jeudi 25 décembre 2014

L'Allemagne face au pb démographique

Démographie Allemagne : le pays face à ses défis démographiques

La démographie déclinante et vieillissante de l’Allemagne constitue son principal défi pour les années à venir. Dans cette optique, la situation économique des pays du Sud de l’Europe peut constituer une opportunité.
L’Allemagne présente d’indéniables performances économiques : chômage faible, excédents extérieursrecord et comptes publics sains. Toutefois, il n’en demeure pas moins que les perspectives à plus long terme sont moins positives, notamment de par sa démographie déclinante et sa population vieillissante. Le recours aux populations du Sud de l’Europe semble pouvoir être une solution au moins partielle de court terme à ce problème structurel.
Évolution démographique de l’Allemagne
Les trajectoires démographiques de l’Allemagne et de la France sont divergentes. En effet, les deux pays sont dans des situations radicalement différentes. L’Allemagne est peuplée d’environ 15 millions d’habitants de plus que la France (respectivement 80,5 millions contre 65,5 millions). Toutefois, alors que la France a pu conserver un taux de fécondité satisfaisant, pratiquement suffisant pour garantir la stabilité à long terme de la population, la dénatalité allemande va entraîner une baisse rapide et importante de la population et un vieillissement nettement plus prononcé qu’en France. Dès lors, les projections soulignent qu’en 2045, la France devrait être plus peuplée que l’Allemagne. D’ici 2060, l’Allemagne devrait perdre presque 15 millions d’habitants et avoir une population de 66 millions d’habitants, contre près de 74 millions en France qui en aura gagné 9 millions dans le même temps. Dès lors, en 2060, la part des plus de 65 ans atteindra presque le tiers de la population en Allemagne, contre 27% en France.
 
Les trajectoires divergentes entre ces deux pays sont essentiellement le produit de l’Histoire. En effet, en Allemagne, les générations les plus nombreuses sont celles nées depuis les années 1930 et jusqu’en 1945 (période du nazisme qui correspond à une incitation forte à la natalité). La seconde vague de natalité intervient au milieu des années 1960 avec les enfants issus des générations nées pendant la période nazie. Inversement, en France, les générations des années 1930 sont peu nombreuses. Après la seconde guerre mondiale, alors que le baby-krach intervient en Allemagne, la France entre quant à elle dans la période du baby-boom. La natalité s’estompe ensuite progressivement à partir de la crise des années 1970.
Défi démographique pour l’Allemagne
La situation démographique de l’Allemagne est très dégradée. En effet, le vieillissement accéléré de sa population est directement lié à sa faible natalité. Avec 670.000 naissances par an et 870.000 décès, le pays connaît un déficit de natalité de 200.000 habitants par an. Ainsi, l’Allemagne est dans le trio de tête mondial des pays avec la plus petite proportion de jeunes : seulement 13% de la population a moins de 15 ans et seulement 22% a moins de 25 ans. Avec 18 naissances pour 1.000 habitants, l’Allemagne a un taux de fécondité très faible de 1,36 enfant en moyenne par femme, quand un taux de 2,1 est requis pour assurer le maintien de la population en l’état.
Les conséquences pour l’Allemagne seront majeures. Au-delà des questions de marché du travail (difficulté à accroître le taux d’activité), de capacités productives (difficultés à accroître l’innovation et la productivité) et de soutenabilité de la dette (moindre avec une population plus faible), le principal problème porte sur le poids des dépenses publiques de retraite qui va mécaniquement augmenter. À ce titre, malgré un âge de départ à la retraite qui est déjà passé à 67 ans, ce seuil est d’ores et déjà insuffisant. En effet, les futurs salariés allemands n’auront pas les moyens de satisfaire les besoins de leurs aînés à la retraite. Dès lors, la retraite des allemands semble de plus en plus dépendante de leurs patrimoines accumulés. D’ailleurs, c’est une des raisons (en plus de celle liée au traumatisme de l’hyperinflation de l’entre-deux guerres) qui explique pourquoi les allemands ne souhaitent pas une inflation trop élevée en Europe, car cela dégraderait la valeur de leur patrimoine (”l’euthanasie du rentier” de J.M. Keynes).
Consciente de ce défi, l’Allemagne développe des politiques visant à y faire face. En effet, le pays a multiplié les aides pour rattraper son retard démographique et stopper son déclin. En plus de l’Elterngeld qui est un congé parental d’un an pris en charge par l’État, les deux principales et plus récentes mesures sont la garantie d’une place en crèche ou chez une nourrice pour les enfants de plus d’un an (contre plus de trois ans auparavant), ainsi qu’une prime allant de 100 euros à 150 euros pour les familles qui décident de garder leur enfant elles-mêmes. Si la première mesure est consensuelle (malgré des problèmes pratiques probables à venir dans un pays réputé pour son manque d’infrastructures en la matière), la seconde fait débat au sein de la société allemande. Notons qu’il est également question de diminuer le temps de travail hebdomadaire des femmes ayant un enfant à charge.
La “solution” des chômeurs issus du Sud de l’Europe
L’Allemagne est plutôt encline à aider les jeunes du Sud de l’Europe. La part de cette catégorie de population qui est au chômage a explosé (+50% en 5 ans) avec la crise dans ces pays (EspagneGrèce,ItaliePortugal). Avec plus de 50% des moins de 25 ans au chômage, la Grèce et l’Espagne détiennent les moins bons résultats en la matière, tandis que le chômage des jeunes en Allemagne est de seulement 8% (à titre indicatif, en France le niveau du chômage des jeunes est d’environ 25%). A ce titre, l’Allemagne s’est avérée être une solution contre le chômage pour bon nombre d’étrangers. En effet, ce pays est celui qui compte le plus d’arrivées sur son sol d’étrangers en 2012 avec l’absorption d’un million de migrants, ce qui constitue un record depuis 1995/1996. Entre 2011 et 2012, le nombre de Grecs s’étant installés en Allemagne a bondi de +75%, ainsi que le nombre de Portugais et d’Espagnols (+50%) et d’Italiens (+35%). Au total, ce sont plus de 130′000 Européens du Sud qui ont rejoint l’Allemagne en 2012, et probablement au moins autant en 2013.
La démographie déclinante et la nécessité de trouver de la main d’œuvre dans l’industrie sont à l’origine de cet afflux de populations étrangères. L’essentiel des flux de population est très souvent diplômé car le chômage des diplômés du supérieur est de 20% en Grèce, 17% en Espagne contre seulement 2,5% en Allemagne. Des pays commencent à s’inquiéter car cela implique d’une part, une fuite des cerveaux nécessaires à la “reconstruction” des pays du Sud, et d’autre part, une perte financière en matière de formation qui ne bénéficie pas aux pays d’origine. Au final, le risque global de cette politique est le creusement de l’écart entre l’Europe du Nord (productive et qualifiée) et l’Europe du Sud (qui cumule les problématiques économiques structurelles), ainsi que le risque d’hypothéquer la croissance future des pays d’Europe du Sud, à fortiori si ces populations restent en Allemagne. Parallèlement, l’avantage global est celui lié au rééquilibrage des niveaux de productivité et la diminution du coût du chômage pour les pays d’Europe du Sud avec des populations qui vont passer du statut de chômeur dans leur pays à celui d’employé en Allemagne.
Source : Contrepoints - 09.04.2014

lundi 22 décembre 2014

L'agglomération de Toulouse va atteindre un million d'habitants

Démographie France : l’agglomération de Toulouse dépassera le million en 2017

Les 116 communes de la Grande Agglomération toulousaine gagneront 24% de population d’ici 2040, selon l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE). Le nombre de personnes de 75 ans ou plus devrait doubler.
Après l’agglomération toulousaine, ou unité urbaine de Toulouse, ses 73 communes et ses 892.115 habitants en 2011 (6e de France), voici le SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale) de la Grande Agglomération toulousaine.
C’est sur cette nouvelle appellation administrative, approuvée en 2012, que porte la dernière étude de population de l’INSEE. La Grande Agglomération, ce sont 930.000 habitants de 116 communes, toutes situées en Haute-Garonne, et un ensemble plus représentatif de notre évolution économique et sociologique.
En effet, le SCoT met en cohérence l’ensemble des politiques en matière d’urbanisme, d’habitat, de déplacements et d’équipements commerciaux. Il ne se base plus seulement sur une continuité de bâti sur un territoire.
24% d’habitants en plus. En 2040, selon l’INSEE, la Grande Agglomération toulousaine pourrait abriter jusqu’à 1.167.000 habitants, soit près de 240.000 personnes de plus qu’en 2009. Et dès 2017, dans trois ans, la Grande Agglomération compterait un million d’habitants, dans le cas où les hypothèses de projections démographiques se vérifieraient : comportements migratoires inchangés, fécondité stabilisée au niveau de 2007 et progression de l’espérance de vie selon le rythme observé ces dernières années. Entre 2010 et 2040, sa population augmenterait aussi vite que celle de la région Midi-Pyrénées (24%), soit beaucoup plus rapidement qu’en France métropolitaine (13%).
Deux fois plus de personnes âgées de plus de 75 ans. La situation actuelle de la Grande Agglomération toulousaine est atypique en Midi-Pyrénées, avec un nombre de jeunes de moins de 20 ans supérieur à celui des seniors de 60 ans ou plus. Mais l’arrivée aux grands âges de la génération née entre 1945 et 1975 fera évoluer les choses.
En 2040, la Grande Agglomération Toulousaine devrait compter 294.000 habitants de 60 ans ou plus, soit un quart de sa population. En particulier, le nombre de personnes de 75 ans ou plus devrait doubler en trente ans.
L’âge moyen resterait cependant le plus faible de la région. D’ici 2040, la part des 20-39 ans devrait baisser de 33% à 30%. L’âge moyen passerait de 37 ans à 41 ans entre 2007 et 2040 (44,8 ans en Midi-Pyrénées) et demeurerait ainsi parmi les plus bas de la région.
La population de Toulouse ne dépassera pas celle de Lyon en 2020
Toulouse ne passera pas à la 3e place des communes de France en 2020. C’est pourtant ce que les projections de l’INSEE prévoyaient, début 2010. Avec 459.000 habitants intra-muros en 2009 et un gain de 6.000 habitants par an, Toulouse aurait atteint 519.000 habitants en 2020, contre 510.000 environ pour Lyon. Mais la croissance de Lyon a réaccéléré entre 2006 et 2011, explique l’INSEE. Cependant, Toulouse pourrait doubler Lyon d’ici 2030. La ville est en effet trois fois plus vaste que Lyon et sa densité de population est trois fois moins élevée. Son potentiel de gain de population est donc plus important.
Expert : Jean-Philippe Grouthier, directeur de l’INSEE Midi-Pyrénées
Comment les décideurs politiques peuvent-ils utiliser votre étude ?
Les 116 communes de la Grande Agglomération Toulousaine pourraient abriter jusqu’à 1.167.000 habitants en 2040, contre 930.000 en 2009. Cela oblige forcément les décideurs à adapter leur politique. En termes de logement, d’infrastructures de transport. D’autant que nous ne prenons pas en compte forcément le développement de l’aspect économique dans notre étude.
Il y aura deux fois plus de personnes âgées de plus de 75 ans en 2040…
Cela doit forcément avoir un impact sur les politiques publiques. Logements, accessibilité, type de transports en commun. Il faut de l’habitat adapté (ascenseurs). Entre le tramway, le bus et le métro, il faut déterminer les moyens de transport les plus adaptés.
Source : La Dépêche - 07.04.2014

dimanche 7 décembre 2014

Mise au point sur l'orthographe dans les jurys des concours

Bonjour,
En pleine correction de vos DS3, j'ai été encore déçu par la négligence de certains au sujet de l'orthographe. Aussi, j'ai posé la question suivante à Alain Joyeux (correcteur ESCP et concepteur du nouveau programme) :
Alain,
je souhaite savoir si les correcteurs ont des consignes précises au sujet des fautes d'ortho ; j'ai un bon étudiant qui continue à être négligent et qui fait une bonne trentaine de fautes, un autre est pire !! Donc, jusqu'à combien de points en moins ?
Merci.

Voici sa réponse : 

Au delà de 20 fautes, cela peut être jusqu’à 3/4 points de moins. Certains jurés, dont je fais partie, considèrent même qu’un devoir bon sur le fond mais ayant complètement négligé la forme – dont l’orthographe – ne peut pas avoir la moyenne. D’ailleurs, M.Ramanantsoa, DG d’HEC, venu dans notre lycée il y a 2 semaines, l’a rappelé. Pas de bonne note sans orthographe maîtrisée!
Si le devoir est très bon mais avec plus de 20 fautes, je mets 9, jamais plus.
Alain

Dernier numéro d'Alternatives Internationales

Dossier de 15 pages sur le poids de la France aujourd'hui
+ Ukraine, Ebola, carte sur Erasmus...

jeudi 4 décembre 2014

Critéo, exemple de réussite d'une star-up française

Criteo, la start-up qui croît le plus vite en Europe  (source Le Figaro.fr)


Jean-Baptiste Rudelle, PDG de Criteo. Crédits photo: Criteo
INTERVIEW - Avec des ventes en hausse de plus de 200.000% en cinq ans, la pépite française domine le classement Deloitte des entreprises technologiques les plus dynamiques. Sa réussite tient largement à «la qualité des ingénieurs» formés en France, explique son PDG aufigaro.fr.


La France est une mine de start-up high tech, comme le confirme le 12e palmarès annuel de Deloitte sur les entreprises du secteur technologique les plus performantes dans les zones Europe, Moyen-Orient et Afrique. Pour la troisième année d'affilée, l'Hexagone est en pôle position, avec 90 sociétés sélectionnées sur les 500 du palmarès, contre 74 pour le Royaume-Uni et 24 pour l'Allemagne. Dans le top 10 du classement général, figurent trois sociétés françaises. Sewan Communications, spécialisée dans les télécommunications, arrache la 10e place avec une progression de son chiffre d'affaires sur les cinq dernières années de 7833%, tandis que le site Deezer de musique en ligne prend la 7e position (+10.455% de chiffres d'affaires en cinq ans). Et en tête du classement - de très loin - figure la pépite française Criteo, cette société spécialisée dans la publicité en ligne qui se rêve en futur «Google français».
Criteo affiche un taux de croissance de son chiffre d'affaires sur les cinq dernières années de... 202.100%! L'entreprise, créée en 2005, se définit aujourd'hui comme le leader mondial de la publicité «display à la performance», une publicité en ligne ciblée, réalisée à partir de données issues du parcours des internautes. Autrement dit, Criteo tente de prédire le meilleur moment et le meilleur endroit pour leur présenter une bannière qui affiche le produit que les internautes recherchent ou ont déjà recherché sur la toile. En sept ans d'existence, son effectif est passé de 20 à 800 personnes réparties dans 15 bureaux situés en Europe, en Amérique et en Asie-Pacifique. Jean-Baptiste Rudelle, cofondateur et PDG de Criteo, explique au Figaro.fr comment son activité a décollé de manière aussi spectaculaire.

LEFIGARO.FR - Comment parvenez-vous à un taux de croissance aussi vertigineux en pleine crise économique?

Jean-Baptiste RUDELLE - C'est peut être un hasard du calendrier mais il est vrai que nous avons vu un décollage de notre activité en 2008, au début de la crise. Je pense que nous avons un modèle économique qui est bien adapté à la période actuelle. En faisant du marketing à la performance, nous permettons à nos clients de mesurer la rentabilité de leurs investissements en temps réel. C'est donc quelque chose de séduisant pour des annonceurs sous pression, très regardant sur leur investissements publicitaires.
Vous avez choisi de développer votre business à l'international. Etait-ce un choix stratégique?
C'était une volonté dès le démarrage car notre activité était très facile à internationaliser. Si nous étions restés en France, nous n'aurions jamais connu une telle croissance et nous nous serions privés de 95% du potentiel de notre activité.
Vous avez d'ailleurs vécu aux Etats-Unis en vous installant dans la Sillicon Valley…
Il faut savoir que peu de start-up européennes ont réussi aux États-Unis. Le marché est très concurrentiel et il est difficile d'attirer de nouveaux talents en tant qu'entreprises européennes. Pour ce faire, j'ai décidé de me mettre dans la peau d'un Américain, de vivre à l'américaine, de scolariser mes enfants là-bas pour leurs montrer que j'avais réellement envie monter un business à long terme aux Etats-Unis. Même si nous étions déjà rentables, nous avons aussi fait entrer quelques investisseurs américains au capital et pu bénéficier de leurs réseaux.
Vous avez quatre bureaux aux États-Unis, et pourtant Criteo reste français. Pourquoi?
On se définit comme une entreprise globale car nous avons des parts de marché dans le monde entier. En France, ce marché est petit mais il existe quelque chose que vous ne trouverez nulle part ailleurs: la qualité de ses ingénieurs, qui représentent aujourd'hui 40% de mes effectifs. D'ailleurs, nous avons ouvert un nouveau centre de R&D de 10.000 m² au cœur de Paris en juin 2012. Une des clés de notre accélération, c'est que nous investissons massivement dans la R&D. Il ne faut jamais se reposer sur ses lauriers et toujours avoir un coup d'avance.
Quels sont vos objectifs pour 2013?
Nous aurons une très forte croissance l'année prochaine. Nous allons continuer à investir en R&D et dans nos centres de calculs. Ensuite, nous devrions embaucher entre 300 et 400 nouvelles personnes. Enfin, nous allons développer nos relations stratégiques avec nos grands partenaires comme Les 3 Suisses, Price Minister, Expedia ou Dell pour ne citer qu'eux. Nous avons d'ailleurs signé un partenariat avec Yahoo! Japon, qui nous a donné un accès exclusif à son inventaire publicitaire.
Avez-vous réfléchi à une introduction en Bourse?
C'est clairement quelque chose de probable mais on veut faire ça au bon moment, en étant bien préparé. Pourquoi pas 2013, on verra... Ce sera en tout cas une étape naturelle dans le parcours de l'entreprise, vu le potentiel que nous avons en terme de croissance.
Selon vous, pourquoi les start-up françaises dans le secteur technologique sont-elles performantes?
C'est un secteur jeune qui a su grandir. Depuis les années 2000, les entrepreneurs qui avaient lancé leur première boîte au milieu des années 1990 ont monté leur deuxième, troisième start-up avec plus d'expérience et de maturité. On a d'ailleurs vu tout un écosystème de serial entrepreneurs se développer et des entreprises plus solides et plus globales se développer. Mais la véritable force de la France reste ses ingénieurs.
Qu'est-ce que vous conseillez aux autres start-up?
Je leur conseille de voir grand, de ne pas avoir peur d'aller à l'international. Les Américains ont réussi, il n'y a pas de raison que nous n'y arrivons pas. En tout cas, j'espère que nous pourrons être une source d'inspiration pour les autres car je pense que c'est en voyant de belles histoires, qu'on a envie de franchir le cap.
LIRE AUSSI:

jeudi 27 novembre 2014

Complément de cours sur l'Ukraine

Interview de Pascal Boniface, de l'IRIS.
Lien : http://www.iris-france.org/informez-vous/tribune.php?numero=971

mardi 25 novembre 2014

vendredi 21 novembre 2014

Deux magazines en vente

CARTO N°26 avec un dosseir sur l'Arctique et
Hors-série n°1 du magazine CONFLITS consacré sur la "guerre économique", problématique qui revient à la surface depuis qques années (guerre des monnaies par ex).

dimanche 16 novembre 2014

Qui est Donald TUSK ?

Voir la présentation du remplaçant de Me Ashton par le site de géopolitique de Pierre Verluise, Diploweb.com ; lire ci-dessous ou aller sur le site
http://www.diploweb.com/Conseil-europeen-D-Tusk-president.html?utm_source=sendinblue&utm_campaign=NL40__17112014&utm_medium=email
Le Conseil européen a élu Donald Tusk comme président pour la période allant du 1er décembre 2014 au 31 mai 2017. Celui-ci a également été nommé président du sommet de la zone euro pour la même période. Le Dr Mateusz Hudzikowski a rédigé directement en français cette présentation de Donald Tusk, un stratège politique désormais à la tête du Conseil européen (UE).
« La politique – l’art de gagner le pouvoir et se maintenir au pouvoir. » Une définition dite « classique », mais anonyme.
LE PREMIER MINISTRE polonais, Donald Tusk, a été nommé à la tête du Conseil de l’Union européenne. Qui est-il ? Que signifie ce choix pour la Pologne et pour l’Union européenne ?
M. Tusk, au pouvoir en Pologne depuis 7 ans, est avant tout un homme politique très adroit et chevronné. Depuis la chute du communisme en Pologne (1989), c’est le Premier Ministre qui a occupé le plus longtemps le poste de chef du gouvernement. C’est un record dans les conditions difficiles rencontrées par la jeune démocratie polonaise qui a connu des cadences courtes, des élections fréquentes et des changements gouvernementaux violents.

Le Conseil européen, de quoi s’agit-il ?
"Le Conseil européen définit les orientations et les priorités politiques générales de l’Union européenne. Avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le 1er décembre 2009, il est devenu une institution à part entière. Il a d’abord eté présidé par Herman Van Rompuy.
Voici quelques questions sur ce qu’est et ce que fait le Conseil européen, ainsi que des réponses tirées de l’article 15 du traité sur l’Union européenne (première partie du traité de Lisbonne). Le Conseil européen est composé des chefs d’État ou de gouvernement des États membres, ainsi que de son président et du président de la Commission. Le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité participe à ses travaux. Lorsque l’ordre du jour l’exige, les membres du Conseil européen peuvent décider d’être assistés chacun par un ministre et, en ce qui concerne le président de la Commission, par un membre de la Commission. Le Conseil européen se réunit deux fois par semestre sur convocation de son président. Si la situation l’exige, le président convoquera une réunion extraordinaire du Conseil européen. Le Conseil européen se prononce normalement par consensus. Dans certains cas, il adopte ses décisions à l’unanimité ou à la majorité qualifiée, selon ce que prévoit le traité. Le Conseil européen élit son président à la majorité qualifiée. Le mandat de ce dernier a une durée de deux ans et demi et est renouvelable une seule fois."
Source : european-council.europa.eu

« Jours de formation »

Le début de l’année 2014 ne semblait pas favorable à D. Tusk, chef de la Plateforme civique (parti gouvernemental). La popularité du gouvernement était en baisse et d’après les sondages, l’avantage de l’opposition se faisait de plus en plus évident. Après sept ans de domination politique avec la majorité à la Diète (chambre basse) [1] grâce à l’alliance avec le PSL (Parti paysan polonais) et sous le président Bronislaw Komorowski, plutôt mesuré et amical, le spectre d’un échec électoral est soudain apparu à l’horizon.
Les années 2014 et 2015 sont des années électorales en Pologne. L’agenda politique est impitoyable.
Les années 2014 et 2015 sont des années électorales en Pologne. L’agenda politique est impitoyable. Les élections européennes ont eu lieu en mai 2014 ; à l’automne se dérouleront les élections municipales et en 2015, ce sera le tour des législatives et de la présidentielle. En outre, quelques élections supplémentaires ont déjà lieu (celles-ci se déroulent par exemple quand un membre du Sénat est élu à la Diète ou au Parlement européen).
Pendant cette période électorale, toute la vie politique est concentrée sur la prise de pouvoir ou sa conservation. Il est extrêmement difficile de faire de grands projets politiques car chaque erreur ou chaque attaque de la part de l’opposition, des médias ou des citoyens peut mal se finir. Ce n’est pas non plus le moment pour une politique raisonnable car chaque parti énonce ses propositions, ses promesses et ses concepts sans réflexion ou préparation solides. 
Le 25 mai 2014, il semblait que - plus grand parti d’opposition - Droit et justice (PiS), remporterait la victoire car il était en tête dans les sondages jusqu’au dernier moment. Finalement, PiS perdit à 31,78% contre 32,13% pour la Plateforme civique. Certains ont constaté un match nul, car les deux partis se sont assuré 19 places chacun au Parlement européen [2]. Mais ce n’était pas vrai : Donald Tusk et son parti ont gagné encore une fois.
Néanmoins, la tendance électorale peut être alarmante pour lui. La victoire de mai 2014 était minime. Et une fois encore, cela a commencé à vraiment mal tourner : c’est le PiS qui a gagné les élections supplémentaires au Sénat le 7 septembre 2014.
La série noire pour le parti gouvernemental continue. Dans la période 2011-2015, cette compétition additionnelle (qui coûte cher mais est imposée par la loi électorale [3]) a eu lieu trois fois : en avril 2013, septembre 2013 et septembre 2014. A chaque fois, c’est Droit et justice qui l’a emporté et non la Plateforme civique [4].
Le double échec de la Plateforme civique à Rybnik (Haute-Silésie) est frappant. La région de Haute-Silésie est traditionnellement centriste (à l’exception de quelques mouvements autonomistes) et la Plateforme civique y maintenait une importante popularité depuis sa formation en 2001. Même pendant la domination générale de la gauche en Pologne (2001-2005) ou la période de suprématie de Droit et Justice (2005-2007), la position de Donald Tusk et de ses collègues dans cette partie de la Voïvodie de Silésie n’avait pas été perturbée [5]. 
La Plateforme civique essaie donc de sauver la face en affirmant que l’opposition « surestime » ses victoires consécutives aux élections supplémentaires. Toutefois, pour Droit et justice, c’est une « répétition générale » avant leur marche vers le pouvoir.

Toutes les plaies d’Egypte

Mais ces batailles électorales ne représentent pas le seul problème du Premier Ministre sortant. Pour Donald Tusk, de plus grands problèmes à résoudre ou à éviter existent. Malheureusement pour la Pologne et pour l’Europe, ils n’ont pas disparu avec sa nomination à la tête du Conseil européen. C’est le cas de la crise ukrainienne qui peut devenir une nouvelle « guerre froide » entre la Russie et l’Ouest, des conséquences des perturbations financières d’il y a sept ans, du ralentissement économique en Europe ou encore du risque de désintégration de l’UE.
En outre, ces « tempêtes » sont accompagnées de plusieurs difficultés intérieures en Pologne. En tant que chef du gouvernement, Donald Tusk a dû faire face à de multiples défis et erreurs de son équipe.


Une critique constante

La société polonaise est très critique. Les Polonais aiment surtout critiquer leur gouvernement et leur administration, quels que soient les détenteurs du pouvoir. Comme les Français, ils émettent un avis négatif sur l’Etat et sa façon d’agir.
Tout d’abord, il faudrait demander d’où provient cette diminution de la popularité du gouvernement et du parti gouvernemental en Pologne. Bien évidemment, cette baisse de popularité est une source de danger pour la Plateforme civique à l’approche des élections. La Plateforme civique, c’était autrefois des hommes plein de succès, des libéraux souriants et optimistes. Et son leader, un « homme moderne, cool, easy going » [6]. La Pologne les aime-t-elle toujours ?
Dans une perspective sociologique, la société polonaise est très critique. Les Polonais aiment surtout critiquer leur gouvernement et leur administration, quels que soient les détenteurs du pouvoir. Comme les Français, ils émettent un avis négatif sur l’Etat et sa façon d’agir. On peut dire que les Polonais sont toujours dans l’opposition même s’ils ont voté pour des partis qui possèdent actuellement la majorité à la Diète et au Sénat. 
Des facteurs historiques ont une certaine influence sur le statu quo. La nation polonaise s’est opposée aux envahisseurs pendant deux siècles (lors de la période des partages de la Pologne), puis aux occupants allemands et soviétiques (Deuxième Guerre mondiale) et enfin aux autorités communistes polonaises. Il faut noter que ces dernières sont jusqu’à aujourd’hui considérées par une partie de la société polonaise comme des collaborateurs soviétiques et un gouvernement fantoche [7].
Les racines de la méfiance sociale sont très profondes. La démocratie polonaise est beaucoup plus jeune que celle de certains pays occidentaux de tradition démocratique plus ancienne : 21 ans de démocratie dans l’entre-deux-guerres et 25 ans depuis la chute du communisme en 1989. L’idée de de Gaulle pour la France, « Un pays qui produit 365 sortes de fromages est ingouvernable », s’applique aussi à la Pologne : une société qui s’oppose à tout le monde est difficile à gouverner. C’est pourquoi ces sept années en tant que Premier Ministre sont un succès personnel pour Donald Tusk.

Des « vagues d’océan »

Il faut se rendre compte qu’après une transformation économique et sociale difficile (les réformes de Balcerowicz) dans les années 1990, une partie considérable de la société polonaise nourrissait de grands espoirs à l’égard de l’adhésion à l’Union européenne en 2004. Au début du XXIème siècle, l’optimisme régnait chez les Polonais. Cet optimisme était bien soutenu par des fonds européens transférés en Pologne dans les années 2004-2006 et 2007-2013.
Mais « la lune de miel » européenne touche à sa fin en 2008 quand la crise financière frappe l’économie mondiale et que les perspectives économiques de l’Europe centrale et orientale s’assombrissent.
Certes, la Pologne est souvent présentée comme une « île verte » sur l’océan de la crise ; néanmoins cette expression fonctionne plutôt comme un élément de la propagande gouvernementale et elle a été rapidement démentie par la réalité [8].
Conseil européen : D. Tusk président. Qui est-il ?
Donald Tusk en séance.
Dans ces conditions, même s’il existe un plan ambitieux de réformes, les moyens ne sont plus là pour le réaliser. Les promesses sont remises à plus tard.
Après 25 ans de « rêve euro-américain », qui n’était pas le temps heureux il s’avère que les vainqueurs sont ceux qui ont bénéficié des fonds européens abondants ou ceux qui sont partis à l’étranger. 
Les jeunes électeurs qui ont largement voté pour la Plateforme civique en 2007 et 2011 supportent maintenant massivement des mouvements radicaux, principalement la Nouvelle Droite de Janusz Korwin-Mikke, un parti eurosceptique et extrêmement libéral.
D. Tusk sait surfer sur une mer politique tourmentée
Les idées libérales de la Plateforme civique de 2007 et l’histoire du succès polonais restent donc dans la sphère des déclarations gouvernementales.
Même si les opinions de la « génération désenchantée » sont vraies, ce qu’il faut retenir, c’est que M. Tusk n’est pas responsable de ces « vagues de l’océan » économique. Il ne donne pas non plus d’espoir aux jeunes pour leur avenir mais il sait comment surfer sur une mer politique tourmentée.

Des négligences

Est-ce à dire alors que les Polonais n’ont pas le droit d’exprimer leur mécontentement ? Au contraire : la critique visant le gouvernement de M. Tusk est fondée.
Rappelons quelques-unes de ses promesses : une administration efficace, un Etat moins dépensier, un système de santé réformé, faciliter l’innovation et l’entreprenariat. Son slogan électoral : « Libérer l’énergie des Polonais ». 
Ce sont toutes des bonnes idées, surtout en temps de crise quand il faut dépenser moins, produire et vendre plus. C’est pourquoi la Plateforme civique se réjouissait du soutien considérable de la part des jeunes Polonais en 2007.
Après 7 ans avec le parti libéral au pouvoir, on trouve l’administration moins efficace, l’Etat plus dépensier, la santé toujours sans réformes. Il est plus difficile d’établir une entreprise en Pologne qu’en France [9]. Selon certaines données, le niveau d’innovation se trouve en décroissance forte [10].
Il existe aussi de grandes questions concernant l’infrastructure. Dans le domaine de la sécurité énergétique, la Pologne se trouve dans un état de dépendance vis-à-vis de la Russie. Les énergies renouvelables ou les centrales nucléaires sont sujettes à débat mais restent des projets sur le papier. On assiste à une crise permanente dans l’industrie minière. Les trois autoroutes polonaises sont toujours en construction. Malgré une domination du transport routier, le réseau de routes ne s’est pas amélioré, ce qui a des répercussions non seulement économiques et sociales, mais aussi militaires [11]. Les chemins de fer connaissent la même situation [12].
Sur-exposés au chômage, les jeunes Polonais émigrent.
Avec ces négligences, le chômage : 11,9 % en juillet 2014 [13] (des données plutôt optimistes) dont 27, 2% [14] chez les 15-24 ans, soit au total plus de 1,8 million de citoyens. Imaginez qu’en même temps, plus de 2 millions de personnes travaillent à l’étranger, sur 38 millions de Polonais.
Il n’est alors pas surprenant que les jeunes Polonais émigrent [15]. Ils ont des attentes plus grandes et ne sont pas certains de leur avenir en Pologne. Toutefois, la propagande du succès polonais ne cesse d’être répétée. Cette propagande est décrite en Pologne comme « P.R. » - l’abréviation de l’anglais public relations - qui y a gagné un sens péjoratif. Faire des P.R., c’est travailler sur l’image et communiquer par des médias sans travailler sérieusement. Généralement, on accuse D. Tusk de se concentrer sur une question d’image au lieu de résoudre des problèmes réels. Même si c’est vrai, bravo à lui car c’est efficace : son gouvernement est toujours au pouvoir.

Des stratégies hostiles

Avec les arguments cités ci-dessus, la polémique concernant la politique de M. Tusk semble être plus que facile. Mais cet homme politique est l’un de plus expérimentés de Pologne, peut-être au premier rang avec son plus grand rival, le chef de Droit et justice Jarosław Kaczyński.
Celui-ci reste beaucoup moins populaire. On entend en Pologne que même si M. Kaczyński dit une chose raisonnable, vraie ou réelle, son discours n’est pas bien accueilli par les Polonais à cause de son image négative. 
En bref, une critique de la part de M. Kaczyński augmente dans tous les cas la popularité de M. Tusk. 
Finalement, Kaczyński a compris qu’attaquer le leader de la Plateforme civique personnellement et directement est un choix contreproductif. Vu que la liste des erreurs et des négligences de M. Tusk s’allonge, M. Kaczyński a constaté avec justesse qu’il lui vaut mieux esquisser un pas de côté et attendre. Permettons alors aux électeurs d’évaluer le Premier Ministre et son équipe.
Donald Tusk, comme son adversaire, est intelligent et perspicace. Il tentait de se distancer de la politique de son gouvernement et utilisait ses ministres comme « paratonnerres » quand des décisions gouvernementales provoquaient des éclats de colère dans la société. De cette façon, sa cote de popularité est restée meilleure que celle de ses ministres. Aucune affaire ne l’a touché personnellement. C’est le Premier Ministre « Téflon », semblable à Madame Merkel [16] avec laquelle il entretient de bonnes relations.

Des complots au palais

A propos de la Chancelière allemande, le mot « chancelier » désigne en Pologne un leader efficace qui a la main ferme et une sorte de savoir-faire organisationnel. Si quelqu’un mérite d’être nommé « chancelier », c’est bien Donald Tusk [17].
Il est l’un des trois fondateurs de la Plateforme civique (créée en 2001) [18]. Il « règne » sur son parti sans interruption depuis 2003, indépendamment des disputes et ruptures intérieures. 
Il nomme ses rivaux au sein du parti à des postes difficiles, aux domaines où ils (ou elles) risquent de se tromper ou de devenir impopulaires aux yeux des journalistes et électeurs. Ils ont dû se concentrer sur leur travail et n’ont pas de temps pour planifier un coup contre le chef. Cette tactique a sécurisé la position de Donald Tusk. Il fait ce qu’un homme politique et un chef d’un parti doivent faire, donnant l’impression de remplir son rôle à la perfection. 
En tout cas, sa nomination bruxelloise est un succès politique et professionnel. Il a rêvé de la présidence en 2005 mais Lech Kaczyński, frère de Jarosław Kaczyński, l’a battu au second tour. A présent, la présidence semble impossible : le président Bronisław Komorowski est toujours un homme de la Plateforme civique. Le ministre des affaires étrangères sortant Radosław Sikorski pense lui aussi au palais présidentiel de Varsovie. M. Sikorski, bien expérimenté dans le monde anglo-américain, est maintenant [novembre 2014] le Président de la Diète (Marszałek Sejmu en polonais). C’est un poste considéré comme une pole position(position de tête) dans la course à la présidence.
Madame Ewa Kopacz, Présidente de la Diète sortant et nouveau Premier Ministre, est également dans la course. C’est une « prétorienne » fidèle à son chef, mais qui sait ?
Pour Donald Tusk, depuis la défaite de 2005, la concurrence est trop forte aujourd’hui et le risque de ruptures au sein du parti est trop grand. Le travail à Bruxelles lui donne le temps et l’opportunité de développer sa carrière en attendant de voir comment continue à se dérouler la vie politique polonaise.

La menace de Moscou

L’annexion de la Crimée (mars 2014) et l’intervention russe en Ukraine de l’Est constituent un cadeau involontaire deVladimir Poutine à Donald Tusk.
Quand Donald Tusk se préoccupait de la situation en Pologne, la crise ukrainienne a éclaté. Les événements à l’Est compliquent la position internationale de la Pologne. Ce pays, ainsi que les Pays baltes (Lituanie, Lettonie, Estonie) constituent le flanc oriental de l’OTAN et de l’UE ; ils forment la frontière avec la Fédération de Russie et ils sont donc directement menacés par Vladimir Poutine [19].
Leur entourage proche n’est pas capable de se réunifier. L’Allemagne ne veut pas prendre de positions radicales. La Slovaquie et la République tchèque montrent une attitude assez neutre et même amicale à l’égard de la Russie. La Hongrie est pro-russe. Le reste de l’UE a ses propres problèmes. Les alliés américains sont très loin.
En revanche, l’annexion de la Crimée et l’intervention russe en Ukraine de l’Est constituent un cadeau involontaire de Vladimir Poutine à Donald Tusk. Celui-ci a immédiatement lancé une rhétorique patriotique en unifiant les rangs de ses partisans. C’était aussi une juste réponse à la guerre de l’information entamée par la Russie. La probabilité de l’escalade du conflit, le discours russe hostile, tout cela détourne l’attention de l’opinion publique polonaise de la situation intérieure. En effet, la chute de popularité du parti gouvernemental a été freinée.
Une fois encore, le Premier Ministre polonais a montré son habileté et efficacité.

Le moindre de ses soucis : l’affaire des écoutes

En juin 2014, une affaire éclate. Les plus hautes personnalités de l’Etat, dont le Ministre des Affaires Étrangères, le chef de la banque centrale et le Ministre de l’Intérieur, ont été sur écoute et enregistrées entre 2013 et 2014 (selon la version officielle), lors de conversations privées mais concernant la vie politique.
A la suite de cette affaire, l’opposition demande la démission du gouvernement. Donald Tusk lance une contre-offensive. Selon lui, toutes les circonstances indiquent une tentative de coup d’Etat. Brusquement, il s’assure le vote de confiance au Parlement. Des arrestations ont lieu et des accusations sont émises. Avec le temps, l’affaire est passée au second plan.
Un événement choquant pour l’opinion publique mais sans répercussions graves pour le Premier Ministre sortant.

Conséquences

L’élection de Donald Tusk au Conseil européen peut paraitre surprenante. En Europe, il est une figure plutôt méconnue. Mais peut-être l’UE a-t-elle besoin de lui quand les défis s’accumulent ? La France a des problèmes économiques, l’Allemagne dépend énergétiquement de Moscou. Les Européens sont mécontents et l’Europe n’a pas d’idées pour l’avenir. Comment renouveler la prospérité ? Comment rivaliser avec la Chine ? Comment se comporter envers la Russie ?
Donald Tusk est footballeur. Il a une belle opportunité de prouver ses compétences de leader en tant que capitaine d’une équipe internationale, le Conseil européen. Il planifie, analyse, cherche des buts à réaliser. C’est un stratège et un joueur politique formidable. Sa persévérance et sa patience en font un adversaire redoutable. Le potentiel de M. Tusk ne provient pas du poste qu’il occupe mais de son caractère et de son image. Pour faire des P.R. et bluffer, il faut aussi du talent. Donald Tusk sait comment se vendre. Il peut le faire pour l’Europe ou pour lui-même. Au moins, il présentera une bonne image de l’Europe.
Le Président du Conseil européen est un poste plutôt administratif et protocolaire. Son pouvoir réel est limité. 
La nomination de D. Tusk a été présentée en Pologne comme un succès extraordinaire du pays. Répétons que c’est surtout une victoire personnelle de M. Tusk. Pour son pays, c’est certainement une question d’image, comme l’organisation de l’EURO 2012 ou – toutes proportions gardées – des victoires sportives comme le championnat de monde de volley-ball masculin qui s’est déroulé du 30 août au 21 septembre 2014 en Pologne. La victoire de l’équipe polonaise en finale le 21 septembre à Katowice pour la première fois depuis quarante ans constitue un événement extraordinaire. Pour un Polonais moyen, c’est bien plus important que la nomination de Donald Tusk au Conseil européen.
En Pologne, la nomination de M. Tusk change vraiment peu la situation. Le parti de Tusk s’affaiblira sans son chancelier. Le risque d’échec électoral s’accroît mais rien n’est encore certain. Le gouvernement sera plus faible à cause de l’absence d’un leader performant. Plus important encore : c’était lui le moteur de la politique étrangère polonaise pendant la crise ukrainienne. Saura-t-il contrebalancer son absence à Varsovie par ses initiatives au Conseil ?
Il y a beaucoup d’arguments contre la politique intérieure de Donald Tusk en Pologne. Presque tous sont fondés. Mais la politique n’est pas le management d’une entreprise. Il ne s’agit pas de problèmes, de projets et de budget. Il faut gagner le pouvoir. Et puis le conserver.
Novembre 2014-Hudzikowski/Diploweb.com 
NDLR : La rédaction remercie Charlotte Bezamat-Mantes et Sylvie Blanchet pour leur relecture du document. 

Plus
. Mateus Huzikowski, EUROPA ŚRODKOWA I WSCHODNIA Z PERSPEKTYWY FRANCUSKICH ŚRODOWISK EKSPERCKICH, Instytut Geopolityki, 2014.
Cel badań, których owocem jest niniejsza książka, to określenie stopnia zainteresowania francuskich specjalistów w dziedzinie polityki międzynarodowej obszarem Europy Środkowej i Wschodniej. W szczególności skłania do refleksji sposób postrzegania tego regionu przez francuskie ośrodki analityczne i badawcze.
Specjaliści z Francji prezentują stanowisko, które wiele mówi o nich samych, ale także o Europie Środkowej i Wschodniej. Ich punkt widzenia jest interesujący jako źródło wiedzy o francuskich badaniach stosunków międzynarodowych i o wzajemnym postrzeganiu rządów i społeczeństw. Niewątpliwie aktualnymi tematami - z powodu bieżących wydarzeń na Ukrainie - są dla francuskich ekspertów dalsze losy integracji europejskiej, kolejne rozszerzenia UE na wschód oraz rola Rosji w Eurazji i na świecie.

[1] Le Sejm ou Diète de la République de Pologne (Sejm Rzeczypospolitej Polskiej, en polonais) est la chambre basse du Parlement polonais. Elle exerce le pouvoir législatif, vote le budget conjointement avec le Sénat et contrôle l’action du gouvernement, responsable devant elle.
[2] Source : Commission électorale d’État (Państwowa Komisja Wyborcza), pe2014.pkw.gov.pl/pl/, consulté le 18 septembre 2014.
[3] Code électoral du 5 janvier 2011 : Ustawa z dnia 5 stycznia 2011 r. – Kodeks wyborczy (Dz. U. z 2011 r. Nr 21, poz. 112). Source : isap.sejm.gov.pl/DetailsServlet ?id=WDU20110210112 , consulté le 18 septembre 2014).
[4] Commission électorale d’État (Państwowa Komisja Wyborcza), pkw.gov.pl/wybory-uzupelniajace-do-senatu-rp/, consulté le 18 septembre 2014.
[5] La Voïvodie de Silésie (unité administrative) se compose de quatre régions principales : la région de Haute-Silésie (centriste, conservatrice), Zagłębie Dąbrowskie (Bassin de Dąbrowa avec une grande tradition de gauche), la région de Częstochowa (mixte), Żywiecczyzna (une région montagneuse de Żywiec, faisant historiquement partie de la Petite Pologne, traditionnelle, conservatrice, proche de la droite). Leur origine historique et leurs différences géographiques influencent la géographie électorale de la Voïvodie de Silésie. Le bassin de Dąbrowa, la région de Częstochowa et Żywiecczyzna font partie de la Petite Pologne (perspective historique) bien qu’aujourd’hui le caractère de ces quatre « régions » soit tout à fait différent.
[6] S. Nies, « Après l’Allemagne, la Pologne refuse aussi l’ultralibéralisme », La lettre d’information de l’IRIS 2005, n° 147.
[7] Pour la même raison, même si la République populaire de Pologne était un Etat légal selon le droit international et un pays reconnu sur la scène internationale, on considère que la Pologne a regagné son indépendance et sa liberté en 1989.
[8] Voir par exemple : W. Smoczyński, « Le rêve évaporé de la prospérité », voxeurop.eu/fr/content/article/2753311-le-reve-evapore-de-la-prosperite, consulté le 18 septembre 2014.
[9] doingbusiness.org/rankings, consulté le 18 septembre 2014.
[10] rybinski.eu/2014/09/katastrofa-innowacyjnosci-w-polsce/, consulté le 18 septembre 2014.
[11] M. Falkowski, A. Mondel, « Analiza geopolityczna układu komunikacyjnego Polski » (« L’analyse géopolitique du système de communication en Pologne »), Zeszyty Naukowe Wyższej Szkoły Oficerskiej Wojsk Lądowych, nr 2 (160) 2011.
[12] M. Falkowski, M. Pytel, « Determinanty geopolityczne i ich wpływ na układ komunikacyjny Polski » (« Facteurs géopolitiques et leur influence sur le système de communication en Pologne »), Przestrzeń i polityka. Czynnik geograficzny w badaniach politologicznych, éd. L. Sykulski, Polskie Towarzystwo Geopolityczne, Częstochowa 2013.
[13http://stat.gov.pl/obszary-tematycz..., consulté le 18 septembre 2014.
[14] rynekpracy.org/x/946883, consulté le 18 septembre 2014.
[15] Voir un rapport de Główny Urząd Statystyczny : stat.gov.pl/obszary-tematyczne/ludnosc/migracje-ludnosci/informacja-o-rozmiarach-i-kierunkach-emigracji-z-polski-w-latach-20042012,2,6.html, consulté le 18 septembre 2014.
[16] F. Therin, « Élections en Allemagne : Angela Merkel, la "chancelière Téflon" », Le Point, 20 septembre 2013, lepoint.fr/monde/elections-en-allemagne-angela-merkel-la-chanceliere-teflon-20-09-2013-1733285_24.php, consulté le 18 septembre 2014.
[17] Il y a plus de dix ans, ce pseudonyme était réservé à Leszek Miller, chef de la social-démocratie. Élu premier ministre en 2001, il a donné sa démission en 2004 suite à une affaire de corruption.
[18] Avec Andrzej Olechowski et Maciej Płażyński, qui est décédé le 10 avril 2010 à Smoleńsk.
[19] « Quand Poutine menace d’envahir l’Europe de l’Est », Le Point, lepoint.fr/monde/quand-poutine-