Sortie du Grand dossier n°36 de la revue Diplomatie consacrée à l'Union européenne
Voici sa couverture et le sommaire. Prix 10 euros 95
Très utile et riche.
Auteur : Serge Boyer, professeur agrégé d'histoire-géographie ; activités : IUFM, auteur de manuels scolaires, d'articles dans la revue "Espace Prépas" ; participat° aux jurys de CAPES, ECRICOME, TBS et GEM ; en CPGE dep 2009. Auteur du manuel de 1ère année sorti en mai 2017 (Studyrama) et réédité en 2021 comme le Dictionnaire Illustré ainsi que de deux manuels de commentaires de cartes (épreuve Ecricome). Chargé de cours à la TSE et de TD à l'Université J.Jaurès.
ONGLET GENERAL
- PROGRESSION
- Tableau DD TR
- DM
- CORRIGE DE DS
- METHODE
- Nouvelle Epreuve GEM
- ECRICOME : analyse de carte
- PUISSANCES
- BIOGRAPHIES
- OCEANS
- CPI
- DEMOCRATIE
- THEORIES AUTEURS
- Les mots du POPULISME
- CROQUIS : conseils et exemples
- DD Singapour
- Asie TR
- Asie DD
- Doc INDE
- Doc CHINE
- Doc JAPON
- AUTOMOBILE
- SCENARIOS
- Mots des VILLES
- RUSSIE
- 100 MOTS CLES du Moy-Orient
- DD Moy-Or-Afr Nd
- TR Moy-Or-Afr Nd
- SCHEMAS
- TR Am latine
- TR Etats-Unis
- DD Etats-Unis
- DD Brésil
- Doc Etats-Unis
- Trame de fond AFR
- France-Afrique
- Doc Afrique
- DD Rwanda
- TR Afrique
- Doc EUR : ex de la POLOGNE et UKRAINE
- L'UE, antiempire ?
- Trame de fond Europe
- Europe DD
jeudi 29 décembre 2016
dimanche 18 décembre 2016
info média : documentaire sur Poutine
Sur France 2 documentaire très intéressant sur Poutine avec des intervenants majeurs tels que Hélène Carrère d'Encausse ou Hubert Védrine.
A voir en replay jusqu'à la semaine prochaine car il explique en profondeur le durcissement de la politique russe vis-à-vis des puissance occidentales
A voir en replay jusqu'à la semaine prochaine car il explique en profondeur le durcissement de la politique russe vis-à-vis des puissance occidentales
mercredi 14 décembre 2016
La crise syrienne en 5 dates (source : La tribune)
Des révoltes populaires aux bombardements d'Alep, la tragédie syrienne en cinq dates
Alep, symbole de la rébellion syrienne est en train de
tomber sous les bombardements de l'aviation russe et syrienne ainsi que
les assauts de multiples milices et groupes armés. Selon l'historien
spécialiste du Moyen-Orient Jean-Pierre Filiu, Daech serait le grand
vainqueur de cette bataille bien plus que Bachar-el Assad comme il l'explique sur son blog hébergé par le Monde :
Des manifestants d'origine kurde protestent contre le président Bashar al-Assad dans la ville de Qamishli, le 15 avril 2011. Crédits : Ho New/Reuters
A la suite des printemps arabes survenus notamment en Tunisie en Libye et en Egypte, des manifestations et révoltes éclatent à Damas. Des adolescents accusés d'écrire des slogans contre le régime dans la ville de Deraa sont arrêtés et torturés. Ces pratiques ont provoqué des vagues d'indignation dans tout le pays. C'est le moment du "printemps syrien", mais les soulèvements populaires vont rapidement être réprimés par les forces de l'ordre qui tirent à balle réelle. Assad propose alors une série de mesures afin d'apaiser les manifestants comme la création de partis politiques et une possible fin de l'état d'urgence en place depuis 48 ans. Un mois plus tard les manifestations se multiplient et la répression grandit. Des centaines de personnes sont tuées lors du "vendredi sanglant".
Des membres de l'armée syrienne libre à Alep en Syrie en août 2013 vont bientôt être concurrencés par des groupes islamistes. Crédits : Molhem Barakat/Reuters
Deux groupes islamistes vont rapidement émerger dans le conflit syrien. Il s'agit du Front Al-Nosra lié à Al-Qaida et qui était prêt à collaborer avec l'opposition syrienne et l'Etat islamique, un groupe né d'une scission avec Al-Qaida. Ces deux mouvances vont concurrencer l'Armée syrienne libre qui va servir de réservoir de recrutement pour les groupes djihadistes.
Des membres de l'ONU ont accompagné une équipe de l'organisation internationale pour la lutte contre les armes chimiques lors de leur visite à Damas le 8 octobre 2013. Crédits : Khaled Al Hariri/Reuters
La Syrie est accusée d'avoir utilisé du gaz sarin le 21 août contre les forces rebelles dans la banlieue de Damas. Les attaques chimiques provoquent la mort de plusieurs centaines de civils. Pendant plusieurs mois, le gouvernement syrien va démentir être responsable de ces morts tandis que les preuves vont s'accumuler contre le régime.
Abou Bakr al-Baghdadi le 5 juillet 2014 dans une mosquée de Mossoul quelques jours après la proclamation du califat. Crédits : Reuters TV
Les djihadistes de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) engagés dans les combats en Irak et en Syrie annoncent le rétablissement du califat. Un porte-parole de l'EIIL a déclaré que le califat était "le rêve de tout musulman" et "le souhait de tout djihadiste". Cette annonce "est le développement le plus important dans le djihad international depuis le 11 septembre" a affirmé au Monde Charles Lister, chercheur associé à Brookings Doha. Abou Bakr al-Baghdadi prend la tête du califat. La campagne de propagande et de recrutement sur les réseaux sociaux fait venir des jeunes du monde entier venus renforcer les rangs du mouvement.
Un avion Soukhoï frappant une position ennemie en Syrie en octobre 2015. Crédits : ministère de la Défense russe/Wikimedia Commons/CC
La Russie a annoncé officiellement sa campagne militaire en Syrie en effectuant ses premiers bombardements. Selon les autorités russes, les bombes auraient été larguées sur "des équipements militaires" et "des stocks d'armes et de munitions" de l'Etat islamique. Mais rapidement, les cibles annoncées par le Kremlin ont été remises en cause par les Etats-Unis et la France. Par ailleurs, l'ancien secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon a également critiqué le bombardement aérien de convois humanitaires composés des Nations-unies et du Croissant-Rouge arabe syrien.
"C'est l'organisation d'Abou Bakr al-Baghdadi (ndlr : le chef du groupe Etat islamique) qui apparaît comme le principal vainqueur de la bataille d'Alep. On ne rappellera jamais assez que Daech avait été expulsé de la deuxième ville de Syrie, en janvier 2014, par ces mêmes forces révolutionnaires contre lesquelles la dictature syrienne s'est acharnée. Je le répète au risque de lasser : c'est contre une cité libérée de Daech depuis près de trois ans que le régime Assad, la Russie et l'Iran ont mené la campagne la plus meurtrière du conflit syrien."Ces derniers épisodes marquent un tournant dans cette crise qui dure depuis des années.
Mars 2011 : l'heure du printemps syrien
Des manifestants d'origine kurde protestent contre le président Bashar al-Assad dans la ville de Qamishli, le 15 avril 2011. Crédits : Ho New/Reuters
A la suite des printemps arabes survenus notamment en Tunisie en Libye et en Egypte, des manifestations et révoltes éclatent à Damas. Des adolescents accusés d'écrire des slogans contre le régime dans la ville de Deraa sont arrêtés et torturés. Ces pratiques ont provoqué des vagues d'indignation dans tout le pays. C'est le moment du "printemps syrien", mais les soulèvements populaires vont rapidement être réprimés par les forces de l'ordre qui tirent à balle réelle. Assad propose alors une série de mesures afin d'apaiser les manifestants comme la création de partis politiques et une possible fin de l'état d'urgence en place depuis 48 ans. Un mois plus tard les manifestations se multiplient et la répression grandit. Des centaines de personnes sont tuées lors du "vendredi sanglant".
Février 2012 à mai 2013 : des groupes djihadistes préparent le terrain pour Daech
Des membres de l'armée syrienne libre à Alep en Syrie en août 2013 vont bientôt être concurrencés par des groupes islamistes. Crédits : Molhem Barakat/Reuters
Deux groupes islamistes vont rapidement émerger dans le conflit syrien. Il s'agit du Front Al-Nosra lié à Al-Qaida et qui était prêt à collaborer avec l'opposition syrienne et l'Etat islamique, un groupe né d'une scission avec Al-Qaida. Ces deux mouvances vont concurrencer l'Armée syrienne libre qui va servir de réservoir de recrutement pour les groupes djihadistes.
Août 2013 : des armes chimiques contre les civils
Des membres de l'ONU ont accompagné une équipe de l'organisation internationale pour la lutte contre les armes chimiques lors de leur visite à Damas le 8 octobre 2013. Crédits : Khaled Al Hariri/Reuters
La Syrie est accusée d'avoir utilisé du gaz sarin le 21 août contre les forces rebelles dans la banlieue de Damas. Les attaques chimiques provoquent la mort de plusieurs centaines de civils. Pendant plusieurs mois, le gouvernement syrien va démentir être responsable de ces morts tandis que les preuves vont s'accumuler contre le régime.
Juin 2014 : proclamation du califat
Abou Bakr al-Baghdadi le 5 juillet 2014 dans une mosquée de Mossoul quelques jours après la proclamation du califat. Crédits : Reuters TV
Les djihadistes de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) engagés dans les combats en Irak et en Syrie annoncent le rétablissement du califat. Un porte-parole de l'EIIL a déclaré que le califat était "le rêve de tout musulman" et "le souhait de tout djihadiste". Cette annonce "est le développement le plus important dans le djihad international depuis le 11 septembre" a affirmé au Monde Charles Lister, chercheur associé à Brookings Doha. Abou Bakr al-Baghdadi prend la tête du califat. La campagne de propagande et de recrutement sur les réseaux sociaux fait venir des jeunes du monde entier venus renforcer les rangs du mouvement.
Septembre 2015 : l'entrée en guerre de la Russie
Un avion Soukhoï frappant une position ennemie en Syrie en octobre 2015. Crédits : ministère de la Défense russe/Wikimedia Commons/CC
La Russie a annoncé officiellement sa campagne militaire en Syrie en effectuant ses premiers bombardements. Selon les autorités russes, les bombes auraient été larguées sur "des équipements militaires" et "des stocks d'armes et de munitions" de l'Etat islamique. Mais rapidement, les cibles annoncées par le Kremlin ont été remises en cause par les Etats-Unis et la France. Par ailleurs, l'ancien secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon a également critiqué le bombardement aérien de convois humanitaires composés des Nations-unies et du Croissant-Rouge arabe syrien.
dimanche 4 décembre 2016
Taïwan entre Pékin et Washington
Diplomatie. Taïwan refuse d’être un pion entre les États-Unis et Pékin
Publié le
Le
président élu Donald Trump a rompu avec un statu quo de près de 40 ans
en prenant la présidente taïwanaise au téléphone. Pékin proteste,
Washington tempère et Taïwan s’inquiète.
Le vendredi 2 décembre, Donald Trump a répondu à un appel téléphonique de la présidente de Taïwan Tsai Ing-wen vendredi soir au téléphone. Celle-ci l’appelait pour le féliciter de son élection.
Un coup de fil qui n’a rien de banal, car aucune relation diplomatique n’a officiellement plus cours entre Taipei et Washington depuis que les États-Unis ont décidé en 1978 de reconnaître Pékin.
Et il n’a pas fallu longtemps pour que la Chine réagisse, de façon démonstrative, à cette conversation. Le ministre des Affaires étrangères Wang Yi, s’adressant à des journalistes en marge d’une conférence sur la diplomatie chinoise, a reporté la faute sur Taïwan.
“Il ne s’agit que d’une petite gesticulation de la part de Taïwan, cela ne peut absolument pas modifier la situation affirmée de la Chine au sein de la communauté internationale. Nous considérons que cela ne peut pas non plus changer la politique américaine de la Chine qui a été maintenue depuis des années. Le principe d’une seule Chine’ est la base de relations sino-américaines saines, et nous n’espérons pas voir ces bases le moins du monde mises en cause et encore moins endommagées”, a-t-il déclaré, selon le portail d’information Sina.com.
Auparavant, le porte-parole du ministère chinois avait indiqué que celui-ci avait protesté solennellement auprès de Washington. Pékin a également diffusé les déclarations de la Maison-Blanche affirmant que la politique américaine vis-à-vis de la Chine n’avait pas changé.
Dans l’un des rares éditoriaux chinois publié samedi 3 décembre sur le sujet, le quotidien officiel Huanqiu Shibao, tout en protestant vigoureusement, minimise la portée de l’événement, estimant que “les États-Unis ne sont déjà plus un élément décisif dans la détermination de la situation dans les eaux taïwanaises”.
“Nous comprenons que le gouvernement [de Taïwan] espère établir au plus vite des relations de proximité avec le nouveau gouvernement américain ; mais pourquoi Trump a-t-il délibérément ignoré la politique consistant depuis 1978 à considérer qu’il n’y a qu’une seule Chine’, et parlé avec la présidente Tsai ?” écrit Yen Chenshen, chercheur en relations internationales de l’université Chengchi de Taïwan, sur le site du quotidien taïwanais Chungkuo Shihpao.
“Nous ne pouvons le croire”, tranche l’auteur. Pour lui, Trump, fort de sa victoire au style populiste, a estimé que son élection lui donne le droit de bousculer jusqu’aux consensus diplomatiques traditionnels des États-Unis. Trump croit peut-être que l’imprévisibilité peut être un atout pour l’Amérique. “Mais ce style n’est bon que pour un pays faible comme la Corée du Nord”.
Et de conclure : “Ce que nous craignons le plus, c’est d’être pris comme un pion dans la négociation commerciale de Trump avec la Chine”, comme un argument pour réduire le déficit de la balance commerciale.
Un coup de fil qui n’a rien de banal, car aucune relation diplomatique n’a officiellement plus cours entre Taipei et Washington depuis que les États-Unis ont décidé en 1978 de reconnaître Pékin.
Et il n’a pas fallu longtemps pour que la Chine réagisse, de façon démonstrative, à cette conversation. Le ministre des Affaires étrangères Wang Yi, s’adressant à des journalistes en marge d’une conférence sur la diplomatie chinoise, a reporté la faute sur Taïwan.
“Il ne s’agit que d’une petite gesticulation de la part de Taïwan, cela ne peut absolument pas modifier la situation affirmée de la Chine au sein de la communauté internationale. Nous considérons que cela ne peut pas non plus changer la politique américaine de la Chine qui a été maintenue depuis des années. Le principe d’une seule Chine’ est la base de relations sino-américaines saines, et nous n’espérons pas voir ces bases le moins du monde mises en cause et encore moins endommagées”, a-t-il déclaré, selon le portail d’information Sina.com.
Auparavant, le porte-parole du ministère chinois avait indiqué que celui-ci avait protesté solennellement auprès de Washington. Pékin a également diffusé les déclarations de la Maison-Blanche affirmant que la politique américaine vis-à-vis de la Chine n’avait pas changé.
Dans l’un des rares éditoriaux chinois publié samedi 3 décembre sur le sujet, le quotidien officiel Huanqiu Shibao, tout en protestant vigoureusement, minimise la portée de l’événement, estimant que “les États-Unis ne sont déjà plus un élément décisif dans la détermination de la situation dans les eaux taïwanaises”.
Véritable ignorance ?
À Taïwan, l’événement est pris avec circonspection, voire avec inquiétude. Car tout changement dans la politique américaine pourrait mettre un péril le statu quo qui voit l’île s’administrer de facto sans intervention de Pékin. La Chine, de son côté, affirme ne considérer ce territoire que comme l’une de ses provinces.“Nous comprenons que le gouvernement [de Taïwan] espère établir au plus vite des relations de proximité avec le nouveau gouvernement américain ; mais pourquoi Trump a-t-il délibérément ignoré la politique consistant depuis 1978 à considérer qu’il n’y a qu’une seule Chine’, et parlé avec la présidente Tsai ?” écrit Yen Chenshen, chercheur en relations internationales de l’université Chengchi de Taïwan, sur le site du quotidien taïwanais Chungkuo Shihpao.
Ou feinte pour mieux négocier ?
Le chercheur repousse l’idée que Donald Trump ait agi par ignorance. “Trump a pu estimer qu’une conversation téléphonique avec Tsai se passerait comme une conversation d’affaires (Taïwan achetant pour des dizaines millions de dollars d’armement aux États-Unis). Mais il a manqué de sens diplomatique. Washington a besoin de parler avec Pékin dans de nombreux dossiers internationaux. Trump a-t-il rompu un équilibre diplomatique fondamental par simple méconnaissance de la complexité des relations internationales ?”“Nous ne pouvons le croire”, tranche l’auteur. Pour lui, Trump, fort de sa victoire au style populiste, a estimé que son élection lui donne le droit de bousculer jusqu’aux consensus diplomatiques traditionnels des États-Unis. Trump croit peut-être que l’imprévisibilité peut être un atout pour l’Amérique. “Mais ce style n’est bon que pour un pays faible comme la Corée du Nord”.
Et de conclure : “Ce que nous craignons le plus, c’est d’être pris comme un pion dans la négociation commerciale de Trump avec la Chine”, comme un argument pour réduire le déficit de la balance commerciale.
mardi 29 novembre 2016
Etats-Unis : 2 modèles opposés dans la question de la prison
Leader mondial de détenus, les Etats-Unis sont considérés par Michel Floquet comme la "plus grande prison du monde" (voir iTR 127 sur le blog). L'Irlande, comme d'autres pays , propose une alternative à un système qui devient un échec (comme en France). Voici un article du site Mediapart (payant) que je découvre dans le cadre d'une promotion et qui concerne un domaine qui m'intéresse comme citoyen et en tant qu'enseignant ayant travaillé 9 ans en prison de 1993 à 2002.
Irlande: quand le plaidoyer pour la décroissance carcérale paie
- 28 nov. 2016
- Par Observatoire international des prisons - section française
- Blog : Dedans-Dehors
Alors que les prisons du pays étaient marquées par la
surpopulation en 2010, l’Irlande est parvenue à réduire de près de vingt
points son taux de détention en six ans, et comptait moins de 80
détenus pour 100 000 habitants au 1er août 2016 *. Le résultat d’un
travail de plaidoyer intensif.
Entretien avec Deirdre Malone, directrice de
l’Irish penal reform trust, ONG oeuvrant pour la protection des droits
de l’homme en prison et la promotion de réformes progressistes,
recueilli par Laure Anelli
Deirdre Malone : Le Gouvernement comme les médias pensaient que la résolution de ce problème ne pouvait passer que par la construction de davantage de prisons. Nous avons donc travaillé à démontrer en quoi c’était réellement une mauvaise idée, en expliquant qu’accroître la taille et le nombre de prisons ne ferait pas diminuer le nombre de crimes et délits, et aurait pour seule conséquence d’augmenter encore le nombre de prisonniers. Nous avons réalisé un gros travail de communication, lancé des pétitions, organisé des forums avec des experts internationaux et publié des tribunes dans les médias. Nous ne nous contentions pas de critiquer, mais fournissions des solutions alternatives. Nous nous sommes appuyés sur les résultats de la recherche pour détailler un certain nombre de propositions très concrètes, reposant sur des données scientifiquement établies, chiffrées.
Quand ce travail a-t-il commencé à payer ?
Le plus grand changement est survenu en 2013. Un groupe parlementaire composé de représentants de tous les partis politiques avait été constitué pour étudier le problème. Et nous avons obtenu l’approbation d’un certain nombre de nos recommandations, dont la plus importante : celle qui préconisait l’adoption d’une politique de désincarcération, c’est-à-dire visant à réduire le nombre de personnes détenues. Ce fut une
très grande victoire, car jusque-là, c’est à l’augmentation du taux de détention que se mesurait la réussite d’une politique pénale. Nous sommes parvenus à faire comprendre que mettre davantage de personnes en prison est plus un échec qu’un succès.
Quels types d’arguments aviez-vous mobilisés ?
Nous avons apporté la preuve que la prison produit ses propres maux ; qu’elle est destructrice, qu’elle brise les liens familiaux, la situation sociale et professionnelle des personnes, mais aussi leur santé. Nous avons milité pour d’autres façons de punir, mais aussi pour un plus fort investissement dans l’intervention précoce et dans la prévention de la délinquance, ces solutions étant bien plus profitables à la société. Le gros du travail a été de faire comprendre que la question n’est pas d’être « strict » ou « laxiste » en matière de délinquance, mais d’être efficace. L’argument économique est également entré en ligne de compte : dans un contexte de crise économique et d’austérité, le coût de la prison devenait de plus en plus difficile à défendre. C’est un argument auquel l’opinion publique comme les décideurs ont été sensibles.
Quels leviers ont effectivement permis de réduire la population carcérale ?
Le Gouvernement a introduit une réforme visant à encourager les juges à prononcer un travail d’intérêt général en alternative aux peines de prison de moins de un an. Désormais, le système des réductions de peine permet aussi aux détenus de sortir aux trois-quarts de leur peine.
Par ailleurs, s’ils participent à un programme structuré d’activités, et que les services du ministère considèrent qu’en conséquence ils présentent un moindre risque de récidive, les détenus peuvent être libérés à partir des deux-tiers de leur peine.
Au final, la combinaison de ces mesures a permis de passer de 4500 à 3700 détenus. C’est énorme pour un petit pays comme le nôtre, et cela semble s’être stabilisé depuis bientôt deux ans.
Estimez-vous le problème réglé aujourd’hui ?
Non, dans la mesure où certaines prisons continuent d’être surpeuplées. Nous plaidons en outre pour une refonte du système de libération conditionnelle. Les services qui en décident sont chapeautés par le ministère de la Justice : nous militons pour qu’ils deviennent réellement indépendants. De manière générale, nous restons particulièrement vigilants car le nouveau gouvernement est davantage conservateur que ceux de ces vingt dernières années. Nous maintenons la pression pour que les réformes se poursuivent.
Cet article est issu du n°93 de la revue trimestrielle Dedans-Dehors, éditée par l'Observatoire international des prisons. Pour consulter l'intégralité du dossier et vous abonner à la revue papier, c'est ici.
Une prison abandonée © Laurent Dubus
Les
prisons irlandaises étaient particulièrement surpeuplées en 2010.
Était-ce perçu comme un problème par le Gouvernement et l’opinion
publique et comment envisageait-on de le résoudre ?Deirdre Malone : Le Gouvernement comme les médias pensaient que la résolution de ce problème ne pouvait passer que par la construction de davantage de prisons. Nous avons donc travaillé à démontrer en quoi c’était réellement une mauvaise idée, en expliquant qu’accroître la taille et le nombre de prisons ne ferait pas diminuer le nombre de crimes et délits, et aurait pour seule conséquence d’augmenter encore le nombre de prisonniers. Nous avons réalisé un gros travail de communication, lancé des pétitions, organisé des forums avec des experts internationaux et publié des tribunes dans les médias. Nous ne nous contentions pas de critiquer, mais fournissions des solutions alternatives. Nous nous sommes appuyés sur les résultats de la recherche pour détailler un certain nombre de propositions très concrètes, reposant sur des données scientifiquement établies, chiffrées.
Quand ce travail a-t-il commencé à payer ?
Le plus grand changement est survenu en 2013. Un groupe parlementaire composé de représentants de tous les partis politiques avait été constitué pour étudier le problème. Et nous avons obtenu l’approbation d’un certain nombre de nos recommandations, dont la plus importante : celle qui préconisait l’adoption d’une politique de désincarcération, c’est-à-dire visant à réduire le nombre de personnes détenues. Ce fut une
très grande victoire, car jusque-là, c’est à l’augmentation du taux de détention que se mesurait la réussite d’une politique pénale. Nous sommes parvenus à faire comprendre que mettre davantage de personnes en prison est plus un échec qu’un succès.
Quels types d’arguments aviez-vous mobilisés ?
Nous avons apporté la preuve que la prison produit ses propres maux ; qu’elle est destructrice, qu’elle brise les liens familiaux, la situation sociale et professionnelle des personnes, mais aussi leur santé. Nous avons milité pour d’autres façons de punir, mais aussi pour un plus fort investissement dans l’intervention précoce et dans la prévention de la délinquance, ces solutions étant bien plus profitables à la société. Le gros du travail a été de faire comprendre que la question n’est pas d’être « strict » ou « laxiste » en matière de délinquance, mais d’être efficace. L’argument économique est également entré en ligne de compte : dans un contexte de crise économique et d’austérité, le coût de la prison devenait de plus en plus difficile à défendre. C’est un argument auquel l’opinion publique comme les décideurs ont été sensibles.
Quels leviers ont effectivement permis de réduire la population carcérale ?
Le Gouvernement a introduit une réforme visant à encourager les juges à prononcer un travail d’intérêt général en alternative aux peines de prison de moins de un an. Désormais, le système des réductions de peine permet aussi aux détenus de sortir aux trois-quarts de leur peine.
Par ailleurs, s’ils participent à un programme structuré d’activités, et que les services du ministère considèrent qu’en conséquence ils présentent un moindre risque de récidive, les détenus peuvent être libérés à partir des deux-tiers de leur peine.
Au final, la combinaison de ces mesures a permis de passer de 4500 à 3700 détenus. C’est énorme pour un petit pays comme le nôtre, et cela semble s’être stabilisé depuis bientôt deux ans.
Estimez-vous le problème réglé aujourd’hui ?
Non, dans la mesure où certaines prisons continuent d’être surpeuplées. Nous plaidons en outre pour une refonte du système de libération conditionnelle. Les services qui en décident sont chapeautés par le ministère de la Justice : nous militons pour qu’ils deviennent réellement indépendants. De manière générale, nous restons particulièrement vigilants car le nouveau gouvernement est davantage conservateur que ceux de ces vingt dernières années. Nous maintenons la pression pour que les réformes se poursuivent.
Cet article est issu du n°93 de la revue trimestrielle Dedans-Dehors, éditée par l'Observatoire international des prisons. Pour consulter l'intégralité du dossier et vous abonner à la revue papier, c'est ici.
jeudi 24 novembre 2016
Grand bond en arrière : pourquoi les prédictions d’une Chine plus démocratique à mesure qu’elle s’enrichissait se sont révélées fausses
Si les Etats-Unis ont longtemps
pensé que le développement économique de la Chine s'accompagnerait à
terme d'une transformation de l'appareil politique, la réalité
d'aujourd'hui est bien différente.
Depuis Richard Nixon, les
présidents américains ont soutenu l'émergence économique de la Chine,
considérant que plus la Chine deviendrait riche, plus ses pratiques se
rapprocheraient de celles des pays développés et plus les relations
seraient facilitées. Dans quelle mesure les réalités à l'œuvre en Chine
aujourd'hui contredisent-elles ce raisonnement ? Dans quels domaines
peut-on constater une tendance inverse (plus répressive) ?
Les 45 dernières années, marquées sous
l’établissement de relations entre la Chine et les Etats-Unis,
traduisent surtout les difficultés que les dirigeants américains ont
éprouvées à définir cette relation.
Quand Nixon, après Kissinger, se rend à
Pékin et y rencontre Mao, son objectif est surtout politico-stratégique.
Il cherche à isoler Moscou en se rapprochant de l’autre géant
communiste, qui a depuis plus d’une décennie opéré une rupture radicale
avec le grand frère soviétique. C’est de la realpolitik diraient
certains, du cynisme à la sauce Kissinger accuseraient d’autres : la
Chine est en pleine révolution culturelle, et ses "valeurs" semblent
alors aux antipodes de celles de Washington. C’est avec le libéralisme
des années Reagan, qui coïncident avec la mise en place des réformes de
Deng Xiaoping à Pékin, que la question du développement économique de la
Chine fait son apparition. Les années 1990 sont plus confuses. D’un
côté, l’administration Clinton pousse à l’entrée de la Chine dans l’OMC,
ce qui sera concrétisé en novembre 2001, et au développement économique
chinois. De l’autre, les évènements de la place Tian Anmen en mai-juin
1989 ouvrent une période de suspicion entre les deux pays qui n’est pas
encore close. Les libéraux qui ont alors le vent en poupe à Washington
ont la plus grande difficulté à définir cet objet qu’est la Chine, à la
fois promise au plus bel avenir économique, mais dont le système
politique ne change pas. C’est aussi à partir de cette époque
qu’émergent des thèses inspirées par les travaux de Samuel Huntington
sur la troisième vague démocratique et les trajectoires de Taiwan ou de
la Corée du Sud, posant la question de savoir si le développement
économique de la Chine conduira inévitablement à une réforme profonde de
ses institutions.
Vingt ans plus tard, la question reste
en suspens, mais il semble cependant que la montée en puissance
économique de la Chine, à laquelle l’Etat-parti est profondément
associé, ne se traduise pas par une transformation de l’appareil
politique, qui se contente d’une adaptation (objet de nombreux débats
d’ailleurs entre plusieurs écoles de pensée) et s’inquiète de
changements trop radicaux et porteurs d’incertitudes. Bref,
contrairement à ce qui était, et est toujours, souhaité à Washington, la
Chine évolue mais ne change pas. On constate même, depuis l’arrivée au
pouvoir du tandem Xi Jinping – Li Keqiang, un renforcement de l’autorité
du pouvoir central, alimenté par une campagne de lutte contre la
corruption qui est aussi l’occasion d’éliminer des factions
concurrentes, nourri par un sentiment de fierté nationale retrouvée, et
qui se traduit par une affirmation plus décomplexée de la puissance,
tournant définitivement la page des recommandations de Deng Xiaoping à
faire preuve de retenue, notamment sur la scène internationale. De même,
en faisant entrer la Chine à l’OMC, les Etats-Unis pensaient pouvoir la
contenir, la contrôler, mais ils ont finalement fait entrer le loup
dans la bergerie, et la Chine déstabilise aujourd’hui toutes les
institutions internationales qualifiées par des économistes comme Joseph
Stiglitz de "consensus de Washington", véritables fondements de la
puissance américaine depuis 1945. Les ambitions de Xi Jinping, avec le
projet One Belt, One Road, l’élargissement de l’Organisation de
coopération de Shanghai avec l’adhésion de l’Inde et du Pakistan ou
encore la création de la Banque asiatique d’investissements dans les
infrastructures (AIIB), projets multiples sur lesquels les Etats-Unis
sont totalement absents, quand ils ne se sont pas eux-mêmes exclus, ne
font que confirmer cette nouvelle donne. Avec l’émergence d’un modèle
chinois et le ralliement de nombreux pays à Pékin, dans les régions en
développement en particulier, c’est à la constitution d’un véritable
bloc à laquelle nous pourrions assister, certains observateurs
n’hésitant pas à faire mention d’un "consensus de Pékin", en opposition
au "consensus de Washington". La Chine se refuse pour l’heure à un tel
pronostic, et réfute le principe de l’émergence d’un consensus de Pékin.
Mais la capacité d’attraction de ce pays pourrait changer la donne, et
imposer de facto un véritable modèle, tant en matière de développement
que de gouvernance.
On constate ainsi que la montée en
puissance de la Chine, multiforme, ne s’est pas passée comme les
Américains l’avaient prévu, mais c’est surtout parce qu’ils n’ont
finalement rien prévu du tout. Il n’y a pas de cohérence dans la
politique chinoise des Etats-Unis depuis 45 ans. Au-delà de
l’opportunisme, la question de savoir pourquoi se rapprocher de la Chine
n’a jamais été posée, de même que celle de savoir avec "quelle" Chine
les Etats-Unis voulaient traiter. En ce sens, la relation avec la Chine
ne fait qu’illustrer les hésitations, errements même, de la politique
étrangère américaine, en particulier depuis la fin de la Guerre froide.
Le dernier exemple en date est l’échec de la stratégie du pivot de
l’administration Obama, disputée par l’opportunisme des dirigeants
philippins et malaisiens, qui préfèrent céder aux sirènes des
investissements chinois, et que l’administration Trump va définitivement
enterrer, notamment en revenant sur l’accord de libre-échange
transpacifique (TPP) que le nouveau président élu rejette avec force. A
la place, Washington proposera des accords de libre-échange bilatéraux,
ce qui existe déjà avec certains pays, et ce qui confirme surtout des
ambitions revues à la baisse.
Comment expliquer les erreurs d'interprétation de la montée de la Chine qui ont été faites dans le monde occidental ?
Tentons d’identifier quelles sont ces
erreurs d’interprétation afin d’y répondre. La croissance économique
chinoise a d’abord été longtemps sous-estimée, voire même niée. Dans les
années 2000, les cercles économiques et les think tanks évaluaient
ainsi autour de 2050 la date à laquelle le PIB chinois dépasserait celui
des Etats-Unis. Puis cette date est passée à 2030, et enfin 2020, ce
qui semble assez juste. Ce rétrécissement du temps, en une décennie, est
étonnant. Faut-il y voir une sorte de méthode Coué, visant à minimiser
la croissance chinoise en espérant que cette dernière ralentisse ? Sans
doute. S’ajoute à cela une incapacité à anticiper les adaptations de la
Chine à une économie mondiale en mutation, et dont elle est
progressivement devenue le pivot. Au niveau diplomatique ensuite, et
plus précisément l’image de Pékin dans le monde. La Chine reste assez
mal perçue dans le monde occidental, mais la réalité est différente dans
les pays en développement, où les investissements chinois sont très
bien accueillis, et pour cause. Les pays occidentaux continuent de
fantasmer sur le fait que parce qu’ils n’aiment pas la Chine et le
régime chinois, le reste du monde pensera comme eux. Il est temps
d’ouvrir les yeux sur le fait que la Chine est acceptée partout dans le
monde comme une puissance de premier plan, qu’on s’en réjouisse ou non.
Au niveau culturel également, domaine dans lequel la Chine est parvenue,
à force de moyens considérables et d’une stratégie de soft power
savamment construite, à se faire reconnaître comme un pôle de puissance
atemporel (en mettant notamment l’accent sur le fait que les 150
dernières années ne furent qu’une parenthèse douloureuse dans une
histoire plurimillénaire). Là aussi, et sous l’influence des Etats-Unis,
les pays occidentaux ont tardé à prendre la mesure du sens de
l’histoire, proposant une grille de lecture trop limitée, comme si la
chronologie des relations internationales commençait en 1945. Au niveau
politico-stratégique enfin, les Etats-Unis n’ont jamais cherché à
comprendre les motivations chinoises justifiant sa montée en puissance
militaire, et son affirmation de puissance dans son environnement
régional, se contentant d’y voir une menace pour la stabilité et de
chercher à la contrer.
Les raisons expliquant ces erreurs de
jugement sont multiples. D’abord une inadaptation stratégique aux
équilibres post-Guerre froide. La plupart des décideurs et des analystes
américains ont été formés pendant la période de rivalité avec Moscou,
et ont parfois du mal à sortir de ces schémas de pensée. Ensuite, ce que
le politologue américain Christopher Fettweis a récemment qualifié dans
un ouvrage éponyme et passionnant de "pathologies de la puissance", que
sont la peur, l’honneur, la gloire et l’hubris, pour ne pas dire
globalement l’arrogance. La politique étrangère américaine s’est, de
manière étonnante, montrée assez médiocre dans sa capacité à s’adapter à
un nouvel environnement international. C’est le cas au niveau
sécuritaire (où sont passées les guerres que Washington remportait),
mais aussi économique et diplomatique. Résultat, et la Chine n’en est
qu’un exemple, Washington ne pèse plus sur la scène internationale de
manière aussi décisive que dans les années 1990, quand Bill Clinton
faisait mention de la "nation indispensable". Enfin, l’incapacité à
définir ce que les Etats-Unis souhaitent faire en Asie. Endigagement de
Bush fils, stratégie du pivot d’Obama (portée par Hillary Clinton)… des
slogans souvent vides de sens que se renvoient Républicains et
Démocrates, et qui se traduisent au final par des résultats médiocres.
Car la réalité est là, même si elle reste niée : les Etats-Unis ne
pèsent plus sur les affaires asiatiques avec la même force qu’au début
du millénaire, et la montée en puissance de la Chine en est la raison.
Reste la question, très prégnante dans
les cercles stratégiques américains, du China bashing comme grille
d’analyse simpliste, sorte de prêt-à-penser pour stratèges peu au fait
des réalités du monde actuel (et qui devraient sortir de leurs cercles)
et dirigeants politiques élus sur des programmes de politique intérieure
(c’est-à-dire tous les présidents américains depuis Bush père), et
n’ayant aucune connaissance des dossiers de politique étrangère (sans
parler d’une absence de vision sur ces questions, à l’exception notable,
mais non aboutie, de Barack Obama). Sur ce point, Républicains et
Démocrates se rejoignent, et il est parfois sidérant de constater à quel
point l’analyse de la Chine est réductrice, parti-pris, et surtout
négative par essence dans les cercles stratégiques américains. Crainte
de la montée en puissance militaire, satisfaction à peine dissimulée
quand la croissance chinoise est au ralenti, incapacité à saisir la
complexité de la relation entre Pékin et ses voisins… Les experts de
l’Asie en général, et de la Chine en particulier, aux Etats-Unis ont une
solide connaissance des dossiers, mais une interprétation qui laisse
souvent pantois.
Alors que la politique chinoise
des États-Unis a été relativement stable depuis 40 ans (intensification
des liens, encouragement de la croissance et de la modernisation de la
Chine), peut-on s'attendre à ce que les Américains, sous le mandat de
Donald Trump, modifient leur approche et posent les bases d'une nouvelle
relation ?
Cette "stabilité" reste discutable, si
on s’arrête sur quelques évènements qui complexifièrent la relation
entre les deux pays, comme les évènements de la place Tian Anmen ou le
bombardement de l’ambassade de Chine à Belgrade en 1999. Mais il est
certain que globalement, et en dépit d’une rivalité à peine voilée, les
deux pays se sont progressivement imposés comme des partenaires, au
point que certains analystes ont, de manière sans doute réductrice
compte-tenu de cette rivalité maintenue, fait état d’un G2 entre Pékin
et Washington.
Il est également certain que les
différentes administrations américaines ont soutenu le développement de
la Chine – ce qui ne les a pas empêchées de s’en inquiéter – et des
réformes à Pékin – souvent ignorées par les dirigeants chinois. Disons
pour simplifier et en caricaturant à peine que la définition donnée à la
"modernisation" de la Chine n’est pas la même à Washington et à Pékin.
L’administration Trump apportera-t-elle
son lot d’ajustements dans la politique chinoise de Washington ? Sans
aucun doute, et l’annulation programmée du TPP en est la première
manifestation. Mais reste à savoir quelle direction exacte sera prise,
et donc s’il s’agira d’une rupture profonde, pour le meilleur comme pour
le pire. Depuis quelques années, en marge de la stratégie du pivot de
l’administration Obama, de nombreux experts américains se sont
interrogés sur la pertinence d’un "grand bargain" (que nous traduirons
par grand marchandage) avec la Chine, en vue de maintenir une présence
américaine en Asie, et de garantir la stabilité de cette région, pour ne
pas dire du monde. Ce marchandage part de l’idée selon laquelle la
montée en puissance chinoise est désormais inexorable et que, plutôt que
de chercher à la contenir inutilement, il serait préférable de s’y
associer, afin de maintenir des acquis. Au passage, notons que c’est
l’attitude qu’adoptent aujourd’hui d’autres acteurs internationaux
vis-à-vis de la Chine, à commencer par les puissances européennes qui se
sont par exemple ralliées à l’AIIB dès sa création. Dans les faits, ce
marchandage suppose d’accepter le rôle accru de la Chine dans les
affaires asiatiques, mais aussi de lâcher du lest sur certains dossiers
sensibles, comme Taiwan (ce marchandage est ainsi présenté par certains
experts comme une remise en question des accords stratégiques avec
Taipei). Reste à savoir où se situerait le niveau de ce marchandage, et
dans quelle mesure il ne placerait pas de facto la Chine en position de
force (sans mauvais esprit, les Chinois sont passés maîtres dans l’art
du marchandage, ce qui n’est pas le cas des Américains). Une approche
risquée donc, et qui serait une immense victoire pour Pékin, mais que
pourrait cependant privilégier l’administration Trump. A-t-elle d’autres
options sur la table compte-tenu des déboires de la politique étrangère
américaine et des avancées de la Chine ? Pas sûr. Entre déterminisme et
réalisme défensif, la politique chinoise de Trump pourrait ainsi poser
les jalons de ce grand marchandage. Sans doute une bonne nouvelle pour
la stabilité et la paix, une moins bonne pour l’idée que certains se
font de la politique étrangère américaine, et d’un messianisme devant
nécessairement l’accompagner.
Quelle forme pourrait prendre la
relation sino-américaine en vue de garantir la stabilité mondiale ? Que
devraient changer ces deux pays dans leur approche pour éviter de
tomber dans le "piège de Thucydide" (concept formulé par l'historien
Graham Allison qui désigne l’antagonisme qui oppose la puissance
établie, ici les Etats-Unis, et la puissance ascendante, ici la Chine à
tel ou tel moment de l’histoire, la montée en puissance de la seconde,
la crainte qu’elle suscite chez la première, et le risque de guerre qui
en résulte) ?
Cette question est à mon sens au cœur
des relations internationales contemporaines, et sera structurante dans
les prochaines années. Le "piège de Thucydide", qui suppose qu’une
transition de puissance s’accompagne nécessairement d’une situation
conflictuelle, a de son côté alimenté toutes les thèses (certaines
intéressantes et appuyées sur les travaux de Robert Gilpin ou de Dale
Copeland, d’autres beaucoup moins) sur l’inévitabilité d’un conflit
entre la Chine et les Etats-Unis. On peut cependant assez facilement
objecter à cette démonstration assez simpliste qui se base le plus
souvent sur une répétition discutable de l’histoire. D’une part, rien
n’indique que ce passage de relais doit nécessairement engendrer un
conflit. Il n’y a pas de règle en la matière, juste des exemples. De
nombreuses études sérieuses se sont penchées sur la question, et en
concluent que s’il existe un risque important, on ne peut parler de
relation automatique et déterminée de cause à effet. D’autre part, ce
n’est pas toujours à la suite de conflits que des puissances ont émergé
pour devenir "première puissance mondiale", si on donne un sens
économique à cette définition (que la mise en avant des PIB et le
classement qui l’accompagne semble confirmer). On pourrait ainsi
mentionner le cas des Etats-Unis, qui se sont imposés dans la première
moitié du XXème siècle, mais sans vaincre le Royaume-Uni, alors première
puissance mondiale, ce pays étant même leur principal allié dans deux
conflits successifs. La guerre a affaibli Londres et renforcé
Washington, c’est une certitude, mais tous deux étaient dans le même
camp, celui des vainqueurs a fortiori. En suivant cette logique, on peut
même considérer que c’est en gagnant une guerre que le Royaume-Uni a
cédé sa place de première puissance mondiale… Ce qui remet en question
la thèse de la défaite et de la victoire comme accélérateur du passage
de relais d’une puissance à une autre. En clair, la guerre comme
transition de puissance est une possibilité et, dans certains cas une
forte probabilité, mais certainement pas une fatalité. Les chances se
réduisent même dès lors qu’aucun des potentiels belligérants n’a
d’intérêt manifeste à précipiter un conflit.
Plus près de nous, la Guerre froide
entre les Etats-Unis et l’Union soviétique n’a pas dégénéré en conflit
armé à grande échelle, et s’est malgré tout soldée par la victoire
totale de l’un des deux camps. Washington n’a pas ainsi eu besoin de
combattre son principal adversaire pour s’imposer comme l’unique
superpuissance et marquer l’entrée dans un monde unipolaire. C’est même à
partir du moment où les dirigeants soviétiques ont reconnu leur
incapacité à poursuivre la rivalité que la Guerre froide s’est achevée.
Dès lors que Mikhaïl Gorbatchev prit les commandes de l’Union soviétique
en 1985, et une fois les réformes engagées, le renoncement au bras de
fer avec les Etats-Unis et, par voie de conséquence, la reconnaissance
de la "défaite", s’imposait comme une évidence pour un pays au bord de
la banqueroute.
Mais que nous enseigne cette "fin" de la
Guerre froide entre les Etats-Unis et l’Union soviétique si on
l’applique à la relation Washington-Pékin ? D’une part, et il n’est pas
inutile de le rappeler, que la Guerre froide était une perception
partagée des deux côtés du rideau de fer. Or, dans le cas présent, la
question de savoir si dirigeants américains et chinois sont "d’accord
pour ne pas être d’accord" mérite clairement d’être posée, mais elle
reste en suspens. D’autre part, la Guerre froide était, il convient
également de le rappeler, un combat idéologique.
Et sur ce point, la relation
Washington-Pékin ne semble pas aussi nettement opposer deux idéologies
rivales que l’Est et l’Ouest pendant plus de quatre décennies. Enfin, la
Guerre froide n’a pris fin que dès lors que l’un des deux belligérants –
l’Union soviétique – s’est avoué vaincu. Or, dans la situation
actuelle, on imagine difficilement les Etats-Unis reconnaître une
défaite (d’autant que la nature de cette dernière resterait à définir)
et on imagine encore moins la puissance émergeante qu’est la Chine,
promise au plus bel avenir, courber l’échine comme l’a fait Moscou à la
fin des années 1980. Certes, la situation est susceptible d’évoluer, et
évoluera probablement dans la durée, mais dans le rapport de force
actuel entre les deux pays, et la permanence de leur statut de
puissances de premier plan, semble exclure le scénario d’un "aveu
d’échec".
Il reste donc à définir, ou redéfinir,
ce qu’est la relation entre les Etats-Unis et la Chine, et dans quelle
catégorie, si catégorie il y a, elle doit être rangée. S’agit-il d’une
nouvelle forme de relation, entre deux puissances qui s’observent à
distance et évitent les sujets qui fâchent, mais ne peuvent éviter de se
retrouver sur de multiples dossiers ? S’agit-il d’une situation
transitoire, une sorte de passage de relais qui se fait sans heurts,
mais dans lequel tous les coups sont cependant permis ? S’agit-il d’une
"guerre" d’un genre nouveau, dont les contours autant que les
aboutissements restent imprécis ? Sans doute un peu de tout cela à la
fois. Parce qu’elle est plus complexe que toutes les relations qui ont
concerné les grandes puissances par le passé, parce qu’elle est à la
fois d’une grande proximité et emprunte d’une méfiance réciproque qui
invite nécessairement à la prudence, à Pékin comme à Washington, parce
qu’elle est parfois d’une grande violence mais évitera tant que possible
de basculer en conflit armé, la relation entre les Etats-Unis et la
Chine est ce que j’ai qualifié dans l'un de mes ouvrages publié en 2014
de "guerre pacifique", qui impose de nouvelles grilles de réflexion.
Quels pourraient être les grands domaines de coopération entre ces deux pays ?
Quels pourraient être les grands domaines de coopération entre ces deux pays ?
Dans son célèbre Paix et guerre entre
les nations, et critiquant au passage l’approche à son sens trop limitée
des relations internationales offerte par les auteurs réalistes (en
particulier, et déjà, par les auteurs américains), Raymond Aron
distingue des systèmes dits homogènes et hétérogènes, expliquant :
"j’appelle systèmes homogènes ceux dans lesquels les Etats appartiennent
au même type, obéissent à la même conception du politique. J’appelle
hétérogènes, au contraire, les systèmes dans lesquels les Etats sont
organisés selon des principes autres et se réclament de valeurs
contradictoires". Voilà une parfaite définition d’une multipolarité dans
laquelle la Chine aurait une place centrale, et voilà une définition
encore plus exacte d’un système dans lequel les Etats-Unis et la Chine
rivalisent, mais cohabitent et coopèrent malgré tout. C’est l’acception
de l’altérité (François Jullien parlerait "d’écarts culturels") qui est
ici en jeu. Les différences entre les deux pays sont en effet
innombrables, et portent sur tous les sujets, ce qui impose une grande
prudence dans la manière avec laquelle nous devons appréhender et tenter
de décrypter la relation Chine – Etats-Unis. C’est avec le souci de
mettre en avant ces systèmes hétérogènes, qui permettent de mieux
comprendre les décalages fréquents entre la posture et les stratégies de
Washington et celles de Pékin, que les deux pays seront en mesure de
coopérer sur la scène internationale, et d’imposer une multipolarité
polyphone, c’est-à-dire définie par des acteurs aux sensibilités très
différentes, mais pas nécessairement ennemis. A partir de ce constat,
les domaines de coopération sont multiples, je dirais même sans limite, à
condition qu’ils s’établissent dans un climat de confiance et de
respect mutuel. Les Américains doivent accepter la nouvelle réalité
d’une Chine superpuissance, et les Chinois doivent de leur côté lutter
contre la tentation de l’arrogance, pathologie qui gangrène souvent les
puissances ascendantes et qui se sentent pousser des ailes. Si les
dirigeants américains et chinois font preuve de sagesse et parviennent à
surmonter ces écueils, tout en restant à l’écoute des autres acteurs et
en assumant leurs responsabilités, la coopération peut être très
productive.
Source : Barthélémy Courmont
vendredi 18 novembre 2016
Shinzo Abe, premier responsable étranger rencontré par Trump
Pour le Premier ministre japonais, «Trump est un leader de confiance»
Par
Arnaud Vaulerin, Correspondant au Japon
—
(mis à jour
à )
Shinzo Abe est le premier dirigeant étranger à avoir rencontré jeudi, à New York, le futur président américain pour lever les inquiétudes sur l'engagement américain en Asie.
- Pour le Premier ministre japonais, «Trump est un leader de confiance»
Pour les amoureux du protocole que sont les Japonais, la
rencontre quasi à la hussarde entre Shinzo Abe et Donald Trump jeudi à
New York aura au moins permis de saisir toute l’importance que le Japon
accorde à l’arrivée du nouveau président des Etats-Unis. Sans parler de
l’inquiétude que ses propos de campagne avaient suscités à Tokyo.
Le chef du gouvernement japonais était le premier dirigeant étranger à rencontrer Trump. Et quelques heures avant l’entrevue, l’entourage d’Abe avait toutes les peines du monde à savoir où et quand celle-ci aurait lieu. Elle s’est finalement tenue à la Trump Tower à Manhattan et pendant 90 minutes, ce qui est loin d’être négligeable pour le futur président «très, très occupé» à constituer sa future équipe avant son investiture le 20 janvier.
«Les discussions me laissent penser que nous pouvons établir une relation de confiance» avec la future administration Trump, a déclaré le Premier ministre japonais au terme de la rencontre. Il a évoqué une discussion «candide» dans une «atmosphère chaleureuse». «Les alliances ne peuvent pas fonctionner sans confiance. Je suis maintenant convaincu que le président élu Trump est un leader digne de confiance», a conclu Abe qui avait fait un détour par New York avant de gagner le sommet de l’Apec au Pérou. Quelques heures plus tard, sur sa page Facebook, Trump a posté un bref message accompagné d'une photo: «C’était un plaisir d’avoir le Premier ministre Shinzo Abe à la maison et commencer une grande amitié.»
Durant la campagne, le milliardaire Trump avait multiplié les propos outranciers anti-nippons, qualifiant d’«injuste» l’alliance de sécurité entre les deux alliés historiques, suggérant un hypothétique armement nucléaire du Japon et de la Corée du sud, évoquant un possible retrait de ses engagements en matière de défense, regrettant la perte de vitesse de l’économie américaine face à celle du Japon notamment. Il avait suggéré le retrait des soldats américains de la péninsule coréenne et de l’archipel nippon à défaut d’une augmentation de la contribution financière de Séoul et de Tokyo (près de 80.000 GI sont stationnés en Corée et au Japon).
Bref, Trump semblait briser un tabou et renverser la table d’un ordre jusqu’à présent assez bien établi. Depuis la fin de la guerre de Corée en 1953, il était entendu que Washington prodiguait ses services en matière de sécurité, notamment grâce à son parapluie nucléaire en échange de quoi, ses alliés sud-coréen et japonais se consacraient à la croissance économique et joignaient leurs forces à un front anticommuniste.
Ils doivent également composer avec une Corée du nord qui s’est invitée avec force et fracas dans le concert des nations dotées de l’arme nucléaire en enchaînant les essais atomiques et les tirs balistiques. Enfin, elle reste vigilante avec la Russie qui ces derniers mois a multiplié les incursions dans son espace aérien et s’est à plusieurs reprises approchée des eaux territoriales, notamment en effectuant des exercices conjoints avec la Chine.
Tokyo redoute par-dessus tout d’être isolé en Asie et d’être délaissé sinon abandonné par son allié américain. Surtout si celui-ci renonce à finaliser le Partenariat transpacifique (TPP) comme l’a annoncé Trump durant la campagne.
L’équipe et des proches d’Abe ont donc multiplié les échanges et les rencontres ces derniers jours avec l’entourage de Trump et des responsables des services de renseignements et de défense. «En tant que président élu, il va disposer d’un plus grand nombre d’informations et il va comprendre l’importance de la relation Japon-Etats-Unis», affirmait dernièrement au Nikkei Business Online Shigeru Ishiba, ancien ministre nippon de la Défense et l’un des grands barons du Parti libéral démocrate de Shinzo Abe. Le Japon va faire entendre raison à Trump.
Arnaud Vaulerin Correspondant au Japon
Source : Libération.fr
Le chef du gouvernement japonais était le premier dirigeant étranger à rencontrer Trump. Et quelques heures avant l’entrevue, l’entourage d’Abe avait toutes les peines du monde à savoir où et quand celle-ci aurait lieu. Elle s’est finalement tenue à la Trump Tower à Manhattan et pendant 90 minutes, ce qui est loin d’être négligeable pour le futur président «très, très occupé» à constituer sa future équipe avant son investiture le 20 janvier.
«Les discussions me laissent penser que nous pouvons établir une relation de confiance» avec la future administration Trump, a déclaré le Premier ministre japonais au terme de la rencontre. Il a évoqué une discussion «candide» dans une «atmosphère chaleureuse». «Les alliances ne peuvent pas fonctionner sans confiance. Je suis maintenant convaincu que le président élu Trump est un leader digne de confiance», a conclu Abe qui avait fait un détour par New York avant de gagner le sommet de l’Apec au Pérou. Quelques heures plus tard, sur sa page Facebook, Trump a posté un bref message accompagné d'une photo: «C’était un plaisir d’avoir le Premier ministre Shinzo Abe à la maison et commencer une grande amitié.»
Doutes et incertitudes en Asie
Les Japonais avaient un grand besoin de prendre la température à New York. L’élection surprise de Donald Trump a pris de court Tokyo. Tout comme elle a ouvert une période de doutes et d’incertitudes en Asie, région vers laquelle l’administration Obama avait multiplié les efforts et les gestes essentiellement symboliques dans le cadre de son pivot diplomatique et stratégique.Durant la campagne, le milliardaire Trump avait multiplié les propos outranciers anti-nippons, qualifiant d’«injuste» l’alliance de sécurité entre les deux alliés historiques, suggérant un hypothétique armement nucléaire du Japon et de la Corée du sud, évoquant un possible retrait de ses engagements en matière de défense, regrettant la perte de vitesse de l’économie américaine face à celle du Japon notamment. Il avait suggéré le retrait des soldats américains de la péninsule coréenne et de l’archipel nippon à défaut d’une augmentation de la contribution financière de Séoul et de Tokyo (près de 80.000 GI sont stationnés en Corée et au Japon).
Bref, Trump semblait briser un tabou et renverser la table d’un ordre jusqu’à présent assez bien établi. Depuis la fin de la guerre de Corée en 1953, il était entendu que Washington prodiguait ses services en matière de sécurité, notamment grâce à son parapluie nucléaire en échange de quoi, ses alliés sud-coréen et japonais se consacraient à la croissance économique et joignaient leurs forces à un front anticommuniste.
Bombe nucléaire nord-coréenne
L’émergence très hégémonique de la Chine dans les mers de la région a commencé à sonner le branle-bas à Tokyo. L’élection de Trump a apporté un nouvel indice d’une instabilité croissante aux yeux des Japonais. Depuis 2012, la nationalisation des îlots des Senkaku et l’arrivée au pouvoir du président chinois Xi Jinping, les Japonais doivent faire face à la pression diplomatique et militaire de Pékin sur la mer de Chine.Ils doivent également composer avec une Corée du nord qui s’est invitée avec force et fracas dans le concert des nations dotées de l’arme nucléaire en enchaînant les essais atomiques et les tirs balistiques. Enfin, elle reste vigilante avec la Russie qui ces derniers mois a multiplié les incursions dans son espace aérien et s’est à plusieurs reprises approchée des eaux territoriales, notamment en effectuant des exercices conjoints avec la Chine.
Tokyo redoute par-dessus tout d’être isolé en Asie et d’être délaissé sinon abandonné par son allié américain. Surtout si celui-ci renonce à finaliser le Partenariat transpacifique (TPP) comme l’a annoncé Trump durant la campagne.
«La mort du TPP»
«A Séoul, Tokyo et dans de nombreuses capitales d’Asie du sud-est, la mort du TPP dans sa forme présente est un énorme revers et renforce l’idée que les Etats-Unis ne sont pas réellement engagés dans la région tout en apparaissant comme un partenaire non fiable pour préserver un équilibre délicat entre l’engagement économique et la protection sécuritaire», écrivait, mercredi, Stephen R. Nagy, professeur associé l’Université International Christian, sur le site Policy forum.L’équipe et des proches d’Abe ont donc multiplié les échanges et les rencontres ces derniers jours avec l’entourage de Trump et des responsables des services de renseignements et de défense. «En tant que président élu, il va disposer d’un plus grand nombre d’informations et il va comprendre l’importance de la relation Japon-Etats-Unis», affirmait dernièrement au Nikkei Business Online Shigeru Ishiba, ancien ministre nippon de la Défense et l’un des grands barons du Parti libéral démocrate de Shinzo Abe. Le Japon va faire entendre raison à Trump.
Arnaud Vaulerin Correspondant au Japon
Source : Libération.fr
lundi 14 novembre 2016
mercredi 9 novembre 2016
Pourquoi Trump a gagné ?
Donald
Trump vient de remporter les élections présidentielles étatsuniennes et devient
le 45ème Président des Etats-Unis. Cette victoire peu prévue et très
étonnante en raison de l’outrance de son attitude lors de la campagne
présidentielle interpelle. Pourquoi
un homme politique haï au sein même de son parti a-t-il pu vaincre son
adversaire démocrate Hillary Clinton pourtant soutenue par le Président Obama
qui obtient encore 53% d’avis favorables auprès de l’opinion publique ?
On peut lister 8 explications majeures.
Un vote d’adhésion à Trump pour 6 raisons
essentielles :
-l’expression du mal-être du « peuple américain » : un
populiste ? Trump dénonce les inégalités toujours plus fortes.
Celles-ci se développent depuis les années 1980, moment d’arrivée au pouvoir de
Reagan et la mise en place d’une politique néolibérale qui accélère délocalisations
et financiarisation de l’économie. Trump par ses outrances s’adresse aux
chômeurs, aux travailleurs pauvres en accusant les élites d’être responsables
de cette situation
un candidat anti-système : la posture de Trump est dès le
départ celle d’un homme qui, grâce à sa fortune, se dit indépendant des élites
politiques et des médias. Trump maîtrise parfaitement l’art de la parole et
sait justement faire parler de lui. Son manque de culture devient un atout pour
les Américains qui peuvent s’incarner en Trump et son niveau de vocabulaire
très « simple », voire ordurier.
-un discours passéiste simplificateur mais efficace : Trump
fait réémerger une vision ancienne des valeurs américaines : domination
blanche, autorité patriarchale (d’où ses épidodes hyper-machistes), utilisation
des armes à feu, vision mythifiée d’une époque où les Etats-Unis dominaient le
monde…
-un nouvel exemple du rêve américain ? La réussite dans le
business de Donal Trump a été aussi un argument de campagne. Le discours simple
de transposer la réussite dans les affaires vers la gestion de l’Etat
fonctionne bien.
-un discours sécuritaire anti-mondialisation et anti-immigration :
Trump propose de revoir les traités de commerce comme l’ALENA pour relocaliser
une partie de l’industrie. En parallèle, les critiques des Mexicains accusés d’être
des traficants de drogue ou des violeurs illustrent un discours identitaire
fort qui est en essor dans le monde entier. Non, monsieur Friedman la terre n’est
pas plate : plus l’économie et la finance se mondialisent, plus les hommes
s’accrochent à des valeurs réelles (ou imaginaires, mais qui rassemblent).
-au final, le reflet de l’essor d’une « télémédiocratie » :
depuis les 1er débat télévisé Nixon-Kennedy gagné par celui-ci, la
télévision joue un rôle croissant, ce qui a des effets multiples : coûts
de campagnes exorbitants de plusieurs milliards de dollars, simplification du
discours et des programmes, personnification des campagnes, vocabulaire
simpliste et slogans flash pour coller à des reportages courts... Trump n’est
qu’un nouveau Berlusconi où le discours politique est simple et populiste.
Un vote de défiance vis-à-vis de Clinton pour 2
raisons clés :
-une femme trop secrète : les affaires liés aux mails privés
illustrent le vécu difficile de Clinton, en particulier lors des deux mandats
de son mari. De plus,. L’argument clé de Clinton d’une élection historique
montre qu’une partie des Américains ne sont pas prêts à élire une femme.
Peut-être aussi dans l’inconscient américain, Clinton peut représentée la femme
trompée, une sorte de looser qui contraste avec Trump ?
-le reflet du système politico-médiatique mondialisé : pour
beaucoup d’Américains, Clinton est vue comme expérimentée, mais surtout une
femme au pouvoir depuis longtemps qui est responsable de leurs problèmes ;
ils estiment qu’elle n’aurait rien
changer (larges interrogations sur l’intégration d’une partie du programme de
Bernie Sanders). En attendant les sondages, on peut supposer que les minorités et l'aile gauche
ne se sont pas mobilisées pour elle.
Bilan : un discours trumpien qui
fonctionne dans une Amérique désunie et déboussolée.
Ainsi,
contrairement à Clinton et comme Obama il y a 8 ans, Trump a su raconter une
histoire aux Américains désemparés face à la mondialisation, en particulier la
montée de la Chine.. La vraie question est désormais de voir Trump face aux
responsabilités. Son premier discours très rassembleur est intéressant, mais il
aura du mal à unifier le peuple américain, ayant lui-même œuvrer à l’opposition
des Américains (hommes contre femmes, blancs contre minorités). C’est d’ailleurs
le grand regret d’Obama de quitter la Maison blanche avec un pays plus divisé
que jamais. Enfin, les félicitations rapides de Marine Le Pen et la montée de
la bourse de Moscou (qui fait exception) doivent nous interroger sur l’exemplarité
de cette élection. Beaucoup d’échéances électorales attendent l’Europe en 2017
(Fr All). La classe politique française et européenne sera-t-elle en tirer des
leçons ?
A titre personnel, je suis à la triste d'une telle élection très lamentable vis-à-vis des valeurs démocratiques , mais aussi effrayé car souvent nous regardons l'Amérique tel un miroir de nos problèmes et évolutions futures.
A titre personnel, je suis à la triste d'une telle élection très lamentable vis-à-vis des valeurs démocratiques , mais aussi effrayé car souvent nous regardons l'Amérique tel un miroir de nos problèmes et évolutions futures.
Serge Boyer, le 12 novembre.
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