigé d'Alain Joyeux :
Croquis de Serge Boyer(sans nomenclature mais qui montre le supercomplexe tripolaire)
Sujet sur l'AFRIQUE :
Dissertation
L'Afrique sort-elle de sa situation de périphérie sous-développée du monde ?
Origine du sujet : Alain Joyeux (prépa Joffre à Montpellier)
Piège du sujet = ne voir dans ce sujet que les aspects géo-économiques et oublier la géopolitique (voir la problématique)
Détails du corrigé :