Antonio Guterres : « Un monde plus chaotique a besoin d’institutions multilatérales fortes »
Le
nouveau secrétaire général de l’ONU regrette que l’Europe n’ait pas
mieux géré la crise des réfugiés en investissant davantage pour créer
des conditions adéquates d’accueil.
LE MONDE
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Propos recueillis par Paolo Mastrolilli (La Stampa),
Matthias Kolb (Süddeutsche Zeitung),
Julian Borger (The Guardian) et
Gilles Paris (Washington, correspondant)
Ancien premier ministre du Portugal (1995-2002) et ancien responsable
du haut comité des Nations unies chargé des réfugiés (2005-2015),
Antonio Guterres a pris ses fonctions de secrétaire général des Nations
unies le 1er janvier, quelques jours avant la prestation de
serment d’un président des Etats-Unis, Donald Trump, qui s’est
ouvertement interrogé sur l’utilité de l’institution.Alors que la presse américaine a fait état d’un projet prévoyant une baisse drastique de la contribution américaine, ce qui mettrait en péril le fonctionnement de l’ONU, The Guardian, Le Monde, La Stampa et la Süddeutsche Zeitung ont rencontré M. Guterres. Ce dernier est convaincu que l’incertitude liée à l’émergence d’un monde multipolaire rend indispensables les institutions multilatérales.
Une nouvelle administration s’est installée aux
Etats-Unis et un projet de décret du président Donald Trump évoque une
réduction de 40 % du financement américain des organisations
internationales. La nouvelle ambassadrice aux Nations unies, Nikki
Haley, vous a-t-elle confirmé ces chiffres ?
Tout d’abord, rien n’a été décidé. Il n’y a que des projets publiés
dans la presse. Ma position est très claire : je ne réponds jamais à des
choses qui n’existent pas, parce que si vous répondez à des choses qui
n’existent pas, vous pouvez créer les conditions de leur existence.
Vous avez eu des réunions avec Mme Haley. Les Etats-Unis ont-ils garanti leur engagement budgétaire ?
La seule chose que je peux dire, c’est que nos réunions ont été extrêmement constructives.
Avez-vous déjà mentionné la question des missions de
maintien de la paix [dont les Etats-Unis critiquent le coût] ? Vous
avez déjà indiqué que vous êtes prêt à l’examiner.
Nous avons un problème central. Ces opérations ont été prévues pour
maintenir la paix, ce qui signifie qu’elles reposent à la base sur un
accord politique conclu entre les parties en conflit, et qu’il est
nécessaire d’aider à stabiliser un pays et créer des conditions pour que
l’accord politique permette de conduire à un développement normal de ce
pays. Mais nous avons de plus en plus d’opérations de maintien de la
paix où il n’y a pas, en fait, de paix à préserver, ce qui a produit un
certain nombre de situations alternatives.« Il doit y avoir une analyse en profondeur de l’avenir des opérations de paix »